N° 202
Février

http://piednoir.fr
    carte de M. Bartolini J.P.
     Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Février 2020
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
http://www.seybouse.info/
Création de M. Bonemaint
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
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EDITO
  La Fête et la Conscience    

         2020, avec ses vœux de Bonne Année et ses bonnes résolutions, est bien commencée.
         " La purée de nous otres " ! Nous sommes déjà en février ! A peine, venons-nous de finir les galettes des rois et le cidre, que déjà demain, le 2 février, la Chandeleur nous tend les crêpes toutes chaudes avec encore du cidre !
         Ces belles traditions savent nous envoûter. Dans quelques jours ce sera le tour de la Saint-Valentin et encore du cidre ou pour certains le champagne, toujours des bulles qui seront partagées langoureusement. A ces événements de février, il faut rajouter, le mardi gras et les carnavals toujours accompagnés de "pétillants ".
         Février 2020 compte 29 jours, année bissextile oblige, cela donnera l'occasion à certains de fêter la journée supplémentaire.

         Février est aussi le début de la renaissance printanière ! Les jours s'allongent, les arbres bourgeonnent et commencent à refleurir ; les pépiements des oiseaux se font déjà entendre ; et les fleurs jaunes nous annoncent le retour de la belle saison tant attendue.

         Février va être aussi le théâtre des futures joutes politiciennes pour les municipales.
         Alors que nous n'avons pas fini avec les revendications justifiées des Gilets Jaunes ou de la contestation tout aussi justifiée de la prochaine loi sur les retraites, le président " Micron ", qui ne connaît rien du passé colonial de son pays, fait encore de la repentance honteuse, son cheval de bataille pour sa réélection.
         Est-ce que les veaux qui l'ont porté au pouvoir vont continuer à mener le pays à l'abattoir ? Est-ce que l'incompétence et l'amour de la finance vont continuer à ruiner le pays et déposséder les citoyens de leurs acquis ainsi que leurs avoirs ?
         Alors, oui la Fête c'est bien, mais la prise de conscience c'est mieux. Le présent est moche, mais le futur est très préoccupant pour les prochaines générations.

Jean Pierre Bartolini          
        Diobône,         A tchao.


Il y a soixante ans ! Le 24 janvier 1960.
Par M. Robert Charles PUIG


       A l'appel du " Collectif national NON au 19 mars 1962 ", présidé par Hervé Cuesta, nous nous sommes retrouvés quelques fidèles au souvenir de cette journée dramatique, devant la stèle de la promenade des Anglais de Nice - ce rocher fendu - comme peuvent l'être des cœurs en peine, pour honorer ce temps disparu.
       Nous étions peu nombreux ce 25 janvier 2020, mais fiers de porter avec le drapeau français, - celui sans tâche de notre épopée -, la preuve que le passé ne s'oublie pas. Pourtant, pourquoi si peu de patriotes présents avec nous ? J'ai cru tout à coup que Roger Hernandez, mort ce jour là au pied des barricades, ceux du 26 mars et du 5 juillet 1962, puis tous les assassinés du bled, européens et musulmans, les disparus, n'avaient plus leur place dans l'histoire de France. Comme si ce pan de notre Saga Pied-noir ne comptait plus. Comme si l'étouffement faisait son œuvre et paralysait les mémoires de nos compatriotes. Comme si le temps avait endurci les esprits et que l'oubli remplaçait l'honneur.
       Pourtant... souvenons-nous de cette journée du 24 janvier 1960. Elle faisait suite aux propos du général-président D.G., évoquant l'idée d'autodétermination que les Pieds-noirs inquiets traduisaient à juste titre en indépendance algérienne et FLN de cette terre française depuis si longtemps. Etait aussi évoqué le retour forcé en Métropole du général Massu après une interview à un journaliste allemand, Frantz Ulrich Kempski. - Journaliste d'un pays dont on sait combien les rapports avec le FLN étaient reconnus -. Un départ sanction de Massu laissant les Pieds-noirs qui adulaient le général, héros de l'éradication du terrorisme de la Casbah d'Alger en 1957, totalement désemparés.
       Notons que Cornut-Gentille mettra en garde D.G. contre la réaction des Pieds-noirs. Notons la réponse du général : " Ce sont des lâches. Ils ne bougeront pas ! " 1*
       Paris et l'Elysée n'ont pas compris que ce rappel de Massu va entraîner la colère d'Alger et Oran. Le peuple se rassemble dans les rues et à Alger c'est autour du Monument aux Morts, celui d'où en 1956 il lança des tomates à Guy Mollet et désapprouvait le départ de Soustelle.
       Ce 24 janvier 1960, le feu de la révolte couve chez les étudiants de Jacques Roseau et Susini, dans les milieux activistes où se retrouvent Alain de Sérigny de l'Echo d'Alger, Sapin-Lignière président des U.T. - unités territoriales - Joseph Ortiz et Pierre Lagaillarde. C'est ainsi que sous l'impulsion de ces responsables, s'organise l'insurrection d'Alger et les barricades. Cette " Journée du 24 janvier " voit les pavés d'Alger se dresser en barricades tandis qu'une grève générale est lancée pour le lundi suivant.
       La foule nombreuse, chaleureuse, participe à ces constructions avec de l'espoir au cœur d'un changement de politique pour cette province française.
       C'est alors au soir de ce 24 janvier 1960 que le colonel Debrosse, -connu pour les sévices qu'il fera subir aux patriotes à la caserne d'Hussein Dey - reçoit du général Costes l'ordre de disperser la foule.
       A 18 heures, c'est la charge contre la population. Des gendarmes en armes et casquées s'abattent sur le peuple ! C'est tout à coup le premier coup de feu !
       Qui a tiré ? La fusillade se généralise... Des dizaines de corps jonchent les escaliers du Forum et les rues de la capitale algéroise. Seuls les parachutistes arrivés en retard à cause des embouteillages finiront par stopper le massacre.
       - 8 morts et 24 blessés graves chez les civils.
       - 14 morts et 123 blessés dans les forces de l'ordre, dont 70 par balles, 27 par éclats et 26 par contusions.
       Qui a tiré ? Les gendarmes de Debrosse étaient au niveau du G.G. et les tirs se faisaient vers la rue Berthezène et le plateau des Glières... N'ont-ils pas atteint ceux des hommes se trouvant en contrebas de la trajectoire des balles, dont des policiers ?
       Le lundi 1er février, les assiégés se rendent. Le colonel Dufour obtient la reddition du groupe des facultés. Lagaillarde et ses hommes se rendent et défilent devant les parachutistes au garde à vous.
       Ortiz a disparu.
       Pour l'anecdote, après Soustelle et Massu, le colonel Bigeard au cœur " Algérie française ", sera interdit d'Alger et envoyé en disgrâce à Toul.
       Le procès des barricades aura lieu le 30 novembre 1960.
       Massu dira : " Le De Gaulle vu le 23 janvier 1960 n'a aucun rapport avec celui de 1941. "
       Finalement ce procès émaillé d'incidents où les peines seront diverses, ne réussira pas à déterminer d'où est parti le premier coup de feu. Un mystère...
       *1 Nota : Les paroles honteuses prononcées ce jour-là par D.G., sont loin de la vérité historique qui glorifie les Pieds-noirs et les musulmans durant les guerres de 14 / 14 et 39 / 45. Leur grand nombre et leurs morts sont la réponse aux minables propos du général.
       - De 1914 à 1918, l'Algérie a envoyé 115.000 hommes sur les 155.000 mobilisés, parmi la population européenne. 22.000 y laissèrent la vie ainsi qu'un grand nombre de musulmans.
       - En 1940, 160 régiments des divisions d'infanterie nord-africaines affrontèrent les blindés allemands sur le secteur Maubeuge-Sedan.
       - En 1942, après le débarquement allié, 173.000 Pieds-noirs et Musulmans seront appelés ou rappelés. Ils représenteront 16, 40 % de la population européenne et 1, 58 % de la population musulmane.
       Ils ont constitué les 4 /5 ième des armées françaises de la libération.
       Le 24 janvier 1960 ? Un jour et une époque qu'il serait triste et dommage d'oublier.

Robert Charles PUIG 27/01/2020       
      


PHOTOS de BÔNE
Envoyé par M. Henri Lunardelli
BONE, DU 30 NOVEMBRE AU 1 DECEMBRE 1942,
AVEC LE BATEAU HMS ARGONAUT










2 VIDEOS à VOIR
           https://www.iwm.org.uk/collections/item/object/1060034982
           PRISONNIERS DE GUERRE ; PORT DE BÔNE;
           PREMIER CONVOI À BIZERTE
           Embarquement des prisonniers au port de Bône. Défense anti-aérienne lors d'une attaque allemande au port de Bone. Le premier convoi allié atteint Bizerte.
           Les prisonniers allemands marchent jusqu'au port de Bône et montent à bord d'un bateau américain. Les prisonniers sous escorte française marchent en quatre le long du quai. Gros plan des prisonniers et escorte passant la caméra. Prisonniers marchant vers le haut de la passerelle du navire. Prisonniers passant la sentinelle française à la passerelle. Un traceur dans le ciel. Pom-pom naval. Un navire qui a été frappé pendant le raid brûlant. Le convoi d'embarcations de débarquement, de démineurs et de lancements de moteurs en mer.

           https://www.iwm.org.uk/collections/item/object/1060034951
           RAID AÉRIEN SUR BONE ET PREMIER CONVOI VERS BIZERTE
           Un raid aérien allemand sur Bône. Le premier convoi allié atteint Bizerte. Il transporte des provisions, des munitions et des matériaux pour la remise en état du port de Bizerte.
           Flashs de canons et traceurs la nuit. Le convoi de Tank Landing Craft et de démineurs en mer. Le convoi s'approche de Bizerte, passe dans le port et s'amarre. La 208 Docks Operating Company, Royal Engineers, débarque pour commencer les travaux. L'équipage du navire de tête guidant le convoi.


Pauvre légion d'honneur
ECHO D'ORANIE - N°254
Ce poème paru dans "l'Avenir de Mascara" du 31 août 1940, nous est envoyé par notre lecteur M.Guy Mermod, que nous remercions. Le poème n'est pas signé mais il est sans doute dû à la plume de Charles Dubar dont l'article paru dans "l'Echo de Bougie", et reproduit dans le même journal, fait état des mêmes réflexions.

         La Légion d'honneur, ce dernier mot l'indique,
          Fut créée autrefois par le Grand Empereur,
          Pour marquer des héros, les exploits magnifiques,
          Et les récompenser de leur haute valeur.

         Chapeau bas, devant ceux qui vraiment la méritent !
          Leurs noms sont au Tableau d'Honneur de la Nation:
          Mais les institutions, à la longue s'effritent
          Et croulent sous le poids des viles concussions!

         Au ciel, Napoléon, chaque jour, l'âme émue
          D'y voir tant de rubans de l'Ordre qu'il Créa,
          Dit au Bon Dieu: "Je vais les passer en revue...
          Venez donc admirer tous ces braves soldats..."

         Le défilé commence: Oh! Sans cérémonies!
          L'Empereur avait mis simplement sa grand'croix
          Sur un vieux complet gris, sans or ni broderies,
          Puis il interrogea le premier de son choix:

         -"Qu'as-tu fait pour avoir cette croix que tu portes?...
          -"Moi? J'étais épicier...Oui Sire c'est en gros
          Que je vendais, bon prix, des lots de toutes sortes:
          Des conserves, du lard, des nouilles, des pruneaux!

         "Va-t-en, fit l'Empereur...Voyons. toi, je suppose...
          "Moi? J'étais journaliste et des gouvernements,
          Etant subventionné, j'ai défendu leur cause.
          On m'a décoré pour...SERVICES EMINENTS!

         -"Pars! dit Napoléon dont la colère augmente...
          Et toi? "Je dirigeais un grand trust financier.
          Je savais spéculer sur le change, la rente...
          Oui, j'ai eu mon ruban grâce aux petits rentiers!

         "Ça, cria l'Empereur, c'est vraiment fantastique!
          Et toi? - "Sire, j'étais avocat sans procès ;
          Je pris des opinions, fis de la politique...
          Et j'obtins cette croix d'un ministre à succès!

         -"Et toi, vite réponds! -"Moi. Sire, j'étais riche;
          J'avais une écurie, un château, un cheptel,
          J'ai vendu des prix fous des poulains, des pouliches;
          Mais j'ai fait prospérer le Pari Mutuel.

         -"Un autre, par pitié! -"Moi, Sire, dans la vie,
          Je l'avoue humblement, d'exploits, je n'ai pas fait;
          Mais, j'avais une femme élégante et jolie,
          Qui, dans les ministères...beaucoup fréquentait!

         Napoléon rageait, retenant un blasphème!
          "Et toi, l'as-tu gagnée...enfin...par exception?
          -"Sire, je le crois bien, et pensez si je l'aime,
          Pour avoir ce bijou, j'ai payé deux millions!

         Bande de flibustiers!...Usurpateurs de gloire!...
          Hurla Napoléon, chassant les décorés,
          C'est ainsi que sur terre, on souille ma mémoire
          En vendant pour de l'or cet emblème sacré?

         Il restait, dans un coin, un dernier légionnaire
          -"Eh bien! Qu'attends-tu? -"Sire, daignez m'écouter!
          Je ne suis qu'un poilu de la dernière guerre,
          Pendant près de cinq ans, pour eux, j'ai dû lutter...

         "Bien que blessé sept fois, j'ai survécu quand même,
          Alors l'on m'a donné une maigre pension...
          Pour la femme, l'enfant, c'était souvent carême!
          Mais à quoi bon se plaindre...en France, ils sont légion!

         "Et pourtant cette croix, Sire, je vous l'assure,
          Ah! Comme je l'aurais portée avec orgueil!
          Ce n'est qu'une fois mort des suites de blessures
          Qu'elle fut déposée, un jour, sur mon cercueil..."

         Napoléon pleurait..."Enfin, dit-il, un BRAVE!
          Viens m'embrasser, petit! "Et fixant l'autre tas,
          Il arracha sa croix, et puis...d'une voix grave:
          "Prends-la! Tu la mérites, mais ne la porte pas!"
        




LE MUTILE N° 68, 1918


LE SIGNE DE LA RECONNAISSANCE

        Maintenant qu'est terminé le grand draine, maintenant que nous avons gagné la guerre, il va s'agir, comme a dit notre Clemenceau national dénommé le Père la Victoire, il va s'agir de gagner la paix. Et ce n'est pas une mince affaire.

        Ce n'est pas une mince affaire, car la conduite de la paix, qui succède à la conduite de la guerre, pose une foule de problèmes complexes et disons le mot, redoutables. Je ne l'entends pas seulement, faire allusion à la confection du traité de paix, et aux accords à établir, entre les, nations belligérantes. Ce ne sera pas la tâche la plus difficile. J'entends parler, et ce sera la besogne la plus ardue du passage progressif sans heurts, sans cahots qui soient dangereux, de l'état de guerre à l'état de paix.

        Le premier problème qui se pose, c'est la question de la démobilisation. A l'heure, où j'écris ces lignes, les modalités n'en ont pas encore été envisagées. Seules quelques vieilles classes ont été ou vont être rendues à la vie civile. Mais les autres ! Mais cette masse énorme de Français, qui comprend presque tous les hommes validés de la nation, depuis les enfants jusqu'à ceux que courbera demain la vieillesse ? Que va-t-on faire d'eux, le jour ou ils rentreront dans leurs foyers ? Comment leur assurera-t-on tes moyens d'existence ?

        Comment leur créera-t-on, dans leur condition nouvelle, le sort privilégié auquel leur donne droit l'acte de combattant que pendant si longtemps ils ont accompli, pour la gloire et la sécurité de la France ? Comment traitera-t-on les charges qu'ils avaient assumées jadis, dont certaines subsistent encore parce que, en raison de leur présence aux armées, ils ont perdu depuis 1914, tout moyen de s'en acquitter ? Quelle récompense pécuniaire allouera-t-on à leur valeur ? Quelle compensation donnera-t-on à leurs souffrances ? Enfin quelle distinction honorifique - point qui touché leur amour-propre de façon toute particulière - quelle distinction honorifique attribuera-t-on à ceux qui n'en ont point ?

       Parmi eux, beaucoup ont la poitrine vierge de décoration, non parce qu'ils n'en ont pas mérité, mais pour cette simple raison trop, souvent invoquée en vertu d'une règle bien fâcheuse, qu'il y avait trop de propositions, c'est-à-dire trop de héros, et qu'on ne pouvait lès récompenser tous !

        Ce point, qu'on ne s'y trompe pas, est l'un de ceux qui tiennent le plus au cœur du combattant. Celui-ci n'admet pas qu'on ne récompense pas, par un insigne qui lui soit personnel, par une distinction qui lui soit propre, les souffrances inouies qu'il a supportées, les dangers qu'il a courus, l'existence terrible qu'il a menée.

        J'entends bien qu'on a créé, précisément pour répondre à ce but, la croix de guerre, la médaille militaire, la Légion d'honneur. Le but, malheureusement, n'a pas été atteint.
       Nombreuses sont les propositions de citations qui n'ont pu avoir de suite, pour cette raison que je rappelais tout à l'heure, qu'une règle déplorable s'était instaurée aux armées, en vertu de laquelle on n'accordait qu'un tant pour cent des citations proposées par les chefs directs de la troupe. Déplorable, le mot n'est pas trop fort car des refus de ce genre pouvaient décourager les soldats, et leur équité était discutable, puisqu'ils étaient opposés par des bureaux qui ignoraient tout de l'action d'éclat en vertu de laquelle la proposition de citation avait été faite, tandis qu'au contraire les chefs qui avaient fait la proposition, et qui l'avait faite en toute connaissance de cause, avaient été généralement témoins des actes valeureux pour lesquels ils réclamaient une récompense.

       La médaille militaire ? C'était bien pire encore ! Quels obstacles ne fallait-il pas franchir pour l'obtenir ? En fait, on s'en est montré extrêmement avare. Et si les grands blessés ont pu l'obtenir généralement assez rapidement, par contre les autres, ceux que le sort avait épargnés, qui souvent avaient eu une conduite magnifique, se trouvaient dans la quasi-impossibilité de l'obtenir.

        J'en connais, j'en connais même beaucoup, de ces hommes qui ont fait leurs cinquante mois de guerre, sans être malades, sans être blessés, et sans avoir rien reçu.
       J'en connais qui ont tout fait, Charleroi, la Marne, la Champagne, l'Yser, Verdun, la Somme, et la seconde Marne libératrice, et tout ce qui s'en est suivi. Ils ont connu les affres des batailles les plus terribles, et ils ont connu les horreurs de l'hivernage, de quatre hivernages, dans la boue des tranchées.- La veine - ou la guigne - les a préservés de toute blessure. J'en connais parmi eux qui ont fait l'objet de là part de leur commandant de compagnie, d'une bonne demi-douzaine de propositions. Aucune n'a eu de suite. Ces hommes reviennent avec leur capote aussi nue, aussi dépourvue de décorations, que celle du dernier embusqué. Va-t-on laisser se perpétuer cette injustice?
       Et va-t-on se contenter de remettre à ceux-là, comme à n'importe quel auxiliaire ou à n'importe quel engagé spécial qui aura été mobilisé, avec carte de couchage,, à proximité de son domicile, l'insigne des mobilisés de la guerre ?

        Cette solution, dont certains envisagent pourtant l'application, ne serait pas admissible, Il n'est pas possible qu'une décoration spéciale, à laquelle auront droit tous les combattants, ne soit pas instituée. L'idée du général de Maud'huy, de remettre à chaque soldat son casque, à titre de souvenir, est véritablement excellente. Mais elle n'est pas suffisante, il faut encore autre chose. Il faut une décoration que l'homme pourra porter aussi bien sur ses vêtements civils que sur sa tenue militaire. Et il faut que cette décoration, absolument particulière au combattant, le distingue nettement, maintenant et toujours, entre Lotis les autres. On pourrait, par exemple, lui donner le ruban de la croix de guerre, sans palme ni étoile, avec l'inscription "Combat " marquée en lettres de bronze. Ainsi partout, et dans quelque costume qu'ils Soient, on pourrait distinguer d'entre tous les autres les combattants de la grande guerre. Ainsi un insigne distinctif les désignerait à la reconnaissance publique.
       Il faut qu'il en soit ainsi.

        Il faut qu'il en soit ainsi parce que ces hommes ont sauvé la France, le monde, la civilisation et l'humanité. Ce sont nos grands vivants et ce sont nos grands morts qui ont pétri, avec leur héroïsme et leur souffrance, le levain fécond d'où est sortie là prodigieuse victoire. Ce sont eux qui, par leurs vertus inégalées, ont préparé l'ère resplendissante dont l'aurore magnifique nous éblouit aujourd'hui. Ne leur marchandons pas la marque de notre reconnaissance. Si on la leur discutait, la France ne serait plus la France. Et il ne resterait plus qu'à voiler les statuts de la Justice !

MORTIMER-MÉGRET.               



“En quoi crois-tu” ?.
Envoyé par Annie

           Une fois décédés, George Bush, Barack Obama et Donald Trump se retrouvent devant Dieu pour être interrogés. Dieu demande à Bush: “En quoi crois-tu” ?

           Bush répond: "Je crois en une libre économie, une Amérique forte. La nation Américaine et tout le tra la la ...

           " Dieu est impressionné par Bush et lui dit: "Bien, viens t’'asseoir sur la chaise à ma droite"

           Dieu va vers Obama et lui demande: "En quoi crois-tu”?

           Obama répond: “Je crois dans la démocratie, l’’aide aux pauvres, la paix mondiale, etc. .... ".

           Dieu est réellement impressionné par Obama et lui dit: 'Très bien, viens t’'asseoir sur la chaise à ma gauche".

           Finalement Dieu rencontre Trump : “En quoi crois-tu” ?
           Trump répond: "Je crois que tu es assis sur ma chaise”".



Choléra-morbus : Début de la maladie
Envoyé par M. Christian Graille
Nous allons consigner ici les propres observations sur le choléra par M. J M Audouard, médecin principal d'armée, officier de la Légion d'honneur, envoyé extraordinairement en Afrique par M. le ministre de la guerre à l'occasion du choléra-morbus à Alger.

                  Dès les premiers jours de juillet 1835, la commission de santé d'Alger fut informée que le choléra régnait à Toulon, et, pour se conformer aux lois sanitaires, elle considéra comme suspectes toutes les provenances de ce pays. Un lazaret fut établi au fort Bab-Azoun, hors de la ville, et la quarantaine fut fixée à sept jours.

                 
                  Pendant ce mois, un nombre assez considérable de passagers y arriva par des bateaux à vapeur ou par des bâtiments marchands et quelques bâtiments de l'État qui avaient des cholériques à bord, le Triton principalement, furent éloignés du port et mis en rade pour éviter toute communication.
                  La ville d'Alger était donc menacée du choléra par terre et par mer. Il y en avait dans les tribus qui l'environnent, il y en avait aussi sur quelques bâtiments mouillés dans sa rade.
                  Cependant la première victime qu'il fit n'appartenait ni à la population ni aux tribus. Ce fut un soldat qui, conduit de prisons en prisons, venait de France pour entrer dans les bataillons d'Afrique.
                  Cet homme apporté par le bateau à vapeur la Chimère, fut déposé au lazaret avec les autres voyageurs, et le 2 août, sixième jour de sa quarantaine, il fut pris du choléra dont il mourut dans la nuit du 3 au 4.
                  On a bien dit qu'il y avait eu d'autres atteintes de choléra auparavant; mais ces cas, qui ne furent pas mortels, furent contestés et l'on s'accorda à dire que le premier avait été le soldat mort au lazaret.
                  Trois jours se passèrent sans que l'on vît de nouvelle apparence de choléra, mais :
                  - le 7, deux soldats en furent violemment atteints à l'hôpital militaire du Dey qui est à un quart de lieue de la ville, à l'extrémité opposée à celle où était le lazaret ou fort Bab-Azoun.
                  - Le 8, il y eut d'autres atteintes en ville, principalement dans la partie basse et celle qui renferme un grand nombre de juifs.
                  - Le 9, trois condamnés aux travaux publics en furent frappés. Ils habitaient le Fort-Neuf, à la porte Bab-el-Oued.
                  - Le 10, dès le matin, on eut connaissance de nouveaux cholériques parmi la population et parmi les condamnés dont l'habitation au Fort-Neuf était humide et malsaine.
                  Les condamnés furent transférés à Kouba, dans la campagne où sur six cents il en mourut trente-deux dans tout le cours de l'épidémie. M. Leroi, chirurgien aide-major, chargé de cette ambulance, en mourut aussi.
                  - Le 11, toutes les classes de la population, Maures, Juifs, Européens, comptaient plusieurs malades et la maladie était si promptement mortelle que de l'invasion à la mort il n'y avait souvent que quelques heures.
                  - Le 12, on reconnut que la caserne des Lions, rue Bab-Azoun, avait perdu beaucoup d'hommes en très peu de temps, ce qui effraya, et on l'évacua. Mais déjà les juifs étaient attaqués en très grand nombre et toujours dans la partie basse de la ville.

                  De ce jour date l'établissement des bureaux de secours; mais les Maures, qui s'accommodent peu de nos coutumes, les délaissaient et les juifs en faisaient autant.
                  - Le 13, point de changement notable. La maladie cause de nouvelles pertes, principalement parmi les hommes qui abusent de boissons spiritueuses.
                  - Le 14, même état. La peur se répand ; on voit que le fléau va toujours croissant et beaucoup de personnes quittent la ville.

                  Les Maures et les juifs riches vont à la campagne et les Européens qui peuvent s'embarquer vont en France ou en Italie. La population est réduite à vingt-quatre mille âmes, dont la moitié maure et l'autre moitié mi-partie de juifs et d'Européens.
                  Aux efforts de l'Administration pour atténuer les effets du fléau, les indigènes opposent une force d'inertie incroyable, tant leurs usages et leurs idées religieuses les tiennent éloignés des nôtres ; les juifs aussi refusent d'enterrer leurs coreligionnaires le samedi. Pour les y contraindre, on les menace de mettre leurs morts dans la fosse commune, après les avoir enlevés de vive force de chez eux. Il est arrivé plusieurs fois que les cadavres sont restés deux jours dans leurs maisons, ou mieux dans leurs gîtes étroits, en compagnie de la famille entière.

                  Pour ne pas déroger à leurs coutumes, les Maures et les juifs refusent aussi de laisser répandre de la chaux vive sur leurs morts qu'ils mettent dans des fosses à trois pieds de profondeur au plus.
                  On soupçonne même, que, pour se soustraire aux mesures hygiéniques, les indigènes enterrent dans leurs maisons. Des visites domiciliaires sont faites, au grand déplaisir des Maures ; on ne découvre aucune sépulture mais on reste persuadé que cela a eu lieu. Tous les hôpitaux sont encombrés ; on a dû y recevoir les Européens étrangers à l'armée, car alors il n'y avait pas encore d'hôpital civil.
                  - Le 15, la mortalité est effrayante, et, soit le grand nombre de morts, soit la terreur qui a frappé tous les esprits, on ne trouve plus de bras pour emporter les cadavres, les rues étroites ne permettant pas d'autres moyens de transport. On manqua même de fossoyeurs.

                  Ainsi, au plus fort de l'épidémie, les cadavres séjournent dans les habitations, et l'observation du sabbat se joint aux difficultés déjà existantes pour augmenter cette accumulation.
                  - Le 16, la mortalité parmi les juifs était plus forte que dans les autres parties de la population ; et, comme il est difficile de leur faire entendre qu'on ne doit pas se tenir groupés dans des logements étroits, privés d'air et de lumière, M. le Maréchal Gouverneur prend le parti de les faire camper au Bouzaréah, mont situé à l'ouest de la ville, ce qui fut exécuté le lendemain même.

                  Un autre embarras naquit du manque d'infirmiers. Ceux des hôpitaux étant malades, on ne trouva personne pour les remplacer et l'Administration, embarrassée pour les sépultures, eut encore à pourvoir au service des malades. Pour cela, on eut recours aux compagnies de discipline.
                  - Le 17, il n'y avait aucune apparence de diminution du fléau et l'on pressa les juifs de se rendre au camp.
                  - Le 18, la mortalité est encore plus forte que les autres jours. On assure que ce jour-là les juifs eurent plus de cent morts. De toutes parts aussi on est informé que le choléra fait les plus grands ravages. A Blidah, ville de quatre mille âmes, la mortalité est effrayante.
                  - Le 19, la désolation était dans tous les esprits ; les boutiques fermées annonçaient que l'on ne s'occupait plus des intérêts matériels.

                  Il fallut céder aux conseils, aux exigences de la masse, et, sans croire à l'efficacité des moyens, on chercha à repousser au loin dans l'atmosphère l'élément cholérigène que l'on supposait disséminé dans l'air et planant sur toutes les têtes.
                  Pour cela, on fit tirer le canon à plusieurs reprises et on alluma de grands feux de bois résineux sur les places publiques, dans les rues et sur les terrasses.
                  - Cependant le 20, les cas nouveaux furent moins nombreux et moins intenses ; la mortalité frappait sur les malades déjà en traitement.
                  - Le 21, quelques cas de choléra se sont montrés au campement des juifs qui y sont au nombre de cinq cents environ sous la tente.
                  Si je suis bien informé, on n'y a compté que quinze malades, dont quatre sont morts depuis l'établissement jusqu'à la fin de l'épidémie.
                  La chaleur est excessive, le vent du désert règne.
                  A Mustapha-Pacha où est le camp militaire la maladie s'est déclarée depuis trois jours.
                  - Enfin, à partir du 22, le choléra d'Alger a été décroissant tous les jours, quoique la mortalité ait été assez grande encore ; mais chaque jour était un pas de plus vers le terme de la maladie, idée bien consolante que l'on caresse avec autant de délices que si l'on se promettait une grande fortune.

                  La seconde période a été un peu plus longue que la première. Celle-ci, que j'appelle de croissance, a commencé le 2 août et fini le 23. La seconde, ou celle de décroissance, a commencé le 24 août et fini le 20 septembre.
                  Je compte donc vingt jours pour la première et vingt-huit pour la seconde, ce qui a été observé dans toutes les épidémies qui ont frappé des villes assez considérables.
                  Il n'y avait plus de choléra à Alger lorsque j'y arrivai le 7 octobre. Mais, dès les premiers jours de novembre, il y eut une petite recrudescence. Elle atteignit quelques personnes dans la population mais elle se fit mieux sentir dans les hôpitaux militaires, et particulièrement parmi des malades nouvellement venus de Bougie par évacuation.
                  Ces hommes, affaiblis d'ailleurs par des maladies antérieures, étaient dans les mêmes circonstances que les habitants de Toulon qui rentrèrent au déclin de l'épidémie.
                  Ils n'avaient pas subi l'épreuve de la maladie et, se trouvant placés sous un ciel cholérique, ils payèrent tribut comme ils l'auraient fait s'ils s'étaient trouvés à Alger pendant le choléra.

                  Il résulte des états tenus par l'Administration civile que, pour la première période, il eut dans toute la population 895 cas de choléra, dont 542 furent mortels ; et, dans la seconde, 672 atteintes, dont 506 suivies de mort.
                  Total des décès, 1048. A ce chiffre il faut ajouter 172 civils morts à l'hôpital militaire, ce qui fait un total de 1.220
                  Ce nombre de décès calculés d'après la population qui était de 24.000 âmes on trouve que celle-ci a perdu le dix-neuvième. D'après les états déposés à l'intendance militaire, l'effectif de l'armée dans Alger et dans les camps était, au premier août, de 11.804 hommes.
                  En outre le mouvement général des hôpitaux fait connaître qu'il y a eu 1.201 cholériques dont 639 sont morts, ce qui donne la proportion d'un dix-huitième.
                  Je pense que les mouvements d'après lesquels les calculs qui précèdent ont été faits, tant pour la population que pour l'armée, ne sont pas d'une exactitude très grande. Mais voilà tout ce que j'ai pu trouver qui s'approchait le plus de la vérité.
                  Parmi les victimes de ce choléra, on compte principalement :
                  - M. le colonel Ricard, commandant la place d'Alger et
                  - M. Perroud, sous-intendant militaire.
                  Mais les officiers de santé ont perdu beaucoup. Parmi eux, on distingue :
                  - M. Juving, pharmacien principal de l'armée et
                  - M. Marie pharmacien major. Mrs :
                  - Leroi, Debourges, Cresté, Gérardin, Semidei, Susini Vialet, chirurgiens ;
                  - Elkerbout, Brossut, Hubert, pharmaciens ont aussi payé le fatal tribut, et plus de douze médecins, chirurgiens ou pharmaciens de tous grades, ont été portés au tombeau.

                  Moins malheureux, un plus grand nombre d'officiers de santé ont redoublé de courage pour remplacer au champ d'honneur ceux de leurs collègues qui y étaient restés morts ou blessés
                  A leur tête se montraient MM. Stéphanopoli et Guyon, officiers principaux de l'armée. Hélas ! A quoi leur a servi tant de dévouement et de zèle ?
                  Les récompenses ont été si rares qu'elles ont été comme inaperçues, tandis qu'on a été jusqu'à flétrir du reproche de lâcheté quelques-uns de ces honorables confrères dont le courage et les talents éprouvés dans mille autres circonstances ne se sont pas démentis un instant dans celle-ci.

L'Algérie française
Arsène Berteuil, ancien pharmacien en chef des hôpitaux militaires
de l'armée d'Afrique tome II . Édition 1856


Impressions d'un enseignant
en voyage en Algérie.
Envoyé par M. Christian Graille

               Le panorama de Marseille, du Cap Couronne au Cap Croisette, quand on se trouve par le travers du Planier, est peut-être plus grandiose, plus grec aussi d'allure certainement que le panorama d'Alger au premier contact.
               Mais la grande rade africaine, pour qui regarde, première fois dans sa vie, la courbe qui s'incline de Notre Dame d'Afrique, à Matifou, vaut sa mondiale renommée. Alger la blanche, autour du bloc de craie de la Kasbah, étale dans le vert méditerranéen des jardins, des pins maritimes et des palmiers, les nouvelles villes non moins blanches :
               - de Saint Eugène,
               - de Mustapha,
               - d'Hussein Dey,
               - du Fort de L'Eau, aux limites mêmes de l'horizon.

               Pour l'Européen non averti c'est très beau, vraiment puissant, mais assez normal. Pour le même, après 15 jours d'Algérie, c'est bien plus joli.
               Saluant cette rade à son départ, il comprend mieux quelle synthèse de l'effort, quelle synthèse de génie français…
               La grande Alger est l'image, à l'entrée de l'Afrique du Nord, où jamais conquérant n'a mieux inscrit sa volonté calme et forte.

               Et voici le programme du professeur en voyage d'études :
               " Je voulais, en géographie physique, et en même temps humaine, si possible économique, me donner une idée des parties constitutives principales de l'Afrique du Nord puis voir d'un peu plus près le résumé de son activité commerciale par la vie de ses ports, enfin, par ses grandes villes du passé et surtout par ses grandes villes du présent, sentir la condensation de l'effort. En géographie physique des merveilles. En montagnes surtout, soit que j'aie franchi le Djurjura d'Ouest en Est, soit que j'aie escaladé l'Atlas tel lien du Sud au Nord, j'ai partout été frappé par les exemples multipliés à l'infini de cas morphologiques parfaits pour l'œil.
               Dans ce pays à végétation restreinte, l'érosion fluviale a donné au relief un modelé d'une précision dans les formes qui tient du miracle.
               En Savoie peut-être et en moins grand nombre certainement, j'ai vu en peu de kilomètres autant de :
               - cas de torrents,
               - de déjections,
               - phénomènes de rampement, en cas de capture,
               - méandres à évolutions variées,
               - traces précises de cycles successifs d'érosion dans le même talweg etc…etc…

               Où est l'éditeur de photographies qui glanera ces richesses pour nos élèves ?…
               Dans les Hauts Plateaux, paysage tout autre. Le terrain, qui dès le lever du soleil prend la teinte dite couleur " peau de lion " semble partout avide d'eau. De Bou Saâda à Tablât par exemple, les Hauts Plateaux nous offrent plus de 150 kilomètres de large et paraissent plutôt une série de bassins fermés dont celui du Hodna est le type.
               Néanmoins l'ensemble est remarquablement tabulaire et la sécheresse progressive est marquée vers le Sud avec une netteté rigoureuse.
               On longe bien l'extrémité orientale de " la mer d'alfa " et les terrains à pâture des chameaux à l'élevage.
               Entre la route et les méandres d'un oued à sec, on a bien quelques dépôts d'alfa, mais si l'on met pied à terre le sol brûle les semelles. L'alfa lui-même paraît rôti, ses touffes poussent en association ouverte et on se demande quel plaisir tel chameau qui vous promenait hier pouvait trouver en enveloppant les feuilles sèches et âpres d'un coup de langue et de mâchoire, rappelant un coup de faux ".

               L'observation indigène fournit à M. Foiret cette jolie notation d'une scène campagnarde :
               " Ceux qui paraissent travailler dans ce groupe, ce sont les enfants.
               A la tête des caravanes d'ânes bas sur pattes, mais jolis de ligne, l'air à la fois mutin et bonne bête, ils transportent en des couffins-bâts :
               - de la terre,
               - des légumes,
               - du bois, des poteries.
               - On tire l'animal : par la queue
               - par les oreilles,
               - à coups de trique,
               - sur le cou.

               On le précipite dans le fossé de la route à la moindre auto. On l'y pousse à pleines mains sur la croupe, il obéit, il a l'habitude.
               Parfois, un peu nerveux, il se couche sur le flan, sans souci de sa charge ; c'est alors un drame. Bras en l'air, on l'adjure à grands cris, puis on le remet sur ses pattes et on repart en gesticulant. "

               Sur La reconquête de la terre par l'indigène nous trouvons l'intéressante notation suivante :
               " Entre Alger et Bougie déjà 70 % des terres sont aux mains des indigènes qui la reconquièrent ainsi avec l'âpreté du Normand.
               On m'a dit sur place, à Tankra que dans les trente ans toute la Kabylie serait aux Kabyles et que leur cher désir est d'y être seuls comme toujours depuis 3.000 ans ".
               Considéré à Bou Saâda comme une sorte de Marabout notre voyageur a été comblé d'attentions :
               " Le soir on m'a adjuré d'accepter le couscous et devant ma réelle émotion, à la séparation, c'est de toute sincérité je crois qu'on m'a dit : " nous avons grand honneur à être Français ! Nous vous avons montré ici toute notre vie intime, depuis nos jardins de palmeraie, jusqu' à notre intérieur ou vous avez été admis, en passant par nos mosquées. Nous ne saurions mieux faire.
               Mais nous sommes, ceux qui veillons sur votre compatriote le peintre Dinet, dont voici la maison, dont voici la tombe musulmane, dont dites-vous, votre mère a connu la famille. Pour nous, vous êtes la même image. Vous promettez de revenir ici parce que vous êtes ému… Et bien Inch Allah ! Qu'Allah le veuille.
               J'étais en veston, eux en burnous, ils venaient de me faire entendre, place du marché, le conteur arabe, récitant à 300 auditeurs de pierre un des interminables épisodes des Mille et une Nuits.
               Au ciel d'un bleu cru, les astres avaient des reflets électriques. Je respirais, au pied de l'Aurès, l'air du Sahara et en nous serrant la main nous étions franchement d'une même patrie ".

               Monsieur Foiret termine ainsi son expos :
               " Puisse le hasard et les volontés supérieures songer un instant que 200 professeurs visitant une colonie, c'est 200 Ambassadeurs pro-français qu'on institue ipso-facto et 20.000 élèves dressés à flairer l'héroïsme de leur race au-delà de tous les océans.
               Le centenaire a été une occasion, il faudrait en faire un procédé : éduquer les éducateurs, les aider à voir, à faire voir, c'est une moisson que le pays verrait mûrir dans 20 ans et qui serait peut-être un des meilleurs liens de l'Empire français ".
Les cahiers du centenaire de l'Algérie


L'hôpital civil de Bougie
Envoyé par M. Christian Graille

                 Nous appelions au début de notre précédent article sur le sujet si intéressant de l'hôpital civil, l'attention de nos lecteurs sur la différence qu'il y avait entre le premier et celui dit militaire.
                 Dans l'un exiguïté, manque d'air, manque de place et défaut absolu de tous les éléments du confort et des lois de l'hygiène. Dans le second, au contraire, tout ou à peu près y a été prévu, situation admirable sur un des éperons détachés du massif du Gouraya, isolement de toutes agglomérations d'immeubles ou d'habitant :
                 - De grandes et vastes cours complantées de jardins,
                 - point de vue admirable sur le golfe ou sur les environs de Bougie,
                 - bâtiments vastes et spacieux, largement aérés et éclairés,
                 - Salles hautes, où l'air circule à son aise, où l'espace est largement donné aux malades pour y vivre en repos et à leur aise.

                 En un mot il y a entre l'un et l'autre de ces établissements la différence qu'il y a entre la mansarde sombre, humide du pauvre et le palais du riche, du favorisé des biens, de l'homme aisé.
                 - Et pourquoi cette différence entre ces deux asiles de la douleur ?
                 - Les hommes qui sont appelés à y recevoir des soins ne se valent-ils donc pas ?
                 - Ne sont-ils pas tous deux de nature identique ?
                 - L'un n'est-il pas l'ouvrier du travail producteur et l'autre l'ouvrier de la guerre?
                 - Et fera-t-on une différence entre ces deux hommes parce que l'un est appelé à produire et l'autre à détruire pour conserver ?
                 - Qui essaierait de discuter ces thèses qui n'ont assurément rien à voir dans notre sujet ?

                 Et bien cette différence existe, parce que, depuis des années, pour l'hôpital civil, on n'a procédé que par des tâtonnements, par des projets sans cesse à l'état d'espérance, jamais réalisés et toujours renouvelés.
                 Dans l'autre on a procédé par un projet arrêté d'un seul plan mis séance tenante à exécution et sans attendre des moyens d'action toujours promis. En un mot dans le premier on y a accumulé des espérances et des correspondances échangées jusqu'à l'infini ; dans l'autre, le second, on a mît en œuvre des résultats décisifs et irrévocables et surtout des fonds versés effectivement, on avait un but tracé d'avance et on y a couru droit dessus.

                 Si de l'ensemble nous passons aux détails des services intérieurs, la divergence y est encore plus sensible. Toujours faute de crédits, rien n'est mis à la disposition des chefs de service de l'hôpital civil pour les aider à remplir leur œuvre, c'est à peine si une opération si simple soit-elle pourrait y être faite sans le concours des appareils personnels ou des instruments de chirurgie appartenant au médecin traitant.
                 A peine une salle de bain pour satisfaire au traitement ou aux soins hygiéniques et de propreté des malades y existe-t-elle. Et tout le reste est à l'avenant.
                 Et que l'on ne dise pas que nous chargeons le tableau à plaisir pour les besoins de la thèse que nous soutenons, le cliché est malheureusement bien au-dessous de la vérité.

                 Mais n'y aurait-il pas à invoquer que la question de salubrité et de sécurité pour la population de Bougie qui en cas d'épidémie est certainement menacée d'une intoxication en règle par le séjour des malades au milieu d'elle, que cette question mérite toute la sollicitude de la haute Administration Centrale qui par ses lésineries et ses tâtonnements interminables est l'auteur de tout le mal.
                 Une solution heureuse à notre humble avis se présente pour remédier à cette situation déplorable qui ne devrait plus exister depuis des années.
                 Cette solution est déjà mise en pratique par la force des choses qui a obligé, faute d'espace, l'Administration civile à envoyer en traitement ses malades à l'hôpital militaire qui les a accueilli largement.

                 C'est la substitution de l'hôpital civil par l'hôpital militaire.
                 Cette solution qui expliquera à nos lecteurs pourquoi à propos d'hôpital civil nous les avons entretenus aussi longuement de l'hôpital militaire fera l'objet de notre prochain article où nous nous proposons de l'examiner.

                 Nous disions qu'une solution à notre humble avis fort heureuse se présentait, qui ne pouvait mettre un terme à la situation déplorable qui était faite à nos malades par l'installation à tous points vicieuse de notre hôpital civil par la substitution déjà en partie adoptée de l'hôpital civil à notre hôpital militaire.
                 Et lorsque nous proposons ou plutôt nous envisageons cette substitution, ce n'est pas de celle des personnalités, qui ont peu de choses à voir à cette modification mais bien à la substitution des locaux de l'un à l'autre dont nous voulons parler.

                 Cette substitution est toute naturelle, toute logique.
                 En effet si l'on y réfléchit un instant en examinant les conséquences de la conquête, on remarque que les hôpitaux militaires ont presque cessé d'avoir leur raison d'être sur tout le littoral africain où la sécurité est devenue absolue par le fait des grandes agglomérations apportées par la colonisation.
                 Le rôle des troupes y a de moins en moins sa raison d'être et tend de plus en plus à se concentrer dans l'extrême sud où la conquête est moins assise et où il reste encore beaucoup à faire pour assurer la tranquillité parfaite entre les tribus plus ou moins disposées à s'entendre entre elles.
                 Conséquemment c'est surtout dans le Sud que le service sanitaire militaire doit, dès aujourd'hui, concentrer son action pour être toujours à portée d'être utile à nos troupes qui, par le défaut de colonisation, peuvent moins facilement trouver les moyens de donner à nos soldats les soins qu'exigent les services qu'ils nous rendent.

                 Les hôpitaux militaires, par le personnel qu'ils demandent pour fonctionner régulièrement, coûtent fort cher, leur roulement d'administration étant toujours le même, si minimum soit le nombre des malades qui y sont admis.
                 Or qui contesterait que ce personnel, à frais égaux ne rendrait de bien plus grands services à la suite de nos garnisons ou colonnes de frontières extrême sud que sur le littoral ?
                 Pourquoi en conséquence n'arriverait-on pas à tout arranger au mieux des intérêts et du budget de la guerre si obéré et des malades militaires restant sur le littoral, en opérant de la façon suivante qui concilierait tous les intérêts civils ou militaires ?

                 En ce qui concerne Bougie notamment, puisque c'est avant tout de lui qu'il est question, pourquoi la Municipalité ou le Département, et même tous les deux, ne s'accorderaient-ils pas avec le commandement du 19ème corps d'armée que nous croyons tout disposé à entrer en arrangement à ce sujet avec Bougie, puisqu'il l'a déjà accepté pour Philippeville, pour lui racheter ou lui louer son hôpital militaire, immeuble et matériel, à des clauses et conventions débattues, avec stipulation formelle bien entendu par l'administration hospitalière de Bougie de donner aux malades militaires qui y seront présentés les soins dont ils auront besoin et à un prix convenu d'avance comme prise en charge de la situation.

                 Cette situation fort simple qui ne paraît pas devoir subir à priori de grosses difficultés, aurait pour premier effet, nous en sommes convaincus, de diminuer considérablement le prix de la journée du malade en diminuant pour le département les charges d'une première installation trouvée toute créée.
                 Le personnel médical serait moins nombreux et, nous ne craignons pas de le dire, à la hauteur de sa tâche, le personnel administratif, considérablement diminué, conséquemment les frais généraux moins élevés et l'on pourrait ainsi espérer arriver au résultat obtenu ailleurs, ramener la journée de traitement du chiffre ridicule de 12 et même 14 qu'elle a atteint à celui de 1 frs.45 obtenu beaucoup plus normalement, et ce, sans que nos malades aient à souffrir, bien au contraire, de cette situation.

                 L'idée d'ensemble en est jetée, elle a eu ses effets ailleurs ; à nos municipalités, à nos Conseils Généraux de la reprendre, de la remanier pour l'appliquer à notre situation locale ; pour nous, nous serons heureux d'avoir été un de ses propagateurs, et encore plus heureux pour nos concitoyens si elle aboutissait.
L'Oued-Sahel (03-06-1887)


Impressions de voyage :
Sidi Bel Abbès (1873)
Envoyé par M. Christian Graille

         Si le temps est beau on peut revenir de Tlemcen à Oran en deux jours par la route de Sidi Bel Abbès, un peu plus longue et beaucoup plus à l'est que celle d'Aïn Témouchent. La seconde partie de la route entre Sidi-Bel-Abbès et Oran n'offre aucune difficulté.
         Il n'en est pas de même pour la première partie ; elle est ouverte mais non encore achevée au mois d'avril :
         - Les pluies de mars avaient détrempé le sol,
         - des ornières profondes s'étaient formées,
         - les surfaces sèches étaient horriblement raboteuses,
         - des flaques d'eau très étendues couvraient parfois la chaussée.

        Au sortir de Tlemcen on monte sur les flancs du djebel Nador dont le sommet est à 1.520 mètres au-dessus du niveau de la mer ; on laisse à gauche et en bas Bou Médine et après avoir parcouru une distance de six kilomètres depuis la ville on arrive à la cascade de Safsaf.
         Cette cascade serait admirée, même en Suisse.
         J'ai compté sept chutes distinctes et successives ; on ne les découvre pas toutes ensemble ; suivant le point de vue, tantôt l'une, tantôt l'autre disparaît derrière les rochers et les arbres au milieu desquels la rivière tournoie.

        Rafraîchis par les embruns des chutes et les infiltrations souterraines,
         - les oliviers,
         - les figuiers,
         - les grenadiers,
         - les cerisiers,
         - les lentisques prennent un développement prodigieux.
         - Ils s'étalent en massifs profonds
         - s'entassent dans tous les coins et recoins, pendent sur les eaux et
         - semblent par la hardiesse de leur attitude braver les lois de l'équilibre.

        Les rochers ne sont pas moins remarquables que les arbres :
         - par leur couleur,
         - par leur forme,
         - par leurs perforations bizarres et les grottes qui en résultent
         - par leur structure lamellée assez semblable à celles de certains os et enfin
         - par les empreintes nombreuses de feuilles fossiles qui s'y trouvent, ils excitent au plus haut point la curiosité.

        On passe le Safsaf sur un pont ; à l'extrémité du pont une seconde montagne s'élève, c'est le djebel Rouméliah, on le contourne assez longtemps.
         Les sinuosités de la route nous préparent une surprise agréable :
         Tlemcen, qu'on ne croyait plus revoir, reparaît une dernière fois.
         Mollement assise sur sa colline, baignée de lumière, le front couronné de rocs, les flancs entourés d'une ceinture verdoyante montrant à la suite de ses minarets et de ses dômes les ruines imposantes de Mansourah, elle est vraiment belle.
         On comprend que l'Emir Abdel Kader lui ait consacré l'un de ses chants :
         " Je l'aime, dit-il, comme l'enfant aime le cœur de sa mère ".

        Quand on a cessé de voir Tlemcen on se trouve dans une solitude presque complète ; on traverse une région tout à fait sauvage :
         - pas de villages,
         - pas de cultures,
         - quelques troupeaux de temps en temps, surtout des troupeaux de chèvres,
         - quelques tentes enfumées de loin en loin,
         - quelques Arabes à cheval,
         - un officier de spahis suivi de deux cavaliers en burnous rouge,
         - de longs sillons tracés sur la chaussée par des raies de charrettes, telles sont les seules marques de civilisation qui s'offrent à nous pendant plusieurs heures ; et cependant cette région fournit deux choses d'un grand prix : le bois de thuya et l'alfa ;
         On fabrique avec ce dernier :
         - des corbeilles,
         - des cordes,
         - des sandales,
         - des chapeaux et
         - du papier.

        Du djebel Rouméliah on descend dans la vallée de l'Isser et l'on traverse le territoire de la tribu des Ouled-Mimoun.
         Un petit hameau de deux cents habitants nommé Lamoricière se rencontre là d'une manière fort opportune pour les voyageurs ; de braves gens qui ne sont ni arrogants ni serviles vous donnent un déjeuner très passable sans vous exploiter.
         Le hameau est entouré d'une enceinte défensive en terre. A deux pas de l'enceinte la rivière coule dans un lit profondément encaissé.
         Après avoir quitté la vallée de l'Isser on s'engage dans une région montagneuse qui ne diffère pas beaucoup pour la végétation et la nature du sol du djebel Rouméliah.
         Puis on tombe dans la vallée de l'oued Mekerra qui, suivant la coutume arabe, prend divers noms le long de son cours et s'appelle plus bas le Sig ; le terrain devient plus humide :
         - bientôt les champs de céréales succèdent aux bois, aux prairies, aux landes
         - les fermes européennes remplacent les tentes arabes,
         - la route s'améliore,
         - le village de Sidi Lahsen se présente,
         - il ne reste plus que douze kilomètres pour gagner Sidi Bel Abbès; on les franchit rapidement.

        Sidi Bel Abbès était, il y a trente ans, un lieu de pèlerinage ; les Arabes y venaient faire leurs dévotions auprès d'un tombeau de marabout reposant sous une petite Kouba ; en 1843 les Français y établirent un poste militaire ; le poste attira : - des cantiniers, - des marchands, - des artisans. Peu à peu un groupe d'Européens assez considérable s'y forma.
         Un décret du 5 janvier 1849 reconnut officiellement la nouvelle ville qui fut érigée en commune sept ans plus tard.
         En 1860, la population totale, y compris la banlieue, était d'environ 5.000 âmes ; aujourd'hui elle est de 7.876 dont 6.537 Français et étrangers, 1.339 Musulmans.
         Un mur crénelé entoure la ville ; les maisons très simples et très propres n'ont qu'un rez-de-chaussée ou un seul étage.
         De beaux mûriers ombragent les principales rues et places ; l'administration municipale est habilement dirigée ; elle s'occupe particulièrement des écoles qui sont laïques pour les garçons ; mais l'influence du clergé lui crée souvent des embarras. J'ai constaté le même fait à Tlemcen et dans d'autres communes de la province d'Oran.

        La contrée sans être pittoresque est d'un aspect agréable.
         Les chasseurs la recherchent singulièrement ; les cailles y passent en grand nombre à certaines époques de l'année ; en toutes saisons les gazelles y abondent. Dans les ruisseaux on trouve des tortues ; la terre est bonne, convenable pour les céréales partout où elle est défrichée, c'est-à-dire débarrassée des palmiers nains.
         L'hectare non défriché vaut trente à cinquante francs, défriché, il décuple de valeur. Les cultures n'occupent encore qu'un espace restreint ; quand elles se montrent, on les remarque. L'élevage des porcs est très productif et commence à se faire à une vaste échelle; la proximité du chemin de fer assure un débouché facile.
         On espère qu'un embranchement reliera un jour Sidi Bel Abbès au Tlelat.

        Quoi qu'il en soit de ce projet les chances de prospérité sont grandes. Sidi Bel Abbès est appelé à devenir un centre de premier ordre pour notre colonisation.

L'Algérie :
Impressions de voyage (17 mars-4 juin 1873)
par Jean-Jules Clamageran, docteur en droit, ancien adjoint à la
mairie de Paris, membre de la Société d'Économie Politique.
Edition 1874



Impressions de voyage : Tlemcen (1878)
Envoyé par M. Christian Graille

                  Nombreux ont été ceux qui, durant tout le dix-neuvième siècle, parcoururent l'Algérie :
                 - à la recherche de sensations nouvelles,
                 - de paysages mythiques,
                 - d'exotisme,
                 - d'aventures et
                 - de découvertes diverses.

                 Ils ont, fort heureusement, laissé à la postérité les récits de leurs voyages.
                 Ces chroniques nous permettent, aujourd'hui, de nous replonger dans ces lieux magiques de vie qui, jadis, furent les nôtres où une nature généreuse et bienveillante nous distilla des parfums de fleurs et d'arbres si particuliers, si délicats, dans des contrées où la joie de vivre fut, à une certaine époque, notre quotidien.
                 - Nous allons donc entraîner nos lecteurs dans le passé (surtout celui de leurs ancêtres) dans une longue promenade à travers l'Algérie d'Ouest en est,
                 - nous franchirons, sans encombre, sa frontière avec la Tunisie et terminerons notre voyage à Tunis et Carthage,
                 - nous évoquerons aussi l'arrivée, l'installation et la vie de ces pionniers qui, à partir de 1848, furent nombreux à quitter la pauvreté et, pour certains, la misère pour aller à la découverte, croyaient-ils, d'un pays de cocagne,
                 - Nous évoquerons, grâce aux documents d'archives personnelles de nos adhérents, la lutte, parfois inégale, menée contre l'adversité par leurs aïeux animés d'une soif de réussite mais nourrie, parfois, de folles espérances,
                 - Nous irons à la rencontre de ces personnages de légende tels Youssouf, Léon Roche, le sergent Blandan ou encore Si Ahmed Ould Cadi,
                 - nous laisserons donc, nos lecteurs rêver, en toute quiétude, dans le seul et secret espoir de leur apporter, non pas ce souffle de nostalgie bien trop présent dans leur cœur, mais une brise bienfaitrice faite de souvenirs, de plaisirs, de bonheurs partagés, de paix et de sérénité.

Premières étapes de notre périple, l'Oranie de 1873

                 Tlemcen est situé au Sud-Ouest d'Oran à une distance de cent trente kilomètres ; la route qui y mène est large et bien entretenue ; des diligences la desservent de nuit ; si l'on veut voyager de jour il faut prendre des voitures particulières qui coûtent cent francs y compris le retour.
                 Après avoir dépassé Misserghin on longe la Sebkra ou lac salé qui couvre une superficie de trente-deux mille hectares; on y rencontre les colonies agricoles de Boutlélis et de Lourmel fondées en 1840 et 1856 ; on passe le Rio Salado, l'oued Malah des Arabes ainsi nommé à cause de ses eaux saumâtres puis on arrive à Aïn Témouchent petite ville créée en 1851 qui est en voie d'accroissement car elle n'avait en 1860 que 900 habitants et aujourd'hui 1470 dont 665 étrangers, 662 Français et 143 indigènes ; près des villages quelques cultures se montrent mais en général le pays paraît désert et inculte. Les palmiers nains foisonnent ; de temps en temps on croise de lourdes voitures chargées d'alfa ; pour la première fois depuis Alger nous apercevons des chameaux.
                 A partir d'Aïn Témouchent on pénètre un massif montagneux ; on franchit un col qui est à 700 mètres au-dessus du niveau de la mer ; l'air devient froid, le pays prend de plus en plus un aspect sauvage. On s'arrête aux carrières de marbre onyx d'Aïn Tekbalet abandonnées.
                 Peu de temps après avoir quitté ces lieux on atteint le pont de l'Isser ; sur la rive gauche se trouve un hameau européen qui date de 1858.
                 Sur la rive droite un marché arabe se tient tous les mercredis ; on y débite toutes sortes de marchandises :
                 - des légumes,
                 - des fruits,
                 - de la viande,
                 - des étoffes ;
                 - on prépare en plein air :
                 - le couscous et
                 - le café.

                 Quelques femmes indigènes vont et viennent portant des provisions ; les hommes très nombreux accroupis pour la plupart devisent de leurs affaires.
                 Aux approches de Tlemcen on découvre peu à peu de grands bois d'oliviers :
                 - la ville émerge au sein de ces bois,
                 - les minarets des mosquées la signalent au loin,
                 - une muraille de rocs chaudement colorés se dresse derrière elle,
                 - du côté de l'Est, elle semble inaccessible,
                 - du côté opposé une rampe assez douce permet d'y monter.

                 On passe au village de Négrier, on traverse la petite rivière du Safsaf et enfin on pénètre dans les bois qui entourent la ville et qui servent de promenade à ses habitants. Ici :
                 - les figuiers,
                 - les amandiers,
                 - les grenadiers se pressent aux côtés
                 - des oliviers.

                 Un climat tempéré, des eaux abondantes, une campagne fertile aux environs, une situation favorable aux échanges avec le Maroc et le Sahara, un large débouché ouvert au Nord par la route d'Oran, voilà bien des conditions de prospérité.
                 Les Européens commencent à le comprendre. Ils fondent des maisons, ils établissent des minoteries et perfectionnent la fabrication des huiles qui, bien traitées, rivalisent avec celles de Provence.
                 Sur une population totale de 14.554 habitants, le recensement officiel de 1872 constate :
                 - 8.346 Musulmans,
                 - 1.580 étrangers et
                 - 4.628 Français parmi lesquels se trouvent confondus les Juifs indigènes.

                 La plus grande partie de la ville garde encore le caractère arabe ; on a élargi certaines rues, régularisé ou créé quelques grandes places, mais au moindre détour on retombe sur un dédale inextricable de ruelles étroites et tortueuses, souvent voûtées, bordées de maisons basses et discrètes.
                 Presque tous les artisans sont indigènes ; ils exercent leur métier sous les yeux du public dans les logettes au rez-de-chaussée, éclairées par la seule ouverture qui sert à la fois de porte et de fenêtre.
                 Ceux qui travaillent le cuir sont de véritables artistes ; la grâce et le prestige de l'Orient se retrouvent dans les harnais et les selles de maroquin rouge qu'ils confectionnent.

                 Tous les monuments dignes d'intérêt sont arabes. L'ancien palais des Raïs musulmans et les principales mosquées attestent de la splendeur de Tlemcen au XIIIe et XIVe siècles.
                 Elle était alors capitale d'un État indépendant; sa population dépassait les 100.000 âmes ; elle regorgeait de richesses.
                 Là, comme en Espagne, sans atteindre le même éclat, la civilisation née de l'Islam s'épanouissait d'une manière brillante mais elle devait périr rapidement, l'idée de liberté et l'idée de progrès qui sont les forces rénovatrices des sociétés humaines lui faisant défaut.

                 A trois kilomètres au sud de Tlemcen se trouvent les ruines du camp de Mansourah, ruines grandioses qui montrent d'une manière saisissante quelles ressources possédaient les princes musulmans au moyen âge.
                 En 1302 Abou-Yacoub assiégeait Tlemcen depuis trois ans.
                 Désespérant d'un succès rapide il convertit son camp en ville. Le siège dura encore cinq ans; puis vint la paix, puis un nouveau siège.
                 Les sultans de Tlemcen reprirent Mansourah, la dévastèrent et les magnifiques constructions qu'on y avait élevées, à demi détruites, ne furent jamais réparées.
                 - Les maisons,
                 - les palais,
                 - les bains,
                 - les marchés,
                 - les hôpitaux ont disparu entièrement ; mais l'enceinte haute de douze mètres, protégeant un espace de cent hectares, et la mosquée présentent encore d'énormes pans de murs d'une teinte rougeâtre qui restent debout.

                 Après Mansourah la grande curiosité des environs, à une demi-heure de marche, c'est le village d'El Eubbad, plus connu sous le nom de Bou Médine.
                 Sur le chemin on rencontre le cimetière européen caché au milieu de la verdure et le cimetière arabe dont les tombes nombreuses et en désordre éparpillées sur un vaste espace s'étalent sans abri sous les rayons du soleil. Groupées autour des tombes des femmes indigènes vêtues et voilées de blanc causent.
                 Un sentier assez rude conduit au village.
                 Bientôt on arrive au pied des trois édifices qui ont rendu célèbre le village d'El Eubbad :
                 - la kouba,
                 - la mosquée,
                 - la medersa.
                 Toutes trois ont été élevées du douzième au quatorzième siècle en l'honneur du marabout Sidi Bou Médine, savant théologien né à Séville en 1126, mort sur la route de Tlemcen au bord de l'Isser en 1198.
                 La medersa était un grand collège, une sorte de Sorbonne musulmane ; elle est en ruine; quant à la mosquée elle est heureusement assez bien conservée.

                 Le 30 janvier 1842 notre armée occupe Tlemcen d'une façon définitive.
                 Des écuries sont nécessaires pour les quartiers de cavalerie ; on les construit à la Française, soigneusement closes ; les chevaux arabes qui aiment le grand air tombent malades ; on s'aperçoit un peu tard que le modèle de nos écuries ne vaut rien en Afrique ; il faut absolument faire les frais d'une seconde installation ; cette fois le but est atteint ; " les buveurs d'air" respirent à pleins poumons et cessent de languir ; on peut les voir du dehors couchés sur leur litière, prêts à partir au moindre signal.

                 L'inexpérience explique et excuse dans une certaine mesure bien des fautes, mais notre système administratif est une cause permanente de complications, de retard, d'embarras de toutes sortes.
                 Des travaux urgents sont suspendus parce que la municipalité attend l'approbation de l'autorité supérieure. On supprime une sous-préfecture ; personne ne se plaint de cette fermeture, au contraire mais on s'étonne que l'hôtel des fonctionnaires devenu inutile ne donne aucun revenu ; il serait loué sans doute si les bureaux n'imposaient pas aux locataires des conditions trop onéreuses.
                 Quel que soit le zèle du Préfet, des chefs militaires et des conseils électifs, la machine administrative fonctionne lourdement ; ses rouages auraient besoin d'être simplifiés …
L'Algérie : Impressions de voyage (17 mars-4juin 1873) par Jean-Jules Clamageran, docteur en droit, ancien adjoint à la mairie de Paris, membre de la société d'économie politique. Édition 1874



Des jeunes aux vieux...
Envoyé par Eliane

           La vérité sort de la bouche des enfants…

           Dans une classe de CM2, l'instituteur donne un cours sur la faune africaine.
           Il dit :
           - Le lion est le roi des animaux. Il ne craint qu'un seul animal. Lequel ?
           Un petit garçon lève le doigt et répond :
           - La lionne.



           Deux grand-mères Alsaciennes discutent...
           - Ma petite fille se marie la semaine prochaine !
           - Ah, vraiment ? Félicitations ! Et le mari vient d'où ?
           - De Faïsbouck, mais ne me demande pas où c'est !



Voulez-vous le choléra ?.
Envoyé par M. Christian Graille

               Je ne pose pas cette question au maire.
               A la seule pensée du choléra, à l'idée d'abandonner ses millions, produit de l'usure et du grappillage, le malheureux serait repris de la jaunisse.
               Mais je m'adresse :
               - à la population de Mascara,
               - aux propriétaires,
               - aux travailleurs,
               - à tous ceux qui n'ont point de millions à conserver, mais ce qui n'est pas moins précieux, une épouse, des enfants.

               On voit d'ici leur réponse effarée.
               Et cependant que font-ils tous ces braves gens pour combattre le fléau ? Rien. Quelles mesures d'hygiène prennent-ils ? Aucune. Et c'est ce qui m'exaspère.
               Depuis dimanche j'aurai reçu peut-être trente communications du même genre : " Monsieur le rédacteur, vous avez bien raison de signaler la malpropreté de la ville ; ainsi rue de Catinat les eaux croupissent et nous sommes véritablement empestés."
               Un autre : " Monsieur le rédacteur, les Arabes et les Marocains qui établissent leurs tentes à la sortie de la porte Bâb-Ali font de cet endroit un véritable foyer d'infection."
               Un troisième : " Monsieur le rédacteur, les habitations juives qui avoisinent le ravin sont autant de compartiments malsains dont vous devriez réclamer l'inspection et le nettoiement, etc. etc. "

               Mais est-ce que je n'ai pas signalé tout cela en quelques mots ?
               Si j'ai réclamé des commissions de quartier, n'était-ce point pour :
               - la visite des logements insalubres,
               - le nettoyage des coins de rue, des cours où séjournent en permanence de véritables charniers ?

               Quelqu'un a-t-il bougé ? Non.
               Eh bien de quoi vous plaignez-vous ? Au lieu de gémir comme Job sur votre fumier, que ne prenez-vous des pelles et n'enlevez-vous vos ordures ?
               Vous comptez sur le maire ; permettez-moi de vous dire que c'est trop de naïveté.
               Que voulez-vous que le maire fasse pour vous ? Il ne soupçonne même pas la responsabilité qui lui incombe à cette heure.
               Voyez-le plutôt passer dans la rue. Il respire un air poussiéreux, sale. Cet homme qui possède des millions fait songer au dégraisseur, on croirait toujours qu'il vient de faire la sieste dans un coin de sa propriété louée à Marie Cochon. Que pouvez-vous attendre de lui ?

               Le ravin suffit à lui seul pour donner le choléra. Pensez-vous qu'il l'assainisse ? A cent mètres de la porte de Mostaganem, un âne crevé baigne dans un jus noir et fétide. Il est là, en pleine lumière, riant à la lune, étalant avec impudence son flanc déchiqueté par les corbeaux, son éventration hideuse, ses chairs putréfiées que sucent des milliers de moucherons. Il suffirait que l'un de ces insectes se posât sur vous pour vous donner le charbon et conséquemment la mort. Peu importe, le maire a d'autres chats à fouetter.
               Les habitations juives qui longent le Jardin Public constituent une agglomération pestilentielle. Pensez-vous que le citoyen Pérez s'en préoccupe ? Parlez-lui-en ; j'ai la certitude qu'il ne vous comprendra pas.

               Cet après-midi, jour de marché, les Arabes suivant leurs habitudes couvriront d'excréments humains le pourtour du marché et la route avoisinant. On devrait se souvenir qu'à la Mecque le choléra n'a pas d'autre origine que ces malpropretés. Ici on ne s'en inquiète point. Le maire dort sur ses deux oreilles.
               Quant à ceux de sa famille, plus intelligents, ils prennent la fuite.

               C'est ainsi qu'à l'heure où le choléra est à nos portes, car il ne faut pas se le dissimuler, ce sera une grande chance si nous échappons, à cette heure dis-je, où le fléau nous menace, M. Ulhmann, Conseiller Général et Docteur en Médecine prend le paquebot pour quelque village des Vosges où il sera à l'abri de l'épidémie. N'est-ce pas là une honteuse désertion ? Je le demande à tous les gens de bonne foi, est-il permis à un docteur de quitter la ville en ce moment ?
               Quant à moi je proclame que cet homme manque à tous ses devoirs, et j'espère que ses électeurs s'en souviendront.

               Un soldat qui quitterait le pays le jour de la déclaration de guerre ne commettrait pas un geste plus antipatriotique.
               Ainsi donc, habitants de Mascara, ne comptez point sur vos gouvernants, sur ceux que vous avez nommés et qui sont indignes de votre confiance.
               Ce sont des élus " cachirs ", ils sont un fléau et vous en amèneront d'autres si vous vous reposez sur eux.
               Unissez-vous ; ainsi que je vous l'ai dit, nommez des commissions de quartier qui feront désinfecter les logements insalubres, qui feront couler les eaux putrides qui nous menacent de diphtérie, du croup et de la variole ; prenez vous-mêmes toutes les mesures propres à assainir Mascara et cela sur-le-champ. Dans huit jours peut-être, il sera trop tard.

               Qu'on n'aille point me dire surtout que j'effraye la population sans raison. Je ne dis point tout ce que je pense et les craintes légitimes que j'ai lieu d'éprouver pour les habitants de Mascara.
               Si je conjure chacun d'agir dans la mesure de ses moyens c'est qu'il vaut mieux prévenir le mal, prendre des mesures prophylactiques que de s'adresser à la médecine curative.
               Et je tiens à remercier bien sincèrement l'Administration militaire des secours qu'elle vient d'organiser. Ce matin un détachement de tirailleurs a nettoyé et assaini les fortifications. L'Indépendant remercie M. le Général Lespiau de son intelligente prévoyance.

               Dans un pays où l'Administration civile est abandonnée à des incapables il appartenait à l'armée de nous donner l'exemple d'une activité intelligente et d'un dévouement indispensable.
               Encore une fois merci !
               Que l'armée reçoive nos sincères félicitations.
               Si le fléau épargne Mascara, nos concitoyens le devront au brave Général Lespiau, au savant médecin en chef M. Chaumont et à leurs aides dévoués.

Narcisse Faucon
Ancien rédacteur en chef de l'Echo d'Oran et de l'Indépendant de Constantine, rédacteur en chef du Journal de l'Algérie et de la Tunisie.
L'Indépendant de Mascara (03-07-1884)


Beni-Méred
Envoyé par M. Christian Graille

" Ense et aratro " telle fut la devise du Maréchal Bugeaud.

               L'amour de l'armée et l'amour de l'agriculture furent chez lui deux sentiments inséparables qu'il traduisit maintes fois en actes. Constamment, il mit l'épée au service de la charrue :
               - il employa l'armée à des travaux publics,
               - à la construction de ponts,
               - à l'ouverture de routes,
               - il attribua 30 hectares de terres aux troupes isolées dans les camps,
               - leur recommanda de faire des cultures de céréales, de plantes fourragères,
               - fit même défricher par ses soldats les terres des colons
               - et construire leurs maisons.

               Dès 1838, il était convaincu que seule la colonisation militaire pouvait réussir en Algérie :
               " Le climat, la nature du sol, la rareté des eaux, le caractère guerrier et pillard des indigènes sont des obstacles immenses. Il faut pour coloniser, déclarait-t-il, une population guerrière habituée aux travaux des champs, organisée à peu près comme le sont les Arabes, cultivant et défendant le sol. "
               Aucun autre système de colonisation ne lui paraissait possible après le sac de la Mitidja : " Il faut, affirmait-t-il, à la Chambre des Députés, des colons militaires (murmures) ou civils si vous le voulez, peu importe le nom, mais organisez-les militairement car il faut que les colons soient très guerriers dans un pareil pays. "

               Il le répéta au ministre de la guerre, Soult, après sa nomination de Gouverneur Général : " Il n'y a que la colonisation militaire, c'est-à-dire une agglomération homogène, constituée fortement et travaillant méthodiquement qui puisse prospérer jusqu'à ce que la soumission du pays ait assuré la sécurité. "
               En novembre 1841, il précisait l'idée qu'il se faisait de la légion colonisatrice dans la réponse qu'il fit aux instructions du ministre :
               " Je ferai appel à plusieurs classes de travailleurs, à l'armée en retraite et à tous les contingents de l'armée active, sans crainte de diminuer le chiffre de la réserve.
               Les colons militaires doivent successivement remplacer l'armée en Afrique. "
               Dès que son projet de colonisation militaire fut élaboré, il entendit le mettre à exécution.

               Au début de décembre 1841 il fit commencer par le Génie militaire, près de l'obstacle continu, la construction de deux villages qu'il appela Fouka et Beni-Méred. Le 7 de ce mois, il adressa aux Chefs de Corps une circulaire à communiquer aux troupes dans laquelle il faisait miroiter les avantages qu'il était prêt à accorder aux soldats libérés qui consentiraient à s'établir dans ces villages.
               Le 21, il fit rassembler tous les hommes libérables de la garnison d'Alger et des camps voisins, il leur parla en ami qui serait heureux de n'avoir pas à faire ses adieux à la plupart d'entre eux et promit d'accorder une concession à ceux qui voudraient s'établir en Algérie.
               Sur 800 hommes présents 63 seulement répondirent à cet appel et furent dirigés vers Fouka. Mais le recrutement était défectueux ; il y eut vite de nombreuses défections. Pour fixer les autres Bugeaud promit d'accorder une indemnité de 500 francs à ceux qui consentiraient à se marier.
               Le maire de Toulon accepta, pour la circonstance, le rôle délicat d'agent matrimonial ; 17 colons se rendirent dans cette ville pour convoler en justes noces avec les élues de leur cœur ; ce fut une grande cérémonie religieuse rehaussée de musique militaire et de roulements de tambour. Trois autres préférèrent prendre femme dans leur pays d'origine.

               Ce premier essai ne l'ayant pas satisfait, Bugeaud proposa au Ministre de la Guerre un nouveau système :
               " J'ai reconnu par l'expérience, écrivait-il, que la formation primitive de ces compagnies était vicieuse. Ce ne sont pas des soldats libérés qu'il faudrait pour la colonie militaire ; outre qu'on en trouverait pas assez, à la première difficulté, au premier découragement ils se rebutent et demandent de s'en aller. Il faudrait des hommes ayant encore plusieurs années de service à faire, voulant se consacrer à l'Afrique et ayant en général des habitudes agricoles ou du moins une profession se rattachant à l'agriculture. "
               Tout en reconnaissant que ce deuxième système était préférable au premier, Soult déclara qu'il était peu partisan de la colonisation militaire il écrivit en marge de sa réponse :
               " Il faut d'abord examiner s'il convient d'entretenir à grand frais une armée nombreuse pour en employer une partie à des travaux agricoles. "
               Bugeaud décida d'appliquer ce nouveau système au camp de Mahelma, entre Douéra et Koléa, et sur un haouch situé à mi-chemin entre Blida et Boufarik, l'haouch Beni-Méred qui avait été abandonné par les indigènes lors de l'insurrection de 1839.

               La construction d'un village défensif sur cet haouch dont les terres étaient fertiles, perméables et irrigables, servirait à la garde de l'obstacle continu.
               Bien résolu à mettre son projet à exécution, Bugeaud se réserva expressément ce territoire sans se soucier aucunement des nombreux colons civils qui attendaient impatiemment à Alger que l'administration voulut bien leur donner le placement qu'elle leur avait promis.
               Le lieutenant général Rumigny, gouverneur général par intérim, se plaignit au Ministre de cette pénible situation :
               " Comme je dis la vérité toute entière à votre excellence, je lui déclare que les idées de monsieur le Gouverneur général Bugeaud sur l'organisation des colonies militaires de Blida causent un mal sans remède pour cette année. En effet le temps de semailles sera passé dans quinze jours et il sera impossible que les familles auxquelles il accordera la permission de s'établir dans les villages qu'il veut former puissent subvenir à leur nourriture avant l'année prochaine. Il y a ici une foule de gens qu'on aurait pu envoyer immédiatement soit à Koléa, soit à Blida ainsi que le demandaient avec insistance plusieurs chefs de famille possédant un capital depuis 800 francs jusqu'à 8.000.

               Le temps s'est écoulé, leurs ressources se consomment et la défense absolue laissée par le Gouverneur Général d'établir un seul colon, ancien militaire ou civil dans ces localités retarde indéfiniment l'époque où l'on pourra s'occuper de les placer. "
               Le plan adopté pour Beni-Méred fut un rectangle de 300 mètres de long sur 240 de large.
               Le nouveau village devait être entouré d'une enceinte en maçonnerie de 3 mètres d'élévation sur 0 m.50 d'épaisseur et flanqué de trois tours.
               Il devrait comprendre 48 maisons doubles qui abriteraient 96 familles. Dix maisons seraient construites immédiatement par le Génie militaire pour abriter pendant une année les colons et leur permettre de bâtir leur habitation personnelle. A la fin de 1842, le Génie avec l'aide d'ouvriers civils avait construit l'enceinte aux deux tiers et commencé l'édification de 10 maisons.

               Ces travaux ayant absorbé les crédits dont il disposait, Bugeaud fit appel, pour leur achèvement, à la main d'œuvre moins coûteuse des condamnés militaires du colonel Marengo.
               Devant le faible succès du recrutement des soldats libérés, le Gouverneur Général s'était résigné à faire remise du village de Beni-Méred à la direction de l'intérieur qui devait y placer des colons civils.
               Le Comte Guyot avait envoyé deux géomètres pour procéder au levé des terrains et à la délimitation du périmètre.
               Quand ces travaux furent terminés, il dirigea sur le nouveau centre une famille de la Haute Saône, composée de onze personnes, dont le fils aîné était un ancien soldat de l'armée d'Afrique. Il s'apprêtait à y placer d'autres colons civils quand, inopinément Bugeaud, au retour d'une expédition décida d'y envoyer une compagnie de 66 hommes faisant partie du 48e de ligne.

               Commandée par le lieutenant de Monsigny, elle arriva le 19 novembre à Beni-Méred et se logea dans une baraque en planches en attendant l'achèvement de la construction des maisons.
               Le Génie délivra à ces colons militaires des pelles et des pioches ; l'intendance leur distribua des instruments agricoles et 11 paires de bœufs.
               Ils furent ainsi entreprendre immédiatement les défrichements, faire des ensemencements et quelques plantations.
               En outre, Bugeaud leur fit un cadeau important :
               - une jument,
               - un poulain,
               - 55 bœufs, vaches et taureaux,
               - 90 brebis et béliers,
               - 4 chèvres et
               - 13 agneaux.

               (Rapport du Lieutenant de Montigny le 16 mars 1843. Archives.)
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               Ces soldats colons continuèrent à toucher leur solde et leurs vivres ; ils furent astreints à travailler en commun, cinq jours par semaine et à constituer un avoir collectif ; c'était un essai intéressant de mise en application des idées communistes qui étaient alors en grande vogue.
               Trois mois après leur installation ils avaient :
               - défriché et ensemencé 65 hectares,
               - planté 370 mûriers, quelques orangers et citronniers et
               - faits d'importants travaux d'irrigation, si l'on en juge par le rapport du Directeur de la colonie

               " Le petit filet d'eau qui venait de la montagne était fréquemment arrêté par les Arabes de la tribu des Ouled Yaîch et la quantité qui arrivait à Beni-Méred était presque insuffisante à nos besoins ; il a été fait un ruisseau depuis le pied de la montagne jusqu'au village et l'eau nous arrive en quantité suffisante pour irriguer tout le terrain que nous voudrons et avec peu de frais on peut avoir à Méred une masse d'eau assez forte pour faire aller une usine. "
               De Montigny est satisfait : " Le jardin fournit des choux pour les besoins de l'ordinaire ; sous peu de jours nous aurons des salades et des petits pois. Les blés sont très beaux, les orges viennent bien ; en un mot tout promet beaucoup. L'état sanitaire est très satisfaisant. "

               Bugeaud omit de rendre compte de cette création au Ministre qui en fut informé incidemment par un rapport du Comte Guyot sur la situation des villages en 1842. " Sous la conduite de M. de Montigny, capitaine au 45e de ligne, 66 soldats se sont installés, il y a un mois et demi à Béni-Méred J'ai su depuis qu'ils ont commencé des cultures. "
               Cependant le village militaire avait prospéré. La récolte de 1848 avait été excellente ; le blé avait donné 183 quintaux et l'orge 200. Les cultures maraîchères avaient dépassé les besoins :
               " On a essayé d'en tirer parti à Blida, dit l'adjoint à l'Intendance Teinturier, mais le moment n'est pas favorable ; les troupes se trouvaient en expédition et les jardiniers de Blida ont présenté une concurrence redoutable.

               Les 500 hectares de terres en grande partie défrichées lors de leur cession aux colons. Si l'on remarquait enfin que sur ces 500 hectares, 300 étaient loués à des indigènes, on était en droit de conclure que les soldats colons avaient donné à Beni-Méred une plus-value bien faible et qu'en somme cet essai de colonisation militaire n'avait pas donné les résultats qu'on pouvait espérer et que Bugeaud espérait lui-même.
               Une fois le travail d'allotissement terminé, les terres furent réparties entre les colons par voie de tirage au sort ; c'était le seul moyen de ne pas faire de mécontents. La suppression du régime de la communauté fut un excellant stimulant pour les colons ; à la fin de 1845, Beni-Méred comptait parmi les centres les plus prospères.

               Il ne fallut pas longtemps pour faire disparaître le nivellement primitif, légalité originelle ; plusieurs colons acquirent une honnête aisance, mais d'autres moins intelligents, ou simplement moins favorisés par la fortune furent incapables d'assurer leur subsistance et ils contraignirent Bugeaud à rétablir les rations de vivres. Quant au village civil il fit de rapides progrès.
               Le chiffre de la population passa de 82 personnes à la fin de 1844 à 130 au 31 décembre de l'année suivante : par suite de l'apport fourni en 1845 par les militaires devenus civils, il s'éleva à 206 pour atteindre 225 en 1847.

               Le village militaire fut remis entre les mains de l'Administration seulement en 1846. La situation sanitaire fut très mauvaise au cours des années 1844 et 1845 à cause des défrichements effectués par les colons ; durant cette dernière année, la moitié de la population militaire et civile fut atteinte par les fièvres et on dut faire appel au dévouement de trois sœurs de charité.
               Cette situation s'améliora par la suite ; la mortalité qui s'était élevée au cours des deux années précédentes de 134 à 145 pour 1.000 descendit en 1846 à 40 pour 1.000 et en 1847 à 53 pour 1.000.
               A partir de cette dernière année les naissances furent à peu près constamment supérieures aux décès.
               Les progrès agricoles marchèrent de pair avec ceux de la population.
               Au 31 décembre 1846, la superficie cultivée en céréales atteignait 219 hectares, soit un progrès de 60 hectares par rapport à l'année 1844.

Julien Franc, Docteur ès-lettres


La médecine chez les Arabes
Envoyé par M. Christian Graille

Types Algériens

                 La relation que nous reproduirons ici est une des plus exactes qui aient été tracées sur les coutumes et la croyance des Arabes sur la médecine ; le narrateur est un médecin : voici ce qu'il dit :
                  " Malgré le fatalisme inhérent à leur religion, les Arabes accordent une grande confiance à la médecine et c'est à tort que certains auteurs ont avancé que les musulmans craignaient de tenter la Divinité en croyant à l'art de la guérir.
                  Les bains sont la panacée universelle des indigènes de l'Algérie ; ils les emploient dans toutes les maladies, quels que soient l'âge et le tempérament des malades.

                  L'application du feu joue un grand rôle dans leur thérapeutique chirurgicale ; c'est à l'aide de ce moyen violent qu'ils prétendent guérir les engorgements du foie et de la rate et une grande partie des maladies de l'estomac.
                  Pour les blessures d'armes à feu ils rougissent à blanc un anneau ou une bague de fer qu'on applique à l'orifice de la plaie. Il s'établit ainsi une suppuration et des bourgeonnements de bonne nature, l'introduction de l'air devient difficile, et la guérison est très prompte.
                  Pour les foulures, les entorses, les tumeurs et les engorgements des articulations, leur médecine n'est pas moins violente.

                  M. le Gouverneur Général a bien voulu nous communiquer le fait suivant : un chef arabe nommé Ben-Kadour-Ben-Ismaël, qui accompagnait le Général en qualité d'aide de camp dans une partie de chasse aux environs d'Oran, tomba de son cheval qui s'abattit sur lui ; on releva le cavalier tout foulé et ou le fit transporter sans connaissance dans une tribu voisine.
                  Quatre jours après, le Général, qui le croyait blessé mortellement, ou tout au moins estropié pour toute sa vie, ne fut pas peu surpris de le voir reparaître à cheval dans une revue.

                  On lui apprit qu'un toubib (médecin), appelé près de l'Arabe aussitôt après l'accident lui avait promené un fer rouge sur les articulations principales des membres supérieurs et inférieurs, après quoi il avait fait bassiner les brûlures avec de la teinture du henné, espèce de solution dont les indigènes se servent pour donner une teinte jaunâtre aux ongles, aux mains et quelquefois aux bras et aux jambes. C'était à l'emploi de ces moyens énergiques qu'était due une guérison si prompte et si merveilleuse. On comprend que de semblables cures, si rare qu'elles soient, suffisent pour perpétuer la foi des Arabes dans les traditions médicales de leurs ancêtres.

                  L'appareil que les Arabes emploient pour les fractures, consistent en une peau de la largeur du membre fracturé ; on pratique sur cette peau des trous suivant une ligne perpendiculaire, et dans ces trous on introduit une laine de roseau ou de bois flexible pour chaque colonne ; on forme ainsi un appareil complet pouvant servir à la fois d'attelle et de bandage que l'on consolide avec un amalgame d'étoupes et de mousse, quelquefois de terre glaise et de filasse.

                  L'entropium, ou renversement des paupières et des cils en dedans est une maladie très fréquente en Afrique.
                  Les anciens chirurgiens avaient déjà compris que le seul moyen de guérir radicalement l'entropium était de détruire d'une manière quelconque l'excès de peau de la paupière, qui, en se relâchant, se roulait dans l'œil ; pour cela ils se servaient d'un morceau de potasse caustique qu'ils promenaient le long de la paupière.
                  La plaie et la forte cicatrice qui résultaient de cette brûlure rapetissaient la paupière qui se dégageait alors du globe de l'œil, et la guérison était plus ou moins complète.
                  Le procédé arabe rempli d'une foule d'inconvénients a été préconisé ces derniers temps par Helling et le nommé Quadri ; ce dernier se l'est approprié en substituant tout simplement l'acide sulfurique à la potasse caustique.

                  Dans l'Algérie les barbiers sont les chirurgiens des Maures et les thalebs (savants) leurs médecins.
                  Quelques juifs font aussi de la médecine parmi les habitants des villes. Les saignées se pratiquent avec des rasoirs, en faisant des mouchetures aux jambes, après les avoir serrées fortement au-dessous du genou avec la corde de leur turban ; quant aux saignées du bras, ils les font comme nous ; seulement la plupart ne connaissance pas la position de l'artère brachiale et du tendon du biceps, blessant souvent l'un et l'autre, d'autant plus qu'ils ne se servent que d'une lancette très longue, comme celle des abcès.
                  Nous avons été témoins de quelques accidents de ce genre pendant notre séjour en Algérie. Pour saigner à la tête, les toubibs maures serrent le cou à l'aide d'une corde en poil de chameau de manière à former une turgescence à la face.
                  Cette turgescence obtenue, ils incisent la veine qui passe au-dessus de la racine du nez. Pour favoriser l'effusion du sang, les toubibs roulent un bâton sur les incisions ; et, pour arrêter la saignée, ils se servent d'une espèce d'emplâtre fait avec de la terre argileuse, par-dessus laquelle on attache un mouchoir.

                  Pour les Arabes les plus superstitieux de quelques douars,
                  - les défenses de sanglier, réduites en poudre et prises dans un breuvage, guérissent la fièvre.
                  - Le cerveau du chacal donne à l'enfant qui en a mangé la méfiance et la ruse nécessaire à un guerrier maraudeur.
                  - La tête de l'hyène rendrait fou l'homme qui en aurait mangé, et, lancée au milieu du troupeau, elle produirait le vertige chez les bœufs, les moutons et les chevaux, etc., etc.
                  Nous n'en finirions pas si nous voulions énumérer toutes les aberrations de cette singulière thérapeutique des indigènes des douars.

                  Les Arabes n'ont aucune notion d'une science toute moderne, l'orthopédie. Il est vrai de dire qu'on ne rencontre pas parmi eux cette multitude de difformités qu'on observe en Europe ; cela tient à la nature de leur organisation forte et vigoureuse, à leur vie très sobre, exempte de ces travaux pénibles et assidus qui déforment la taille et surtout à ce que les enfants rachitiques, manquant presque toujours de soins, meurent de très bonne heure.

                  On prétend même, que les enfants qui, d'après leur vice de conformation, ne paraissent pas destinés à vivre, non pas à souffrir ou à végéter longuement.
                  Les Arabes de quelques tribus passent pour suivre, à l'égard de ces malheureux, la coutume des Spartiates… Nous ne garantissons pas le fait, mais il semble probable, d'autant plus que l'infanticide peut se commettre avec une grande impunité, pour la raison qu'on n'a pas pu obtenir, même des indigènes des villes, la déclaration des morts et des naissances, et un "état civil en règle.

                  L'art des accouchements est la partie médicale la plus arriérée en Afrique. Dans un grand nombre de tribus, les femmes pour accoucher, s'asseyent sur une espèce de chaise, se tenant par les deux mains à une corde fixée au plafond ou au sommet d'une tente, tandis qu'une matrone, placée derrière, comprime le ventre du haut en bas avec une serviette pliée en long.
                  Pour les maladies des yeux, malgré leur fréquence en Afrique, la médecine arabe n'est guère plus progressive. Les Arabes aussitôt qu'une ophtalmie grave se manifeste ne songent qu'à deux choses :
                  1° soustraire l'œil à l'action de la lumière,
                  2° le préserver du contact de l'air.

                  Pour cela ils couvrent, tamponnent et compriment l'œil avec plusieurs compresses et des mouchoirs de coton fortement serrés autour de la tête. Ils ne touchent pas à cet appareil pendant une semaine ; les personnes qui le peuvent restent en repos, et celles qui sont obligées de sortir pour travailler, et qui n'ont qu'un œil malade, arrangent leurs mouchoirs de façon à le couvrit complètement, en laissant l'œil sain à découvert.
                  Les Arabes font rarement usage des collyres et des pommades ; le plus souvent ils lavent les yeux, encore tout enflammés avec du jus de plantes astringentes (se dit d'une substance qui assèche les tissus et peut faciliter leur cicatrisation) ou avec de l'eau froide ce qui contribue quelquefois à faire passer des conjonctivites simples à l'état catarrho-purulent.
                  Il m'est arrivé (et cela est sans doute arrivé à d'autres praticiens qui ont exercé la médecine en Afrique) de faire des prescriptions à des indigènes malades, et de les rencontrer une ou deux semaines après, ayant l'ordonnance pendue au cou comme un scapulaire, ou bien religieusement cachée sous leurs vêtements, sans avoir fait aucun usage des médicaments prescrits.

                  La croyance religieuse des Arabes est tellement puissante que quelquefois, malgré la désorganisation des yeux et la cécité complète, ils ont beaucoup confiance dans ces sortes de remèdes et ne désespèrent pas de leur guérison.
                  Eh bien ces idées absurdes, ces pratiques contraire au bon sens et à la raison nous étonneraient beaucoup chez un peuple barbare si l'histoire ne nous avait transmis des absurdités pareilles qui furent longtemps en crédit chez les nations civilisées et parmi les plus hautes classes de la société.
                  N'a-t-on pas vu une reine de France (Catherine de Médicis) qui, pour se préserver des malheurs physiques et moraux, portait sur son ventre une peau de vélin étrangement bariolée, semée de figures et de caractères grecs diversement enluminés ? Cette peau avait été préparée par Nostradamus et plusieurs auteurs contemporains prétendent que c'était la peau d'un enfant égorgé.

                  Les toubibs ou médecins jouissent d'une haute considération parmi les Bédouins.
                  L'art médical est cependant encore à l'état d'enfance dans toute la Barbarie ; le respect que l'on porte aux toubibs provient d'une ignorante superstition fondée principalement sur ce qu'ils les croient adonnés à la magie et aux sortilèges qu'ils doivent combattre pour guérir la plupart des maladies.
                  Les Bédouins ont conservé des Arabes de l'Espagne les croyances superstitieuses. On sait que les prétendus secrets de la cabale, de l'alchimie, de l'astrologie judiciaire, de la baguette divinatoire, toutes ces histoires si communes de sorciers, de magiciens et d'enchanteurs nous sont venus de Arabes ; le caractère espagnol se ressent beaucoup des écoles grenadines et leur amour pour le merveilleux ne peut avoir sa source ailleurs.
                  Les toubibs font fréquemment usage de la saignée, bornent toute leur science en pharmacie à quelques drogues qu'ils composent avec des simples.
                  Ils n'appliquent sur les plaies et les blessures que des cataplasmes et le plus souvent de la terre glaise. Le tempérament robuste du malade, son énergie morale réussissent à le sauver, non seulement de sa maladie mais encore des expériences absurdes et dangereuses du médecin.
                  Jamais ils ne font d'amputation. Les Arabes se prêtent aux opérations chirurgicales avec la plus grande répugnance et les plus hardis au feu redoutent un coup de bistouri et préfèrent la mort à la perte d'un membre.

                  L'Européen qui se présente comme médecin est presque toujours bien reçu ; mais il doit se prêter aux caprices de toute la tribu, qui tombera malade à son aspect.
                  Il lui faudra tâter tous les pouls, saigner, médicamenter à tort et à travers, chacun s'empressant de profiter, pour se prémunir contre les maux présents et futurs, apparents ou cachés, d'une occasion qui ne se renouvelle que rarement.
                  Ils reconnaissent chez nos chirurgiens beaucoup plus d'habileté que chez leurs toubibs ; mais leurs croyances religieuses les empêchent de se livrer en toute sécurité à leurs soins ; ils préfèrent même leurs charlatans à nos opérateurs les plus distingués.

                  Mustapha blessé à la main au combat de la Sikka refusa les soins éclairés de M. Thomas, chef d'ambulance, pour recouvrir à ceux d'un vieil empirique illuminé de Tlemcen qui a mis près de deux ans à le guérir, non sans avoir failli l'estropier.
                  Ils mettent souvent le feu aux blessures, appliquant ce tonique aux hommes comme aux chevaux : la poudre de guerre entre pour beaucoup dans leurs combinaisons pharmaco-chimiques. En un mot les remèdes sont plus dangereux que le mal. "

Algérie française par Arsène Berteuil, ancien pharmacien en chef des hôpitaux militaires de l'armée d'Afrique. Tome II (1856)


 Avis aux colons
Envoyé par M. Christian Graille

                 Un serrurier de Douéra a inventé, en mars 1845, une nouvelle charrue tout en fer, défrichant à une profondeur de 15 centimètres et qui peut être traînée par un cheval : les premiers essais ont parfaitement réussis.

                Un barrage presque monumental a été construit sur l'oued-Sig, rivière qui se jette dans le golfe d'Arzew. Ce barrage exécuté par l'armée en mars 1845 aura pour effet d'arroser 15.000 hectares de terre : il est aisé de concevoir quelle richesse une pareille irrigation est appelée à répandre dans ce pays ; une colonie y sera fondée et donnera du mouvement et une nouvelle vie à cette pittoresque vallée du Sig.
                Un ordre de M. le Gouverneur Général, du mois d'avril 1845, porte que des lots seront distribués aux colons qui voudraient se fixer à Djemda - Ghaïzaouet à condition de construire des maisons en pierre.
                Arrêté du gouverneur général portant que le village de Saint Ferdinand, le marabout d'Aumale et la ferme dite la Consulaire seront remis à la disposition de la direction de l'intérieur.

                Considérant que les conditions d'admission dans les villages construits et à construire par les condamnés militaires ou par l'armée, devant être essentiellement différentes des concessions faites jusqu'à ce jour chez les autres centres de population, il importe de les déterminer d'une façon précise, et de faire connaître aux intéressés les avantages qui les attendent et les obligations qui leur seront imposées dans ces nouveaux villages.

                Article 1er : Le village de Saint Ferdinand, le marabout d'Aumale (hameau pour dix familles) et la grande ferme dite la Consulaire seront mis le 15 du courant à la disposition de la direction de l'intérieur. Le village de Sainte-Amélie construit pour cinquante-trois familles sera remis vers la fin de l'année.
                Article 2 : Dans ces diverses localités et dans celles qui seront prochainement établies d'après le même système, chaque concession se compose ou se composera :
                - 1° D'une maison de 60 à 64 mètres de superficie,
                - bâtie en bons moellons,
                - avec des encoignures et ouvertures en pierre de taille,
                - parfaitement recrépie à l'intérieur et à l'extérieur,
                - couverte en tuiles courbes et
                - comprenant deux pièces au rez-de-chaussée et deux au premier étage (cette partie de la concession représente à elle seule une valeur de 4.500 francs au moins.)
                - 2e de 12 hectares (36 arpents) de terres cultivables dont 4 hectares défrichées.
                - 3e d'un certain nombre d'arbres plantés.
                Article 3 : Une église affectée au service du culte catholique desservira les centres de population ci-dessus désignés.
                Article 4 : Le prix de chaque concession est fixé à 1.500 francs. Le concessionnaire aura le choix de se libérer en un seul payement dès son entrée en jouissance ou en trois termes égaux de 500 francs chacun, dans un délai de dix-huit mois. Le premier sera exigible le jour de l'installation de la famille.
                Article 5 : Dans le premier cas, il sera propriétaire incommutable dès le premier jour du payement ; dans le second, il ne recevra le titre de propriétaire qu'après s'être libéré entièrement. Si ce dernier terme n'était pas payé dans les délais voulus, le concessionnaire pourrait être évincé sans aucun recours de sa part pour la première somme versée par lui.
                Article 6 : Dans l'un et l'autre cas, le colon ne pourra aliéner tout ou partie de sa concession qu'après trois ans de jouissance, à moins qu'il n'en reçoive auparavant l'autorisation du Gouverneur Général, le Conseil d'Administration consulté.
                Article 7 : Indépendamment du prix de la concession, chaque famille devra justifier d'un avoir personnel de 1.000 francs comme garantie d'une bonne exploitation.
                Article 8 : Il pourra être accordé des concessions plus considérables en terres aux personnes qui justifieront de ressources suffisantes. Ces dernières concessions devront être préalablement soumises à l'approbation de M. le Ministre de la Guerre.
                Article 9 : Les colons seront tenus de clore dans l'année leur cour et jardin attenants à la maison, d'un mur, d'une palissade ou d'une haie vive ou sèche. Les alignements pour l'établissement de ces clôtures seront délivrés sans retard sur leur demande.
                Article 10 : Les récoltes pendantes par racines qui se trouveront existées à l'époque de l'entrée en jouissance des colons seront partagées entre eux au prorata de l'étendue de leurs concessions moyennant le remboursement du prix de culture et de semences.
                Article 11 : Chaque colon sera tenu de planter trois cents arbres sur sa propriété dans le délai de trois ans après son entrée en jouissance.
                Article 12 : Dans le cas où les colons le demanderaient, il sera construit par les ouvriers militaires, contre leurs maisons, un appentis en bois pour loger leurs bestiaux, dont ils rembourseront le prix à la caisse coloniale d'après le taux de la dépense effectuée qui ne dépassera pas 150 francs.
                Ils y gagneront la différence notable entre le prix de la main-d'œuvre par les ouvriers militaires et de la main-d'œuvre par les ouvriers civils.
                Article 13 : Les maisons devront être blanchies à la chaux une fois chaque année, dans le courant du mois de septembre.
                Article 14 : Le directeur de l'intérieur est chargé, etc.

                De nouvelles concessions se font journellement sur les différents points de l'Algérie ; les conditions varient selon les localités mais nous aurons soin de les indiquer à, leurs lieux et places.

Guide du voyageur en Algérie : Itinéraire du savant, de l'artiste, de l'homme du monde et du colon (1848)


Impressions de voyage : Oran
Envoyé par M. Christian Graille

                 La distance entre Alger et Oran, par le chemin de fer, est de 420 kilomètres qu'on parcourt en 17 heures. Les énormes cactus qui hérissent les abords du château neuf et le beau palmier du jardin de la Préfecture donnent en effet à Oran un caractère plus africain.
                 Située au fond d'une baie, la ville s'élève sur les deux côtés d'un ravin qui en forment le centre; des hauteurs fortifiées la dominent. Une jolie promenade disposée avec hardiesse, et presque à pic, sur les bords de la mer à deux pas du théâtre offre une grande ressource à la société oranaise.
                 Ce qui domine dans la ville, ce qui saisit dès qu'on y entre, ce qui reste dans les mémoires comme trait essentiel de sa physionomie après un certain séjour c'est :
                 - Le mouvement commercial,
                 - le développement de l'activité pratique dans tous les sens,
                 - la fièvre des affaires.
                 Au point de vue de l'économiste Oran rivalise avec Alger et tend à le dépasser. Le nombre de navires qui chargent et déchargent dans le port augmente de jour en jour, les maisons de commerce se multiplient et s'agrandissent, les constructions s'étendent, les faubourgs deviennent partie intégrante de la cité.

                 La population en 1860 était de 26.910 habitants, en 1872 elle s'est élevée au chiffre de 40.015 : C'est un accroissement de quarante-huit pour cent ; elle doublera en 25 ans si la même proportion se maintient.
                 Ce résultat est dû en grande partie au voisinage de l'Espagne si cruellement déchirée par la guerre civile.
                 L'élément français ne représente qu'un dixième de la population totale (10.043 habitants) ; l'importance de l'élément espagnol est bien supérieure (16.064 habitants).
                 Après les Espagnols et les Français viennent les Israélites naturalisés par le décret Crémieux de 1870 (6.622) puis les Musulmans (4.181), les Italiens (989) et les étrangers appartenant à diverses nationalités (1116).

                 On peut regretter que les Français moins habitués aux climats chauds, plus casaniers et moins mécontents de leur sort se laissent devancer par les Espagnols ; mais l'accroissement rapide de la population quelle que soit l'origine des immigrants n'en est pas moins un symptôme de prospérité ; elle met en évidence les ressources de notre colonie car ce sont ces ressources qui attirent et retiennent les étrangers.

                 Oran a deux ports, un de commerce qui touche la ville et un port de guerre qui en est distant de huit kilomètres. Ce dernier s'appelle Mers El Kébir.
                 Pour s'y rendre, on se dirige vers le Nord-Ouest, on contourne la montagne de Santa Cruz par une route taillée dans le roc puis on longe la plage laissant sur la gauche les jolis villages de Sainte Clotilde et de Saint André.
                 Mers El Kébir est adossé aux falaises d'un petit promontoire qui précède le cap Falcon. En face, de l'autre côté de la baie se dresse le djebel Karkhar ou montagne des lions.
                 Au retour, on peut prendre sur la droite près du village de Sainte Clotilde un sentier escarpé qui conduit, après une heure d'ascension, au fort de Santa Cruz.
                 On monte au milieu de plantes fleuries et de buissons épineux ; peu à peu la route d'en bas et la grève disparaissent : On est comme suspendu au-dessus de la mer qui semble tout à la fois se rapprocher et s'étendre ; Une brèche naturelle ouverte entre deux massifs de rochers marque le sommet ; quelques pas encore et l'on découvre la ville d'Oran qui se replie sur elle-même au fond d'un creux et dans le lointain, à l'Orient, au bout d'une longue ligne de falaises qui s'empourprent au coucher du soleil, la montagne aux lions assise sur sa large base, revêtue sur ses flancs des nuances :
                 - les plus délicates,
                 - les plus douces,
                 - les plus caressantes.
                 On redescend par un bois de pins superbes le long de ravins où croissent, à l'abri du vent, des arbres à fruits et des plantes alimentaires de toutes sortes.

                 La richesse du sol des environs d'Oran est merveilleuse ; l'eau manque souvent à la surface mais on la trouve sans trop de peine à une certaine profondeur et on la fait monter au moyen de norias.
                 Les Beys d'Oran avaient autrefois une jolie résidence d'été dans un endroit appelé Misserghin à quinze kilomètres d'Oran sur la route de Tlemcen.
                 Le Gouvernement français établit d'abord un camp ; puis en 1842 il transforma en pépinière le jardin de la ville mauresque ; enfin en 1851 il céda la pépinière et ses dépendances au Père Abram pour la fondation d'un orphelinat.

                 Cet orphelinat est très bien tenu et habilement dirigé ; il contenait quand je l'ai visité cent trente garçons mais l'installation actuelle comporterait un nombre plus considérable.
                 La plupart des pensionnaires sont indigènes. Quelques-uns uns ont été recueillis parmi les Arabes dans des circonstances vraiment tragiques à la suite de l'horrible disette qui décima les tribus en 1867.
                 Toutes les conditions d'hygiène sont réunies dans cet établissement :
                 - propreté des bâtiments,
                 - voisinage des arbres,
                 - cours spacieuses,
                 - pureté de l'air et de l'eau.
                 - Aussi les enfants ont une mine excellente ; leur physionomie vive et gaie font plaisir à voir.

                 Combien d'enfants de la Métropole qui languissent dans nos asiles trouveraient à Misserghin le milieu qui leur convient !
                 L'emploi du temps est réglé de façon très convenable : Trois heures d'école, huit heures de travaux manuels qui ne sont pas tous agricoles : Il y a des ateliers :
                 - de forgerons,
                 - de charrons,
                 - de menuisiers,
                 - de tanneurs,
                 - de cordonniers,
                 - de confectionneurs d'habits et
                 - d'autres encore.
                 Un asile de vieillards est annexé à l'orphelinat de garçons.
                 Un peu plus loin des sœurs tiennent un orphelinat de filles et un asile pour les femmes parvenues à l'extrême vieillesse. L'ancienne pépinière a été conservée, perfectionnée, agrandie Des milliers de plantes sont vendues chaque année ; le verger et le potager produisent des fruits et des légumes superbes qui alimentent le marché d'Oran.

                 Les orangers et les citronniers cultivés principalement pour leurs fleurs sont distillés sur place, croissent avec une vigueur peu commune.
                 - De beaux platanes,
                 - des thuyas,
                 - quelques palmiers récemment plantés,
                 - des eucalyptus succèdent ou se mêlent
                 - aux orangers et
                 - aux citronniers.
                 - Les vignes couvrent plusieurs hectares et donnent de bonnes récoltes.

                 La plaine des Andalouses s'étend au nord de Misserghin de l'autre côté du djebel Murdjajo sur une longueur de douze à quinze kilomètres; elle décrit un demi-cercle autour d'une baie comprise entre le cap Falcon et le cap Lindlès. C'est là, dit-on, que débarquèrent les premières victimes de l'édit de 1610 condamnant à l'exil les Maures d'Espagne.
                 Deux communes y ont été constituées depuis l'occupation française, celle d'Aïn-el-Turk au Nord Est et celle de Bousfer au Nord Ouest ; ces communes comprennent aujourd'hui une population de 3.600 habitants parmi lesquels se trouve environ un millier d'Européens ; une route d'une vingtaine de kilomètres carrossable quoique bien rude et bien étroite met Bousfer et Aïn el Turk en communication avec Oran.

                 Je fis, avec un jeune officier d'artillerie avec qui j'avais lié connaissance, la route à cheval ; nous suivîmes jusqu'à Saint André la route de Mers El Kébir ; là on quitte la plage et l'on commence à s'élever sur les hauteurs du djebel Murdjajo.
                 La montagne qu'on traverse est aride et dépouillée d'arbres. A la descente on retrouve la mer qu'on avait perdue de vue pendant quelque temps. Une corniche sinueuse bordée d'aloès en guise de parapet vous porte en bas et alors on peut galoper à l'aise le long des champs qui se déroulent au loin, couverts de magnifiques céréales.

                 La ferme où nous étions attendus se trouvait à l'extrémité occidentale de la plaine des Andalouses ; le propriétaire nous fit visiter une partie de son domaine (qui appartenait autrefois à une compagnie d'actionnaires dissoute). Il se compose de trois mille hectares distribués de la manière la plus heureuse, situé sur les deux versants d'une montagne peu élevée et en rase campagne le long d'une plage de sable fin.
                 L'abondance des eaux qui descendent de la montagne permet d'irriguer la plaine sans norias ; la plage accessible aux petites barques qu'on appelle balancelles facilite le transport des Andalouses à Oran.
                 La région montagneuse est coupée par des ravins où se plaisent les légumes et les arbres fruitiers ; dans ses parties les plus incultes elles forment des plantes textiles et de l'herbe pour les bestiaux. Quant à la région plate, cultivée par des travailleurs espagnols, je ne saurais mieux faire pour donner une idée de sa fertilité que de la comparer à la fameuse vallée de Grenade. La hauteur et la vigueur des blés et des avoines que le vent faisait onduler promettaient déjà d'opulentes moissons bien que le mois d'avril fut à peine commencé ; on sentait qu'il suffirait d'un petit nombre de semaines pour achever de les mûrir.

                 Au milieu de ces vastes champs un palmier isolé s'élève et sert de point de repère.
                 La maison d'habitation est construite sur les ruines encore visibles d'une villa antique ; une allée de bananiers la protège contre les ardeurs excessives du soleil et conduit au bord de la mer.

                 Le domaine des andalouses, trop étendu pour un seul homme, se morcellera tôt ou tard; entièrement défriché il pourra donner l'aisance à quelques centaines de familles laborieuses.

L'Algérie : Impressions de voyage (17 mars - 4 juin 1873)
Par Jean Jules Clamageran, Docteur en droit, ancien adjoint au maire à la mairie de Paris, membre de la société d'économie politique.
Edition en 1874. Notre voyage en Oranie se termine.

                 Quarante ans après l'arrivée des Français et des Européens du bassin méditerranéen, Espagnols pour la plupart, le défrichement des terres se poursuit à un rythme soutenu, la région se transforme, l'agriculture se développe et prospère.
                 La tâche reste encore très importante mais naît déjà dans l'esprit de ces pionniers têtus et décidés le sentiment d'avoir trouvé ici de nouvelles racines dans un pays qu'ils pensent désormais être le leur.
C. Graille


Pour les profs...
Envoyé par Annie
Aéroport

         On réunit des profs d'université dans un avion de conception locale...
         Avant le décollage on passe une information :
         - Votre attention svp, l'avion qui va bientôt décoller a été fabriqué par vos étudiants en physique-chimie, en mécanique, en électricité, en informatique...
         Aussitôt dit, les profs se précipitent pour descendre.
         À la fin, il ne reste plus que le Doyen à l'intérieur de l'avion.
         Étonné, je lui demande pourquoi il est resté ?

         IL RÉPOND :
         - J'ai une entière confiance en mes étudiants. Si c'est eux qui ont vraiment fabriqué cet avion, il ne va même pas décoller...


PHOTO DE BÔNE
Envoyée par M. J.L. Ventura
Le paquebot El Djezaïr à Bône en 1962            



Les causes de l'expédition de 1830
Envoyé par M. Christian Graille

           Ce ne fut point un fait isolé qui amena la rupture entre la France et la Régence d'Alger. Les griefs du gouvernement français remontaient à l'accession au pouvoir du dernier Dey Hussein-Pacha, en 1818, mais c'est surtout depuis 1824 qu'ils acquirent plus de gravité.
           A cette époque, contre la teneur des traités, des perquisitions furent exercées dans la maison consulaire de France à Bône. Des autorisations illicites de séjourner et de commercer dans cette ville, et sur les côtes de la province de Constantine, furent accordées à des négociants anglais et mahométans ; un droit arbitraire de dix pour cent fut établi sur les marchandises introduites dans ces contrées pour le compte de l'agent des concessions françaises.

           En 1826, des navires appartenant à des sujets du Saint-Siège, mais couverts du pavillon français et de la protection de la France, furent injustement capturés, et la restitution en fut refusée ; des propriétés françaises, saisies à bord d'un navire espagnol, furent confisquées.
           Ainsi furent violés les deux principes qui avaient constamment servi de base à nos transactions avec les Régences d'Afrique : que le pavillon français couvre la marchandise, quelle qu'elle soit, et que la marchandise française était inviolable, sous quelque pavillon qu'elle fût.
           Des visites arbitraires et des déprédations furent commises à bord de navires français. La souveraineté de la France sur la portion de territoire qui se trouve comprise outre la rivière Seybouse et le cap Bon, et dont elle est en possession depuis le milieu du quinzième siècle, fut méconnue.

           - Le traité qui, en 1817, nous remit en jouissance de nos possessions de la Calle et du monopole de la pêche du corail, stipulait une redevance de 60.000 francs ; trois ans après, elle fut arbitrairement portée à 200.000 francs, et, pour prévenir la perte totale de nos établissements, nous fûmes obligés d'en passer par ce que voulut le gouvernement d'Alger.

           - En 1818, un brick français fut pillé par les habitants de Bône, et nous ne pûmes obtenir aucune espèce de réparation.

           - En 1823, la maison de l'agent consulaire de France à Bône fut violée par les autorités algériennes, sous prétexte de contrebande ; et, quoique le résultat de la visite eût prouvé la fausseté de l'accusation, le Dey ne donna aucune satisfaction à cette offense.

           - Enfin le 30 avril 1827, lorsque le Consul de France, que des raisons financières avaient déjà brouillé avec le Dey, se remit auprès de lui pour le complimenter, suivant l'usage, la veille des fêtes musulmanes, une insulte grossière répondit seule à cet hommage officiel.
           Le gouvernement français, informé de cette insulte, envoya au Consul l'ordre de quitter Alger, et, celui-ci étant parti le 15 juin, le Dey fit aussitôt détruire les établissements français en Afrique et notamment le fort de La Calle, qui fut pillé complètement et ruiné de fond en comble.
           Alors commença le blocus d'Alger ; ce blocus était commandé par le capitaine Collet. Cependant le blocus ne produisit aucun résultat et coûtait sept millions à la France. Au mois de juillet 1829, le gouvernement français, reconnaissant l'inefficacité de ce système de répression, et pensant à prendre des mesures plus décisives pour terminer la guerre, crut cependant devoir, avant d'arrêter sa détermination, faire une dernière démarche vis-à-vis du Dey.

           M. de la Bretonnière fut envoyé à Alger ; il porta à Hussein jusque dans son palais, nos justes réclamations. Le Dey refusa d'y faire droit, et, lorsque le parlementaire s'éloigna du port, les batteries, à un signal parti de la forteresse de la Kasbah, firent feu toutes à la fois sur le bâtiment qui le portait.
           Le feu continua jusqu'à ce que M. de la Bretonnière se trouvât hors de portée (1).

           Cette éclatante violation du droit des gens ne pouvait rester impunie. La guerre fut donc résolue ; une flotte et une armée se réunirent à Toulon.

           (1) Pour s'excuser, Hussein prétendit que les canonniers du môle avaient tiré sans ordre sur le vaisseau français ; afin même de donner plus de poids à son assertion, il destitua le commandant du môle, et fit donner la bastonnade aux canonniers qui avaient servi les pièces. Mauvaise défaite.
           La canonnade dura près d'une demi-heure : or, si le Dey n'en avait pas été, sinon l'ordonnateur, du moins le complice, il eût été facile de l'arrêter plus tôt.

L'Algérie française
par Arsène Berteuil, ancien pharmacien en chef des hôpitaux militaires
De l'armée d'Afrique. Tome premier. Édition 1856


Méred
Envoyé par M. Christian Graille

                 En jetant un dernier regard sur ce paysage charmant, nous oublions qu'il a fallu, pour se l'approprier, dix années de guerre avec les Arabes et vingt années de lutte avec un climat beaucoup plus meurtrier que la guerre !
                 Nous nous en souvenons seulement en passant près de cimetières et quand, nous nous arrêtons plus loin au charmant village de Béni Méred, sur la place duquel s'élève un obélisque reposant sur une base disposée en fontaine.
                 Sur une face on lit : " Aux vingt-deux braves de Méred ", sur l'autre : " Combat du 10 avril 1842. "

                 Quel laconisme !... La véritable histoire de l'Algérie est ici, comme partout, inscrite sur quelques colonnes funéraires.
                 - Quel est le combat dont ce monument perpétue la mémoire ? Demandai-je au cousin Jean.
                 - Je vais vous le dire … Le voici tel que me le raconta un des rares survivants, l'unique peut-être de ce drame glorieux me répondit mon aimable guide :
                 " Le 10 avril 1842, un sergent nommé Blandan du 26e de ligne sortait de Boufarik avec dix-huit hommes de son régiment et du 2e chasseur pour porter ou du moins assurer le transport de la correspondance jusqu'au blockhaus voisin, à Méred.
                 Un sous-aide- chirurgien, allant rejoindre son poste à Blida, s'était joint à la petite troupe.

                 Arrivé au ravin couvert de broussailles qu'il fallait traverser, avant que d'atteindre le blockhaus, le détachement, pris à l'improviste, est cerné, entouré par trois cents Arabes.
                 Blandan d'un rapide mouvement forme sa troupe pour combattre lorsqu'un grand nègre, qui paraissait être le chef des Arabes se détache des rangs ennemis et lui dit en assez bon français :
                 - Rends-toi sergent et il ne sera fait aucun mal ni à toi, ni à tes hommes.
                 - Tiens, lui répondit Blandan, voilà comment je me rends !

                 Et le mettant en joue il le tue donnant l'ordre à ses soldats de commencer le feu.
                 Les Arabes plient d'abord sous la décharge ; mais songeant à la faible troupe, à la poignée d'hommes qui est devant eux, ils reviennent et la criblent de balles !
                 Trois fois ils s'élancent sur le petit détachement sans parvenir à l'entamer. Huit hommes pourtant sont tombés à la première décharge ; Blandan, leur chef, a reçu trois coups de feu mais il continue à commander.
                 Le cheval du brigadier des chasseurs est tué, son cavalier renversé ; les blessés, couchés dans la poussière rechargent les armes de leurs camarades, et ce sont cependant des recrues d'un an à peine de service qui n'avaient encore pas vu le feu. Blandan épuisé dit à son camarade, le brigadier désarçonné :
                 - Prends le commandement car… pour moi je n'en puis plus.

                 D'instant en instant la troupe héroïque diminue ; il ne reste plus que sept soldats debout ; aussi peuvent-ils compter les minutes qu'il leur reste encore à vivre …
                 Mais tout à coup les Arabes :
                 - S'arrêtent, - écoutent, - se consultent et - paraissent hésiter.

                 Une colonne de poussière qui avance comme les nuées d'un ouragan explique l'attitude des ennemis … Des cris retentissent au-delà du ravin, du côté du blockhaus, et achèvent de les troubler.
                 Bientôt une troupe de cavaliers, dont les lames de sabre lancent des éclairs, arrive : c'est le colonel Marris qui vient de Boufarik avec ses chasseurs …
                 Puis trente fantassins sous la conduite du lieutenant de génie Joulard accourent de Méred … des deux côtés on se jette sur la horde arabe. Les fantassins la fusillent vivement ; les chasseurs la sabrent avec une vigueur qui ne lui laisse que le temps de tourner bride et de fuir, en abandonnant sur le terrain grand nombre des siens, sans avoir pu enlever le plus petit trophée à nos vaillants soldats.

                 L'ennemi en déroute, le colonel Marris, se rapprochant du sergent Blandan, cherche à le ranimer et veut l'encourager par quelques bonnes paroles partie du cœur ; mais Blandan ne l'entend pas et poursuivant son commandement héroïque, de ses lèvres déjà livides il dit dans un dernier effort :
                 - Courage mes amis, défendez-vous jusqu'à la mort.
                 Le colonel enlevant sa propre croix de sa poitrine la met dans la main du moribond. Ranimé au contact de ce signe de récompense suprême, Blandan a la force de la porter à ses lèvres et il expire en la baisant.

                 Ce combat héroïque émut le Maréchal Bugeaud, qui, en l'apprenant, adressa un ordre du jour magnifique à l'armée. Il le terminait ainsi :
                 " Lesquels ont mérité le plus de la patrie, ce ceux qui ont succombé sous le plomb ou des cinq braves qui sont restés debout et qui, jusqu'au dernier moment, ont couvert le corps de leurs frères ?
                 S'il fallait choisir entre eux je m'écrirais : ceux qui n'ont pas été frappés ! Car ils ont vu toutes les phases du combat, dont le danger croissait à mesure que les combattants diminuaient, et leur âme n'en a point été ébranlée.
                 Mieux que sur le marbre et le granit de la fontaine de Méred, le souvenir de Blandan et de ses compagnons est conservé dans le cœur du 26e de ligne, le régiment de ces braves qui célèbre l'anniversaire du fameux combat par un service funèbre d'abord, puis par des jeux militaires. "

                 Le lieu où a été bâti le joli village de Méred était couvert autrefois de :
                 - lauriers roses,
                 - tamaris,
                 - jujubiers et
                 - oliviers sauvages, fouillis inextricable à travers lequel coulait un ruisseau descendant des hauteurs des Soumata.

                 Après avoir dépassé ce coupe gorge, on trouvait un blockhaus gardé par une vingtaine d'hommes chargés de surveiller les Hadjoutes de la plaine et de signaler leurs mouvements à Boufarik et à Blidah qui se trouvaient ainsi reliés.
                 C'est au moment d'entrer dans le ravin que Blandan a été attaqué me conta le cousin Jean comme nous prenions la route de Blidah.

En Algérie de Madame G. Dufaux (1892)


Notice sur quelques pratiques
Envoyé par M. Christian Graille
Pratiques superstitieuses
des Maures, des Arabes, des Nègres et des Juifs (1)

                 Les Maures et les juifs attribuent la plupart de leurs maladies à des génies malfaisants, djunones, (démons) (Selon Shaw, les djunones, pour les mahométans, tiennent le milieu entre les anges et les démons.), qu'ils supposent habiter les sources des montagnes ou les rivages de la mer.
                 Ils cherchent à se les rendre favorables en leur immolant des victimes au pied de l'Atlas et le long de la Méditerranée ; ces traditions se sont également perpétuées à Alger.
                 Ces autels en plein air ont leurs prêtres comme ceux du vrai Dieu ; seulement ce ne sont pas les malades eux-mêmes, mais bien des nègres qui les desservent ; nommés par le chef de la nation, ils sont au nombre de sept, et, dès que l'un vient à mourir, on pourvoit aussitôt à son remplacement. Un grand sacrificateur est choisi parmi eux, et les sacrificateurs ordinaires lui témoignent en toute circonstance, une vénération profonde. Aux sacrificateurs ordinaires sont adjointes deux ou trois négresses. Ces femmes ou prêtresses sont préposées à la garde des sources autour desquelles elles placent et allument des cierges.

                 Avant d'être immolée, la victime doit être purifiée : on l'immerge d'abord (Dans la mer lorsque la source est voisine.), puis, pendant la durée des sacrifices, on la parfume, elle et les sources, avec de l'encens et divers aromates qu'on brûle ensuite sur des réchauds ; chaque prêtresse est armée du sien.
                 Quand les victimes sont :
                 - des quadrupèdes,
                 - des chèvres et
                 - des moutons, etc.,

                 On les soumet à des onctions d'huile et de feuilles de henné (La plante est broyée dans l'huile, ce qui produit une matière d'un jaune brunâtre ; c'est la même dont se servent les indigènes pour se teindre les ongles, les cheveux, la paume des mains et la plante des pieds.).

                 Ces onctions, qui s'appliquent sous la forme de raies, sont au nombre de trois principales :
                 - la première s'étend à la tête, à partir du museau jusqu'à l'extrémité de la queue,
                 - la seconde, d'une épaule à l'autre jusqu'au bas des membres, et de manière à former une croix avec la première,
                 - la troisième, d'une hanche à l'autre jusqu'aux pieds.

                 Après les onctions, on administre à l'animal une préparation blanchâtre, qui paraît être de la crème ou du lait caillé. Si les victimes, au contraire, sont des volatiles, avant de les immoler, on les promène plusieurs fois autour de la tête des patients.

(De l'établissement des Français en Afrique par M. Genty de Bussy.

                 A peine ont-ils cessé de vivre, que les assistants se hâtent d'en détacher les plumes, de les faire voltiger sur les sources, et les femmes même ne manquent pas d'en emporter une certaine quantité pour les convertir en amulette.
                 Ces premières cérémonies terminées, le sacrificateur, tourné vers l'Orient, auquel il présente le tranchant du couteau sacré, appuie le pied gauche sur le corps de la victime, puis il en assujettit la gorge de la même main et lui coupe de l'autre.
                 Le coup porté, les quadrupèdes meurent toujours sur place.

                 Les volatiles, au contraire, sautent encore plus ou moins, et, lorsque par hasard ils plongent dans la mer, on en tire un heureux augure.
                 Les victimes sont fournies aux sacrificateurs par les malades ou en leurs noms par d'autres personnes, ordinairement par des parents.
                 Lorsque le malade est lui-même présent, le sacrificateur le marque avec le pouce du sang de la victime sur le front si la maladie est générale, et sur les parties souffrantes si elle n'est que locale.
                 Les animaux immolés sont repris par les malades, qui les mangent eux et les leurs ( Il n'est pas rare que le nombre de victimes immolées dépasse deux à trois cents).
                 Il ne reste sur place que les extrémités, que, depuis notre occupation, quelques femmes européennes misérables viennent ramasser ensuite.

                 Les prêtresses entretiennent la lumière des cierges qui brûlent autour des sources qu'elles parfument ; de temps à autre, en passant à la surface de l'eau les réchauds d'où se dégagent les aromates qui servent à purifier les victimes, on voit des malades boire de cette eau et s'en frotter différentes parties du corps, d'autres en recueillir dans des vases pour en faire ailleurs le même usage.
                 Communément, dans l'intérieur des familles, on en boit pendant trois jours, en même temps qu'on s'en sert pour les ablutions.
                 Enfin, avant de se séparer, les sacrificateurs se rassemblent autour de leur chef, et récitent en commun une prière à laquelle les malades prennent mentalement part ; après, les uns et les autres se baisent réciproquement les mains et se retirent.

                 Les sacrifices commencent tous les mercredis, au lever du soleil, et se prolongent jusqu'à midi ou au-delà. Leur durée se règle sur la quantité des victimes à immoler, c'est du moins ainsi qu'ils ont lieu près de l'hôpital de la Salpetrière, au pied d'un rocher schisteux d'où s'échappent plusieurs petites sources.
                 Les sacrificateurs y précèdent toujours les malades, et ils les expédient dans l'ordre de leur arrivée ; le tribut qu'ils exigent pour chaque victime varie de deux à dix sous de notre monnaie.
                 L'affluence des assistants n'est pas toujours la même, mais elle est quelquefois si considérable, qu'à peine les prêtres peuvent-ils suffire ; mais, lorsque des intervalles plus ou moins longs s'écoulent entre l'arrivée des uns et des autres, les sacrificateurs :
                 - s'assoient sur le rocher,
                 - s'étendent sur le rivage et
                 - tournent leurs regards vers la ville, se plaignant et de l'indifférence des fidèles et de leur mauvaise journée.

                 Voici la prière que récitent ordinairement les assistants :
                 " O Sidi'Soliman, vous qui avez sans cesse pitié des fidèles serviteurs de Dieu, you, you, you (cris de joie) !
                 O Sidi-ben-Abbas-Essebti (A), vous qui êtes le vrai roi de la terre et de la mer ! you, you, you !
                 Ayez compassion de moi, malheureuse créature, je viens me placer sous votre protection; faites que ma guérison soit prompte, et ma reconnaissance sera aussi éternelle que votre renommée !
                 you, you, you ! "

                 (A) Sidi-Ben-Abbas était, selon la légende, un marabout d'Alger fort célèbre ; on prétend cependant qu'ayant passé la mer il se rendit en Europe où il embrassa la religion catholique. Les Maures assurent qu'aussitôt avoir mis, pied à terre il bénit à jamais la mer et la rendit par-là plus facile à la navigation.

                 Pendant tout le temps que s'accomplissent ces bizarres pratiques, juifs, Maures, Arabes, nègres, sont paisiblement côte à côte. Point de dissentiment, point de trouble ; c'est le même recueillement qu'en un lieu saint.
                 En religion, les hommes diffèrent ; en superstition, il y a confraternité générale.
                 Le matelot à son bord, le soldat dans les camps, l'enfant dans son berceau, chacun a les siennes. Partout des préjugés, partout des erreurs, et, en changeant de ciel, on ne fait souvent que changer de rêve.
                 Les Maures et les Arabes ont une grande foi dans les talismans. Quand ils les leur distribuent, les marabouts ont soin de spécifier les maux et les dangers dont ils doivent les garantir. A l'époque où se répandit le bruit de la mort du bey de Constantine, des juifs à qui on en parlait répondirent : " Cela n'est pas possible parce qu'il était invulnérable. Le plomb ne pouvait l'atteindre ". Puis ils ajoutèrent : " Il est vrai qu'il peut avoir été tué d'un coup de sabre ".

                 Les juifs s'abstiennent de boire de l'eau pendant une heure ou deux à certains mois de l'année ; ils donnent pour raison à cet usage que l'ange qui préside aux eaux est changé à ces époques, et que, si on a le malheur d'en boire au moment où le premier ange est parti et avant l'arrivée de son successeur, les chairs s'enflent et se crevassent, et qu'on finit par mourir dans les plus vives douleurs. Ils prétendent même, que, si l'on observe l'eau avec attention, on la trouve opaque et troublée à l'instant où l'ange en sort.

                 Plusieurs fixent un fer à cheval à l'une des colonnes des maisons qu'ils habitent ; c'est dans le but, disent-ils, de se garantir des effets pernicieux du regard des étrangers. C'est pour cette raison, sans doute, qu'on l'invoque encore dans cette prière.

                 Plusieurs fixent un fer à cheval à l'une des colonnes des maisons qu'ils habitent ; c'est dans le but, disent-ils, de se garantir des effets pernicieux du regard des étrangers. Ils sont dans la croyance que, si l'individu qui entre dans une maison s'arrête quelque temps pour l'examiner, elle est frappée d'un sort, et qu'on doit s'attendre à quelque malheur.

                 M. Genty de Bussy (1793-1867) fut intendant civil de 1832 à 1835 en Algérie, avant d'occuper d'autres postes en France. Son œuvre en deux tomes fut publiée en 1834, puis, considérablement augmentée, en 1839, le titre complet :
                 De l'établissement des Français dans la Régence d'Alger et des moyens d'en assurer la prospérité.

De l'établissement des Français dans la Régence d'Alger
par M. Genty de Bussy, cité par Arsène Berteuil
Dans L'Algérie française. Tome deux. Édition 1856.


Impressions de voyage de deux enseignants
Envoyé par M. Christian Graille
Dans l'Algérie de 1930

                  Les impressions de voyage des enseignants, consignées dans leur rapport destiné à l'Administration que nous avons brièvement évoqué, reflètent en grande partie le sentiment général et global de satisfaction exprimé par les visiteurs.
                 La découverte du pays les a surpris, interpellés ; les interrogations ont été constantes et nombreuses. La France est magnifiée, la flamme patriotique s'embrase de mille feux.

                 Cependant afin d'avoir un éclairage plus précis et peut-être plus complet, il nous a paru judicieux de publier des extraits des témoignages de deux d'entre eux, Monsieur Foiret et Mademoiselle Main.
                 Tout d'abord, il faut louer la prudence de Monsieur Foiret :
                 " J'ai cru bien de n'écrire rien au sujet de l'Algérie qui aurait pu me paraître définitif avant qu'une rentrée dans une civilisation différente, dans un climat tout autre, dans l'activité normale de mes cours m'ait involontairement apporté un peu de recul indispensable pour oser un jugement, des appréciations, un rapport en un mot sur ce que j'ai pu voir et ce que je crois pouvoir tirer d'utile, en vue de mon enseignement, d'une semblable excursion ".

                 Etant fort économe il a pu rester plus de quinze jours en Algérie.
                 " De Paris à Alger, un voyage en troisième classe revient, faux-frais à part, à huit cents francs. Cent francs de vie et de frais de déplacements par jour sont un minimum.
                 Le panorama de Marseille, du Cap Couronne au Cap Croisette, quand il se trouve par le travers du Planie, est peut-être plus grandiose, plus grec aussi d'allure certainement que le panorama d'Alger au premier contact.
                 Mais la grande rade africaine, pour qui regarde, pour la première fois dans sa vie, la courbe qui s'incline du pied de Notre-Dame d'Afrique à Matifou, vaut sa mondiale renommée. Alger la blanche, autour du bloc de craie de la Kasba, étale dans le vert méditerranéen des jardins, des pins maritimes et des palmiers les nouvelles Alger non moins blanches de Saint-Eugène, de Mustapha, d'Hussein-Dey, du Fort-de-l'Eau, aux limites même de l'horizon.

                 Pour l'Européen non averti, c'est très beau, vraiment puissant mais assez normal. Pour le même, après quinze jours d'Algérie, c'est bien plus joli. " Saluant cette rade à son départ, il comprend mieux quelle synthèse de l'effort, quelle synthèse du génie français " …la grande Alger en est l'image, à l'entrée de l'Afrique du Nord, où jamais conquérant n'a mieux inscrit sa volonté calme et forte ".
                 Et voici le programme du professeur en voyages d'études.
                 " Je voulais, en géographie physique et en même temps humaine si possible et économique, me donner une idée des parties constitutives principales de l'Afrique du Nord, puis voir d'un peu près le résumé de son activité commerciale par la vie de ses ports, enfin, par ses grandes villes du passé et surtout par ses grandes villes du présent, sentir la condensation de l'effort.

                 En géographie physique, des merveilles. En montagnes surtout, soit que j'aie franchi le Djurdjura d'ouest en est, soit que j'aie escaladé l'Atlas tellien du sud au nord, j'ai partout été frappé par les exemples, multipliés à l'infini, de cas morphologiques parfaits pour l'œil. Dans ce pays à végétation restreinte, l'érosion fluviale a donné au relief un modelé d'une précision dans les formes qui tient du miracle. En Savoie, peut-être et en moins grand nombre certainement, j'ai vu en peu de kilomètres autant de cas de torrents, cônes de déjections, phénomènes de rampement, cas de capture, méandres à évolutions variées, traces précises de cycles successifs d'érosion dans le même talweg, etc … etc.
                 Où est l'éditeur de photographies qui glanera ces richesses pour nos élèves ?

                 Dans les hauts-plateaux, paysages tout autres. Le terrain qui, dès le lever du jour, prend la teinte dite couleur " peau de lion " semble partout avide d'eau.
                 De Bou-Saâda à Tablât par exemple, les hauts-plateaux nous offrent plus de cent kilomètres de large et paraissent plutôt une série de bassins fermés dont celui du Hodna est le type. Néanmoins, l'ensemble est remarquablement tabulaire et la sécheresse progressive est marquée vers le Sud avec une netteté rigoureuse. On longe bien l'extrémité orientale de " la mer d'alfa " et les terrains à pâture des chameaux à l'élevage. Entre la route et les méandres d'un oued à sec, on a bien quelques dépôts d'alfa, mais si on met pied à terre le sol brûle les semelles.

                 L'alfa lui-même paraît rôti, ses touffes poussent en association ouverte et on se demande quel plaisir tel chameau qui vous promenait hier pouvait trouver en enveloppant les feuilles sèches et âpres d'un coup de langue et de mâchoires, rappelant un coup de faux ".
                 L'observation de la vie indigène fournit à M. Foiret cette jolie notation d'une scène campagnarde :
                 " Ceux qui paraissent travailler dans ce groupe, ce sont les enfants. A la tête des caravanes d'ânes bas sur pattes, mais jolis de ligne, l'air à la fois mutin et bonne bête, ils transportent en des couffins-bâts de la terre, des légumes, du bois, des poteries. On tire l'animal par la queue, par les oreilles, à coups de trique sur le cou. On le précipite dans le fossé de la route à la moindre auto. On l'y pousse à pleines mains sur la croupe, il obéit, il a l'habitude. Parfois un peu nerveux, il se couche sur le flanc, sans souci de sa charge. C'est alors le drame. Bras en l'air, on l'adjure à grands cris, puis on le remet sur ses pattes et on repart en gesticulant ".

                 Sur la reconquête de la terre par l'indigène nous trouvons l'intéressante notation suivante :
                 " Entre Alger et Bougie, déjà 70 % des terres sont aux mains des Indigènes qui la reconquièrent ainsi avec l'âpreté du Normand. On m'a dit sur place, à Tankre, que dans trente ans la Kabylie serait aux Kabyles et que leur cher désir est d'y être seuls, comme toujours depuis trois mille ans ".

                 Considéré à Bou-Saâda comme une sorte de Marabout, notre voyageur a été comblé d'attentions : " Le soir, on m'a adjuré d'accepter le couscous et devant ma réelle émotion, à la séparation, c'est de toute sincérité qu'on m'a dit : " Nous avons grand honneur à être Français ! Nous avons montré ici toute notre vie intime, depuis nos jardins de palmeraie jusqu'à notre intérieur où vous avez été admis, en passant par nos mosquées. Nous ne saurions mieux faire. Mais nous sommes ceux qui veillent sur votre compatriote, le peintre Dinet, dont voici la maison, dont voici la tombe musulmane, dont, dites-vous, votre mère a connu la famille. Pour nous, vous êtes la même image. Vous promettez de revenir ici parce que vous êtes ému …Eh bien ! Inch'Allah ! Qu'Allah le veuille ! ". J'étais en veston, eux en burnous, ils venaient de me faire entendre, place du marché, le conteur arabe récitant à trois cents auditeurs de pierre un de ces interminables épisodes des Mille et une Nuits. Au ciel d'un bleu cru, les astres avaient des reflets élastiques. Je respirais, au pied de l'Aurès, l'air du Sahara et en nous serrant la main nous étions franchement d'une même patrie ".

                 Relevons aussi la pénétrante comparaison entre la colonisation romaine telle qu'on peut l'envisager par l'examen des ruines de Djamila et la colonisation française plus humaine.
                 Dans l'Antiquité en effet, " les Indigènes sont menés durement, on les emploie à la voirie, aux aqueducs, à la maçonnerie, à l'exploitation fermière. Rome installée en Afrique travaille pour son seul profit et ne colonise pas ".
                 Nous ferons nôtre, enfin, le vœu que M. Foiret exprime en terminant ce travail :
                 " Puisse le hasard et les volontés supérieures songer un instant que deux cents professeurs visitant une colonie c'est deux cents ambassadeurs pro français qu'on institue ipso facto et vingt mille élèves dressés à flairer l'héroïsme de leur race au-delà de tous les océans.
                 Le Centenaire a été une occasion, il faudrait en faire un procédé : éduquer les éducateurs, les aider à voir, à faire voir, c'est une moisson que le pays verrait mûrir dans vingt ans et qui serait peut-être un des meilleurs liens de l'Empire français ". Nous empruntons avec plus de discrétion quelques passages du rapport de Mlle Main.

                 Cette vision de Constantine d'abord :
                 " Nulle part en Algérie, le contraste ne m'a paru plus frappant entre le passé et le présent. Dans l'un des ponts regardant la ville, on a à droite l'antique quartier arabe et le tortueux quartier juif : petites maisons carrées, tassées, aveugles, ruelles étroites aux marches usées, aux recoins noirâtres ; à gauche se dressent des constructions neuves, blanches, éclatantes, gratte-ciels aux multiples étages, hôtels ou maisons de rapport aux façades ultra-modernes ".
                 Et les visions des pays du sud, de Biskra à El Kantara :
                 " Nous étions partis à l'aube, le soleil se levait à peine sur cette terre d'un blond pâle, inconnu chez nous, le ciel était d'un bleu tendre irisé de mauve et d'or fin, tandis que les montagnes régulières, d'une limpidité de rêve, dessinaient à l'horizon une ligne à peine plus foncée.

                 Dans ce cadre magnifique la vie nomade s'est révélée soudain par l'arrivée de nombreuses caravanes, venant du nord et marchant vers les oasis : chameaux bruns portant les tentes, les tapis, les sacs, les marmots, voire les poulets et les chats, troupeaux de moutons effarés et confus. Arabes à ânes et Arabes à pied le fusil en bandoulière et dirigeant la colonne en désordre ; vision du monde si nouvelle pour moi, si différente de notre France et si antique avec cela que j'ai été saisie par sa grandeur ".

                 Nous transcrirons aussi avec plaisir cette méditation sur le port de Bougie :
                 " C'est un des plus beaux coins de la terre algérienne qu'il nous ait été donné d'apercevoir. On songe, malgré soi, à la Côte d'Azur qui lui fait face en France, à la gloire du golfe Juan ou à la splendeur du cap Ferrat. Que manque-t-il à Bougie pour être une autre Cannes ou une autre Villefranche ? La baie de Bougie allonge sa courbe aisée entre le Cap Carbon à l'ouest et les bleus festons de la Kabylie à l'est. La mer y est d'un bleu d'azur et le petit port étage ses maisons serrées sur une pente rapide. En bas, la Porte Sarrazine reste le témoin du passé.

                 La promenade du Cap Carbon offre, plus haut, ses verdures variées d'oliviers antiques et d'eucalyptus aux plumages retombants. A un niveau plus bas, tout près de l'eau, un sentier court au bord de la falaise. Mais pour l'atteindre, ce sentier, ou plutôt cet étroit passage, creusé au vif de la roche, il faut traverser la zone de travail. Bruit sourd des machines, hautes usines aux fenêtres obstruées de poussière : c'est une exploitation de chaux dont la poudre impalpable flotte jusque sur l'eau toute proche. Plus loin un travail gigantesque s'accomplit, des rails courent le long du Cap, non seulement jusqu'au littoral, mais sur une jetée nouvellement construite et pour former un nouveau bassin. Le Cap laisse voir une blessure géante, une formidable entaille à son flanc, le gris blanchâtre de sa masse calcaire fait place à une couleur plus chaude et plus vive, d'énormes blocs s'amoncellent dans cette carrière. D'autres sont vivement conduits en wagonnets vers un bâtiment où un moteur les perfore avec bruit, puis à l'extrémité de la jetée qui longe le Cap vers l'est. Ce sera le nouveau port, auquel est lié un grand espoir de développement commercial. Il a fallu, me dit-on, six galeries souterraines et trente-cinq tonnes d'explosifs pour faire sauter cette masse de rochers.

                 Et ensuite, le port créé, il faudra une ligne de chemin de fer vers Sétif, pour servir de débouché aux céréales et aux vins. Encore des rochers à perforer, bien sûr …
                 Tandis que la mer clapote doucement et prend au couchant les couleurs les plus tendres, le martèlement impitoyable des perforateurs, le bruit sourd des moteurs et le grincement de la petite locomotive forment une autre symphonie, la nôtre ".
                 Tout serait à citer dans cette passionnante relation mais il faut se borner.
                 La lecture de tant d'excellents rapports pleins d'observations justes, quelquefois profondes et joliment dites, nous porte à faire nôtre le vœu de Mlle Desmarquet, professeur au lycée du Puy : qu'il soit organisé tous les ans dans l'enseignement secondaire des " excursions coloniales comme celles qui existent pour l'enseignement supérieur ".

LES CAHIERS DU CENTENAIRE DE L'ALGÉRIE 1930
(cahier complémentaire)
L'ALGÉRIE DU CENTENAIRE
VUE PAR L'UNIVERSITÉ DE FRANCE
par Monsieur Ronze professeur au lycée Louis-le-Grand
Extraits des rapports de Monsieur Foiret et Mademoiselle Main


Rapport sur Alger
Envoyé par M. Christian Graille
Remis à son Excellence le comte Chabrol de Crouzol,
Pair de France,
Ministre de la Marine et des Colonies,
Le 21 septembre 1827, par le capitaine de frégate A. Dupetit-Thouars.
                
Paris 20 septembre 1827
.
                 Monseigneur,

                 Je vais essayer de répondre à la confiance dont Votre Excellence a bien voulu m'honorer en daignant me demander mon opinion sur les moyens que je crois propres à amener la réduction d'Alger, dans l'hypothèse où il entrerait dans les vues du gouvernement d'agir contre cette place avec une armée combinée de terre et de mer.

                 Il est hors de mon sujet d'entretenir Votre Excellence :
                 - des nombreux griefs de la France contre Alger,
                 - de la grande publicité qu'a eue la demande de réparation formée par le gouvernement,
                 - de la réponse qui y a été faite par le Dey,
                 - enfin de l'attente inquiète de tous les États barbaresques sur les suites de la rupture de la France avec Alger.
                 Je prie Votre Excellence de me permettre d'examiner par quels différents moyens on pourrait penser à amener la Régence à faire à la France les réparations auxquelles elle a droit de prétendre.

                 1° La première idée qui se présente naturellement est celle d'avoir recours à l'intervention de la Porte ottomane, mais cette voie, dont le résultat serait aussi long à obtenir qu'incertain, convient peu à la dignité de la France, qui semblerait renoncer par ce fait à un de ses privilèges stipulés dans les capitulations avec la Porte qui est de châtier la Régence d'Alger toutes les fois qu'elle croira devoir le faire.

                 2° On ne peut penser qu'un blocus, quelque rigoureux qu'il puisse être, amène les Algériens à des concessions. Ils n'ont aucun commerce maritime par bâtiments nationaux, fort peu ou point par navires étrangers ; leurs grands bâtiments de guerre ne sortiront pas ; mais, en tout cas, ils ne sont guère à craindre. Rencontrés par nos vaisseaux, ils seraient bientôt pris. Il n'en est pas de même des bateaux qu'ils peuvent armer : ces petits bâtiments sont les plus dangereux pour le commerce ; inaperçus, n'ayant ni œuvres-mortes ( Parties émergées d'un navire) ni gréement, ils peuvent facilement tromper la vigilance des croiseurs en se glissant le long des rochers pendant la nuit, pour tomber ensuite à l'improviste sur les bâtiments qu'ils reconnaissent n'être point armés. Quand ils sont chassés, et dans les mauvais temps, ils se réfugient partout dans les roches ; dans les temps de calme, avec leurs avirons, ils trouvent encore un moyen de se soustraire aux chasses qui peuvent leur être données.
                 Cependant un blocus bien fait avec des bateaux à vapeur armés qui parcourraient la côte en sens opposé, de l'Est à l'Ouest, et vice versa, rendrait la course algérienne infructueuse.
                 Ce serait à tort que l'on compterait lasser leur patience : l'état de guerre est l'état de vie pour les Algériens ; ils ne reçoivent de rations que pendant ce temps seulement et la course est la seule ressource d'un peuple qui n'est ni industrieux ni agricole. La Régence aussi n'en a pas moins besoin : l'impôt levé chaque année s'élève à peine à six millions de francs, tandis que les dépenses dépassent huit millions : la différence est puisée dans le trésor de la Régence, et c'est toujours à regret qu'elle se voit forcée d'y recourir.
                 Une émeute ne peut plus avoir dans Alger le même résultat que par le passé depuis que le Dey a quitté le palais intérieur de la ville, pour établir sa résidence dans la citadelle de la casbah qui domine la ville.
                 Après la proposition faite à plusieurs reprises dans le Conseil de la Régence de déclarer inopinément la guerre aux États-Unis d'Amérique et à la Hollande à la fois, proposition qui n'a été repoussée que par les objections faites sur le peu de commerce que ces deux puissances font dans la Méditerranée et le peu de produits qu'en retirerait la Régence, il est probable que les insultes faites à la France n'ont pas été irréfléchies, et cette opinion est d'autant plus fondée, que leur confiance dans leur force et leur supériorité est imaginable. Elle se base sur leur profonde ignorance, sur le mépris qu'ils font des chrétiens, et principalement sur leurs dernières affaires avec la Grande - Bretagne.

                 3° Il paraît démontré par le résultat de l'expédition de Lord Exmouth, en 1816, qu'une attaque de vive force contre la ville par une escadre n'obtiendrait aucun succès ; car, lors de cette expédition, quoique tous les vaisseaux eussent eu la facilité de se placer sans être inquiétés, après une canonnade de dix heures consécutives faite par six vaisseaux et dix-sept frégates ou corvettes, le seul vaisseau qui ait fait éprouver aux Algériens une perte notable fut celui de l'amiral qui s'était placé à l'embouchure du port, d'où il foudroyait les quais qui étaient couverts de monde ainsi que les batteries de la Marine qu'il prenait à revers. Plusieurs des bâtiments de l'armée combinée furent très maltraités, et quoiqu'ils eussent fait un feu aussi bien nourri que dirigé, à peine endommagèrent-ils les forts et les batteries.
                 On sait que le Dey ne céda alors qu'une émeute qui eut lieu.

                 De nouvelles fortifications formidables ont été construites depuis les positions reconnues les plus faibles, et des fours à boulets rouges ont été établis sur plusieurs points.
                 Un bombardement bien dirigé, appuyé par quelques frégates et deux ou trois brûlots ( Navire chargé de produits incendiaires destinés à détruire les flottes ennemies) explosion, sans entraîner à des dépenses considérables, amènerait peut-être la Régence à traiter et à faire des réparations, surtout si l'on concédait quelque chose de la rigueur de celles qu'on a demandées.
                 Mais en supposant qu'on obtînt ce succès, ce qu'on ne peut regarder comme certain lorsqu'on se rappelle que les Espagnols, en 1783, bombardèrent infructueusement Alger pendant neuf jours, avec quarante bâtiments, il n'aurait pour résultat que de replacer les choses sur le pied où elles étaient avant la rupture ; leur confiance dans leurs forces n'en serait pas moins grande et on serait toujours à la veille d'être obligé de recommencer.

                 Une expédition combinée de terre et de mer paraît être le seul moyen infaillible d'obtenir une réparation aussi éclatante qu'honorable pour le gouvernement. Le résultat en serait immense :
                 - il détruirait ce dernier repaire de la piraterie,
                 - affranchirait toute la chrétienté de tributs humiliants que les petites puissances n'acquittent, en quelque sorte, qu'à la honte de l'Europe entière,
                 - enfin un long et glorieux souvenir historique récompenserait la France de ce bienfait. Cette expédition, qui, au premier aperçu, effraye l'imagination perd beaucoup de ses difficultés à l'examen. Il y a, dans tous les États de la Régence d'Alger, 8.000 Turcs dont 6.000 en état de porter les armes ; 2.000 sont employés dans les places d'Oran, Bône et Constantine. Restent sous les armes à Alger 2.000 Turcs.

                 Pour composer l'infanterie et armer les batteries :
                 - 4.000 Turcs
                 - 8.000 Koul-Oglou dont 6.000 enrégimentés dans les artilleurs
                 - 6.000 Koul-Oglou (Enfant né de l'union d'un Turc et d'une femme indigène)
                 - 8.000 Arabes enrégimentés formant la cavalerie et composant le camp de l'Aga 8.000 Arabes
                 Il est à présumer qu'à ces forces connues se joindraient une assez grande quantité d'Arabes du dehors, qui se présenteraient plutôt par crainte des vengeances ultérieures du Dey que par fanatisme pour défendre le territoire ; il n'en existe aucun parmi les Arabes. Portant leur nombre à 12.000 cela ferait un effectif de 30.000 hommes, dont 10.000, c'est-à-dire les Turcs et les Koul-Oglou, ne sortiraient pas d'Alger ; il resterait donc 20.000 hommes pour défendre la ville par terre, mais 20.000 hommes indisciplinés, sans tactique et dont le nombre même nuit à la force.

                 On ne peut se dissimuler cependant qu'à ces troupes pourraient se joindre encore les camps de Beys de Constantine et d'Oran, tous composés d'Arabes ; mais il serait facile de les tenir éloignés en employant une diversion.

                 Si nous nous emparions trois semaines à l'avance de Bône, les Algériens supposeraient naturellement que ce coup est le seul que nous aurions l'intention de porter pour nous rétablir dans les concessions de pêche ; peut-être même dégarniraient-ils Alger ; mais dans tous les cas, et à coup sûr, tous les efforts du Bey de Constantine seraient dirigés de ce côté.
                 On pourrait également faire diversion de deux côtés à la fois sur Bône et Oran ; cependant une seule diversion sur Bône aurait plus d'effet.
                 En admettant toutes les chances défavorables réunies contre nous, le maximum des forces que l'on pourrait rencontrer serait 35 à 40.000 hommes, et en calculant sur un débarquement de 25.000 hommes de troupes régulières, dont 1.200 à 1.500 chevaux de cavalerie légère, avec un parc d'artillerie de campagne, et tout ce qui est nécessaire pour une opération semblable, on serait assuré du succès le plus complet.
                 Ce n'est point ici le lieu d'établir les facilités qu'offre la côte pour un débarquement, ni l'excellence des points d'appui pour la retraite, pour les dépôts de vivres et les munitions, pour les communications, etc.

                 L'armée navale n'étant destinée qu'à canonner la place et à bombarder pour occuper les batteries et y retenir les canonniers, il n'est pas nécessaire qu'elle soit nombreuse. Elle devra aussi être employée à transporter une partie des troupes de débarquement qu'elle versera sur les bâtiments de la division de débarquement avant l'action générale ; car, dans l'intérêt de l'expédition, pour assurer la réunion de tous les bâtiments à point nommé, les maintenir ralliés pendant le mauvais temps (si on en éprouve), et éviter cette espèce de confusion qui résulte inévitablement d'une trop grande affluence de bâtiments de commerce, souvent assez mal armés et mauvais marcheurs, il serait très important que le transport de l'armée pût être fait par des bâtiments de guerre armés en flûte (Vivres et munitions portés par de gros navires. Ils sont dépendants du matériel à embarquer, de la force de l'une et de l'autre des divisions de débarquement, ainsi que des modifications qu'on jugera utiles d'y apporter.). Les frais de l'expédition ne seraient pas du moins en pure perte pour la marine.

                 Dans la supposition du transport des troupes par les bâtiments du roi, l'escadre pourrait être divisée en trois : une division d'attaque et deux divisions de débarquement, l'une destinée pour l'Ouest, à la pointe de Sidi-Ferruch, et l'autre pour la baie d'Alger, où elle opérerait son débarquement sur la rive droite de l'Arach.
                 Ces deux divisions en protégeant le débarquement par leurs batteries, ne s'occuperaient qu'à l'effectuer avec tout l'ordre et toute la célérité possibles.
                 Chacune d'elles serait composée de bâtiments destinés spécialement et munis d'avance de tous les moyens de guerre nécessaires à chacune des colonnes de l'armée qu'elle porterait.
                 Je pense qu'il serait inutile que la colonne destinée pour l4Ouest fût la plus nombreuse par la raison que le débarquement dans cette partie est plus facile, que la route pour gagner les hauteurs d'Alger est meilleure et beaucoup plus courte. Elle pourrait être, par exemple, de 15.000 hommes tandis que l'autre ne serait que de 10.000.
                 A un signal convenu, les trois divisions de l'escadre pourraient être disposées à l'avance, agir simultanément ; les brûlots lancés dès le commencement de l'action auraient vraisemblablement pour résultat de jeter la consternation dans la place et parmi les Arabes s'ils n'avaient même une plus grande efficacité ; mais il est en tout cas douteux qu'ils puissent ébranler par la commotion des batteries assises sur le roc vif et construites avec des murs de 20 à 30 pieds d'épaisseur et en pierres de granit.

                 Les vaisseaux, frégates, flûtes et autres bâtiments de l'expédition seraient nécessairement approvisionnés d'un plus grand nombre d'embarcations que d'usage, les bateaux à vapeur seraient de la plus grande utilité pour accélérer le batelage.
                 Je ne crois pas, Monseigneur, devoir entrer dans les détails de cet armement. Si ce rapport abrégé nécessitait quelques éclaircissements, je m'empresserais de les donner à Votre Excellence.
                 Je suis, etc.

                 Pour copie conforme à mon projet de 1827.
Le capitaine de frégate,
A. Dupetit-Thouars.

                 J'ai remis ce projet à M. le comte de Chabrol, ministre de la marine, lorsque je fus envoyé à Alger, en 1827, pour donner des renseignements sur le blocus. Ce projet d'expédition a été lu et examiné en conseil présidé par le roi. Il fut alors apprécié très favorablement pour moi.

Histoire de la conquête d'Alger
écrite sur des documents inédits et authentiques
par M. Alfred Nettement
Nouvelle édition revue et corrigée 1867

Hiérarchie catholique...
Envoyé par Mme Eliane

         Que ces Messieurs du Vatican refusent obstinément l'ordination de femmes ?

         Quatre hommes et une femme, tous catholiques, prennent le café sur la place Saint-Pierre à Rome.
         Le 1° homme dit à ses amis :
         - Mon fils est prêtre. Quand il entre dans une pièce, tout le monde lui dit "Mon Père"
         Le 2° susurre :
         - Mon frère est évêque. Quand il entre dans une pièce, les gens lui disent "Monseigneur"
         Le 3° réplique :
         - Mon cousin est cardinal. Quand il entre dans une pièce, chacun s'incline et dit "Votre Éminence".
         Le 4° assène, sur un ton définitif :
         - Mon oncle est le pape. Quand il entre dans une pièce, les gens l'appellent "Votre Sainteté" !

         La femme catholique sirotait son café en silence...
         Les 4 hommes lui demandèrent alors avec ironie :
         -"Et vous ?".
         Elle répondit avec un fin sourire :
         - J'ai une fille, Mince - Grande - 95 cm de tour de poitrine - 60 cm de tour de taille - 90 cm de hanches
         Et quand elle entre quelque part, les hommes disent :
         "Mon Dieu" !



HISTOIRE DE BÔNE
PAR RENE BOUYAC
Contrôleur civil suppléant Interprète militaire hors cadre
Source Gallica

PREMIÈRE PARTIE
HIPPONE ET BONE
DEPUIS LEUR FONDATION
Jusqu'en 1830

         PREFACE

        Le public me pardonnera mon audace en faveur de l'intention.
        J'ai pensé que la coquette cité, qui venait de donner à l'Algérie et à la France un témoignage de sa vitalité et surtout de la solidarité de ses enfants, serait heureuse d'avoir, tout comme une princesse, son arbre généalogique.
        En livrant ce modeste travail au lecteur, je n'ai pas eu la prétention de dévoiler des faits inconnus, je n'ai voulu que former un tout des documents, hélas ! Trop rares, relatifs au passé de Bône, et tombés sous mes yeux au cours de mes recherches. Chaque fois que je l'ai pu, à mon récit, j'ai substitué celui des témoins oculaires ou les rapports des contemporains, estimant qu'en histoire il n'y a que des documents : " Sparsa-Colligo ", a dit M. l'interprète principal Feraud, dans ses différentes histoires des villes de l'Algérie. Telle a été ma devise.
        Qu'il me soit permis, en terminant ces lignes, d'adresser ici un public témoignage de reconnaissance à ceux qui m'ont aidé de leurs conseils et de leurs encouragements.
        A mon excellent chef M. le Général Noëllat, à M. Bertagna, maire de la ville de Bône, à M. Doublet, dont la vieille expérience m'a été si précieuse et m'a si puissamment aidé dans des recherches souvent ingrates, à M. Papier, le savant président de l'Académie d'Hippone, à tous, je dis : Merci !
        Bône, 1er septembre 1890.

        CHAPITRE 1er
Les Phéniciens. - Leurs colonies. - Fondation d'Hippone. - Origine de ce nom. - Domination carthaginoise. - Hippone, résidence des princes Numides. - Domination romaine. - Saint Augustin. - Prise et destruction d'Hippone par les Vandales. - Leur domination. - Période gréco-bysantine.

        Sur les rives occidentales de l'Asie, que baignent les flots de la Méditerranée, vint s'établir, dès la plus haute antiquité, une tribu chananéenne chassée des steppes de l'intérieur par une invasion étrangère (Probablement celle des Arias Japhétiques, vers le XXIVe siècle avant notre ère.)
        Entourée de puissants voisins, acculée à la mer par les chaînes du Liban et de l'Anti-Liban, cette peuplade, qui ne pouvait demander à un sol aride l'existence de ses habitants, dut chercher une issue à son activité. La mer lui offrait un vaste champ d'exploration. Les premiers essais furent timides, mais, bientôt, de hardis navigateurs osèrent perdre de vue le rivage et s'élancer à l'inconnu.
        L'antiquité nous a conservé l'histoire merveilleuse du petit peuple qui, sous le nom de Phéniciens, a su conquérir et conserver pendant plusieurs siècles l'empire de la Méditerranée et monopoliser à son profit le commerce du monde entier.

        Les Phéniciens ne pouvaient et ne voulaient faire de conquêtes militaires. De simples comptoirs, où venaient s'entasser les produits des régions qu'ils découvraient, suffisaient à leur ambition de marchands. C'est ainsi qu'ils s'étendirent progressivement sur les rives de la Méditerranée et arrivèrent en Afrique, où ils firent leur apparition vers le milieu du XIe siècle avant notre ère. C'est à cette époque qu'on peut, sans témérité, faire remonter la fondation d'Hippo, devenue plus tard Hippo-Regius et Bône.
        Les uns ont vu, dans la situation géographique de l'établissement phénicien, l'explication du mot Hippo, altération du mot phénicien Ubbon, golfe. M. Melix fait remonter l'origine du mot Hippo au mot phénicien Ipo, en hébreu Ipa, qui signifie beau, joli, et qui aurait été donné à ce point du littoral par les Phéniciens émerveillés de la beauté du site. D'autres, enfin, s'appuient sur le passage suivant de Ptolémée pour le faire venir du mot grec : cheval.

        Hippo, dit Ptolémée (XX-157), était une colonie de Tyr. Son nom est d'origine phénicienne. Il est possible que cette ville ait été fondée par les habitants d'Hippo-Zaritus (Bizerte), ce qui lui aurait fait donner par les Grecs le nom d'Hippou-Akra que portait chez eux cette dernière place.
        Que fut le comptoir d'Hippone pendant la période phénicienne ? ( Voir à ce sujet l'ouvrage intitulé : " Lettres sur Hippone ", de M. Papier)
        L'histoire a laissé des documents qui, bien que communs à tous les établissements de ce genre, permettent d'en appliquer à chacun les détails. Hippone, d'abord simple escale, reçut bientôt de la métropole des agents chargés de veiller aux échanges et à l'emmagasinement des produits qu'apportaient les caravanes de l'intérieur et que les galères phéniciennes venaient enlever à époque fixe. Ces employés, en abandonnant la mère-patrie, s'embarquèrent avec leurs familles, et formèrent le noyau d'une population rapidement accrue de quelques naturels du pays qui vinrent s'établir auprès d'elle pour lui fournir les denrées nécessaires à son alimentation.

        Vers 888, avant J.C, à la suite de dissensions politiques, une foule de mécontents abandonnèrent la Phénicie et, sous la conduite d'Elissa (Elissa n'est autre que la Didon, chantée par Virgile, dans Son Enéide.), débarquèrent à Byrsa, bourgade fondée par Karkédon, à l'époque de l'établissement des Phéniciens en Afrique. L'arrivée des émigrants qui avaient, pour la plupart, emporté leur fortune, transforma rapidement la bourgade primitive en une opulente cité, qui reçut le nom de son fondateur Karkédon (Carthage). L'autorité de la nouvelle colonie s'étendit en peu d'années à tous les comptoirs phéniciens. Un empire commençait. Mais pas plus que Tyr, Carthage ne voulut être une puissance militaire. Elle reprit l'œuvre de ses prédécesseurs en la développant et substitua ses flottes aux leurs. Bientôt, le monopole du commerce était passé entre ses mains.

        Carthage soumit donc les comptoirs phéniciens établis en Afrique. Elle leur appliqua le régime des villes situées sur son territoire et dont les affaires intérieures étaient administrées par un conseil de notables ; mais en raison même de cette organisation municipale, son autorité fut plus fictive que réelle, car les villes phéniciennes ne se courbèrent jamais que devant les lois sanctionnées par leurs magistrats.
        Hippone devint une petite République indépendante, s'administrant elle-même, et, de cette époque, date le commencement de sa prospérité.

        Des siècles s'écoulent. Carthage est à l'apogée de la puissance et de la gloire ; ses relations commerciales s'étendent a tout le monde connu; ses immenses palais regorgent de richesses, ses flottes innombrables sillonnent les mers. Mais en face d'elle, naît un peuple qui, sans bruit, étend sa domination sur l'Italie, et, lorsqu'il en a fait un empire déjà puissant, songe à courber le monde sous sa loi. Rome va disputer à Carthage la souveraineté universelle.
        Nous n'avons pas à retracer les phases de cette lutte gigantesque qui, durant trois siècles, ébranla le monde. Carthage tomba et, de cette immense cité, les ruines mêmes disparurent.
        Dès la première guerre punique, Carthage, humiliée, vaincue, dut courber la tête sous la lourde tutelle de Rome. Ce fut le signal de la curée; toutes les ambitions, toutes les convoitises allumées par tant de richesses se firent jour à la fois. Le faisceau des villes soumises, au moins de nom, se rompit. Chacun chercha à acquérir un débris de l'édifice qui croulait.
        Hippone, depuis longtemps, excitait le désir de Gala, roi des Massyliens ou Numides orientaux.
        La Numidie, qui comprenait le territoire actuel de la province de Constantine, était divisée entre les Massyliens à l'Est et les Massessyliens à l'Ouest.

        La position de la cité, la richesse et la beauté de ses environs, la douceur de son climat avaient attiré l'attention du roi barbare. Il jugea Hippone digne d'être sa capitale. Il n'eut pas de peine à s'en emparer, car ses habitants l'accueillirent à bras ouverts, après en avoir chassé les Carthaginois.
        Le premier chef héréditaire dont l'histoire fasse mention chez les Massyliens est Gala. Il conquit une portion de terrain sur les Carthaginois aux environs d'Hippo, probablement dans le cours de la première guerre punique. Voilà pourquoi cette ville, lors du débarquement de l'armée romaine dans la deuxième guerre punique fut appelée Hippo-Regius. (Tite Live XXIX, § 3)
        Masinissa, successeur de Gala s'était jeté dans le parti romain, tandis que Syphax, roi des Massessyliens, prenait fait et cause pour Carthage. Battu dans différentes rencontres, Masinissa rentra à Hippone pour reformer ses troupes. Il en sortit en Apprenant que Bocchor, lieutenant de Syphax, s'avançait. La rencontre eut lieu non loin de Cirta, et Masinissa, vaincu de nouveau, dut se réfugier dans les montagnes, abandonnant sa capitale aux hordes de Syphax, qui en prirent possession au nom de Carthage.

        Au début de la troisième guerre punique, une armée romaine débarqua en Afrique. Les premières opérations furent molles ; un consul, même Calpurnius Pisou, qui s'était présenté devant Hippone dans l'intention d'y replacer Masinissa, dut se retirer devant l'énergique défense des habitants (148). Scipion vint prendre le commandement suprême et appela à lui le prince numide dépossédé, qu'il considérait comme un précieux auxiliaire.
        Lorsque enfin Carthage disparut de la surface du monde, Rome ne prit sous son autorité directe que les villes puniques et le territoire qui appartenait en propre à Carthage, dont elle fit une province romaine. Puis, tout en se réservant l'autorité absolue, elle abandonna la Numidie au prince qui lui avait prêté l'appui de ses armes contre Carthage, c'est-à-dire Masinissa.
        Celui-ci mourut et le trône échut à Micipsa, seul de ses trois fils qui eût survécu. Bien que Cirta fut la capitale officielle de la Numidie, Micipsa n'en venait pas moins passer une partie de l'année à Hippone. A sa mort, il divisa son royaume entre ses deux fils Hiempsal et Adherbal, et son fils d'adoption Jugurtha. L'ambition démesurée de ce dernier n'admettait pas de partage. Hiempsal mourut assassiné. Une nouvelle division de la Numidie fut faite par des commissaires romains, entièrement gagnés à la cause de Jugurtha. La partie Est de la Numidie fut adjugée à Adherbal, qui, négligeant Cirta, fit d'Hippone sa résidence et sa capitale.
        Dans le partage de la Numidie entre les deux princes, les provinces les plus fertiles et les plus peuplées dans le voisinage de la Mauritanie furent adjugées à Jugurtha. Celles qui, par la quantité des ports et des beaux édifices avaient plus d'apparence que de ressources réelles échurent à Adherbal. (Salluste).

        Il ne tarda pas à subir le sort de son frère. Assiégé dans Cirta où il s'était réfugié, se croyant plus en sûreté, il fut pris et assassiné. Jugurtha restait ainsi le seul maître de la Numidie et Hippone devint la proie du vainqueur.
        Rome s'alarma et voulut imposer son autorité au roi numide ; la guerre éclate et ne se termine qu'au bout de sept ans par la capture de Jugurtha. La Numidie orientale fut annexée à la province romaine et le reste donné à Juba, fils d'Hiempsal.
        En Italie, la guerre civile éclate entre César et Pompée. Ce dernier, tué, ses compagnons se réfugient en Afrique auprès de Juba et de Varus, qui se sont déclarés contre César. Celui-ci accourt et écrase, à Thapsus, les rebelles. Juba, désespéré, se tue. Quintus, Metellus Scipion, un des plus fidèles partisans de Pompée, après avoir lutté comme un lion, gagne le rivage et s'embarque. Les quelques galères qui l'accompagnent rencontrent la flotte césarienne, commandée par Publius Sittitus ; elles se réfugient à Hippone, mais, vivement poursuivies, elles sont obligées d'accepter une lutte inégale. Un combat acharné eut lieu dans le port même et Scipion y trouva une mort volontaire, dit-on. Le royaume de Juba, réduit en province romaine, sous le nom d'Africa-Nova, fut placé sous l'autorité d'un proconsul, qui fut Salluste.

        Depuis longtemps, Rome avait préparé l'établissement de sa puissance en Numidie. Attirés par le renom de fertilité du sol africain, les colons italiens étaient venus s'établir en foule, les uns dans la vallée de la Medjerda, les autres dans celle de la Seybouse, aux environs d'Hippone. Sous les efforts de cette race ardente au travail, le pays se transforme et mérite bientôt le nom de Grenier de Rome. Malgré les troubles, les insurrections et les guerres dont la Numidie avait été le théâtre, Hippone n'avait cessé de s'accroître.
        Eloignée des champs de bataille où se débattait le sort de la province, elle se contentait d'admettre dans ses murs le vainqueur ou le vaincu et n'en continuait pas moins ses affaires commerciales. C'est à cette époque que des palais superbes sont construits ; des bains aux riches mosaïques et aux marbres les plus rares reçoivent chaque année les étrangers, venus en foule de tous côtés. Des aqueducs énormes amènent dans de gigantesques citernes l'eau nécessaire à la ville et aux jardins magnifiques qui lui font une ceinture de fleurs odorantes et de fruits délicieux.
        Les ruines de ces citernes, situées au pied de la basilique qui couronne aujourd'hui le mamelon d'Hippone, font encore notre admiration. On en trouvera une excellente et très complète description dans l'ouvrage de M. Papier, président de l'Académie d'Hippone. (Lettres Sur Hippone.)

        Tant d'avantages ne pouvaient échapper à l'œil exercé des Romains qui érigèrent la cité royale en " Colonia " et y nommèrent un préteur.

        Par sa position même, Hippone se trouva le centre principal d'où rayonnaient le long du littoral et dans l'intérieur du pays, ces admirables voies, dont nous retrouvons les vestiges à chaque pas.
        Nous allons indiquer rapidement les routes dont elle fut, sous la domination de Rome, le point de départ.
        Une première voie courant le long du littoral reliait la cité romaine, du côté de l'Ouest à Rusiccade (Philippeville), située à une distance de 115 milles, et du côté de l'Est à Carthage, distante de 193.
        Deux autres routes, dans l'intérieur, aboutissaient également à Carthage. La première, qui mesurait 216 milles, ne comptait pas moins de 16 stations intermédiaires. La seconde, longue de 226, passait par Thagaste.
        Enfin, deux voies mettaient en communication Hippone avec Cirta. Constantine). La première passait par Villa-Serviliana (maison de plaisance de la famille Servillia), Aqua-Tibilitame (Hamman-Berda) et se terminait à Constantine après un développement de 96 milles. Dans une de mes tournées dans la subdivision de Bône, me rendant à cheval de cette ville à Guelma, j'ai retrouvé entre Nechmeya et Guelaât-bou-Sba, à gauche de la route carrossable, les vestiges de cette voie, que j'ai suivie pendant quelque temps. Il en existe, du reste, de nombreuses traces aux environs mêmes de Bône

        La seconde, longue de 243, partait d'Hippone et passait à Plombaria, dont les ruines doivent se trouver au S.-E. du lac Fezzara et à Nades, dont on retrouve les débris au S.-O. du même lac, à Rusiccada-Colonia (Philippeville), Villa-Sela, Palma et aboutissait à Constantine (Le mille romain).
        Vers le IIe siècle de notre ère, le christianisme faisait son apparition en Afrique et jetait un nouvel éclat sur Hippone qui, première ville de la Numidie par ses richesses et sa splendeur, était devenue, en outre, un foyer de lumière et de civilisation. Le Christianisme y fit de rapides progrès et, dès l'an 240, nous voyons l'histoire faire mention d'un évêque d'Hippone, Théogènes. Quand éclata la persécution des chrétiens, elle fit de nombreux martyrs dans la cité royale. Les plus illustres furent Théogènes et 36 de ses frères en religion.
        Le deuxième évêque fut Fidentius, mis à mort, comme son prédécesseur, sous le Règne de Dioclétien, vers l'an 304 après J.-C. Léontius lui succéda. Mais les théories de Donat donnent naissance à une nouvelle secte, celle des Donatistes, qui ne tarde pas à se répandre sur l'Afrique. Un de ses apôtres, le plus fervent, Faustinus, remplaça sur le siège épiscopal l'évêque Léontius. Saint Augustin le dépeint comme un fanatique ardent, se laissant aller à de furieux et étranges débordements. Valerius lui succéda en 388. Possidius, le biographe de saint Augustin, fait l'éloge de cet évêque comme prêtre et comme homme.
        Nous arrivons maintenant à celui, dont les vertus et mesurait la sagesse jetèrent un si vif éclat sur la " Cité de Dieu ". Sacré prêtre par l'évêque Valerius, malgré une certaine résistance, saint Augustin fit bientôt retentir le monde chrétien de sa religieuse éloquence et l'étonna de la grandeur de ses idées philosophiques.

        A cette époque d'exaltation religieuse, les conciles se suivaient fréquemment. Le premier, qui fut tenu à Hippone, eut lieu en 393 et fut présidé par Aurélius, évêque de Carthage. Saint Augustin y assista comme simple prêtre et y prononça un discours sur la foi et le symbole. Le second eut lieu en 395. C'est au sein de cette assemblée qu'il fut désigné comme successeur de Valerius et investi de sa nouvelle dignité par Megalius, primat de Numidie. Les persécutions religieuses avaient perdu leur caractère de violence, elles se bornaient à de simples luttes oratoires, que soutenaient les évêques de l'Afrique chrétienne dans les assemblées, dont saint Augustin était l'âme. C'est alors qu'il enseignait à ses disciples la charité chrétienne, qu'il en encourageait l'application par la fondation de ces établissements dont l'idée généreuse a servi d'exemple de nos jours à un de nos prélats les plus illustres.

        Le dernier concile auquel assista saint Augustin fut celui de 426. Pouvait-il prévoir Alors que l'heure de la ruine et de la désolation allaient sonner sur l'opulente cité ? Ce philosophe chrétien, cet esprit sublime, ne voulait laisser l'œuvre grandiose à laquelle il avait consacré sa vie qu'entre les mains d'un homme digne de la comprendre et de la continuer. Aussi le vit-on, contrairement à tous les principes de l'Eglise, désigner un de ses plus fervents disciples pour lui succéder à l'heure où Dieu le rappellerait à lui. Ce fut le moine Héraclius.

        Mais les Vandales débarquent en Afrique. Semant la ruine et la mort sur leur passage, laissant un sillage de sang derrière eux, ils se dirigent vers les provinces romaines, où les appelle la trahison du comte Boniface, Gouverneur de l'Afrique. Hippone était une trop riche proie pour qu'ils passassent en la dédaignant, et les bandes barbares en prirent la direction. Cependant, le comte Boniface, comprenant trop tard l'immensité de sa faute, essaya du moins de la racheter, en défendant ceux qu'il avait livrés. En apprenant la marche des Vandales sur Hippone, il y accourut et y organisa la résistance, aidé par Aspar. Les Vandales avaient cru entrer dans la cité sans coup férir, mais lorsqu'ils se présentèrent devant la place, ils trouvèrent les remparts garnis de défenseurs.
        La colère des envahisseurs déçus dans leur espoir ne connut plus de bornes, ils se répandirent autour d'Hippone, détruisant tout ce qu'ils rencontraient ; ils interceptèrent ses communications avec la mer, afin de l'affamer et entassèrent dans la Boudjima, qui coulait sous les remparts, des cadavres d'animaux et d'hommes pour que l'air vicié et corrompu alla porter la mort parmi les défenseurs. Le siège durait déjà, depuis quelques mois. Comprenant que la ruse seule aurait raison de la courageuse cité, Genséric simula une retraite et s'éloigna.

        Boniface et Aspar, tombant dans le piège qui leur était tendu, s'élancèrent à sa poursuite, mais, surpris par des forces supérieures, ils furent complètement battus et les débris de leurs troupes eurent à peine le temps de chercher un refuge derrière les remparts. Désespérant de sauver la ville, Boniface s'embarqua de nuit et s'enfuit à Carthage, laissant les malheureux habitants, livrés à la fureur des Vandales. Pendant les quatorze mois de siège, saint Augustin n'avait cessé de prodiguer à ses concitoyens ses consolations et ses encouragements ; il n'eut pas la douleur de voir la cité tomber au pouvoir de ses ennemis. Il mourut le 5e jour des calendes de Septembre, alors qu'il répondait au livre de Julien, au milieu des tumultes du siège. Ses restes furent déposés, dans la Basilique de la Paix ( Ils y restèrent 37 ans). Hippone, abandonnée à elle-même, succomba. Ses habitants s'embarquèrent à la faveur des ténèbres de la nuit et allèrent cacher leur désespoir dans les anfractuosités de la côte. Les vainqueurs se vengèrent en barbares. Tout fut réduit en cendres ; seule, la basilique où était enseveli saint Augustin fut respectée. Sa bibliothèque que, par un hasard providentiel il avait, quelques jours avant sa mort, fait transporter dans le sanctuaire de l'église, échappa aux flammes. Ceux des habitants, qui n'avaient pas voulu abandonner leur foyer, furent massacrés ou emmenés en esclavage.

        Nous allons tenter, non de décrire Hippone, à l'époque de sa destruction, mais d'en énumérer les principales constructions . Nous, nous sommes servi pour cette description de l'excellent ouvrage de M. Papier, président de l'Académie d'Hippone, intitulé " Lettres sur Hippone ". Nous en avons retiré la plus grande partie des renseignements qui vont suivre, regrettant seulement que le cadre de cet ouvrage ne nous ait pas permis d'y faire de plus fréquents emprunts. Nous renvoyons donc le lecteur à cette oeuvre remarquable qui gagne à la lecture un charme toujours nouveau.

        L'enceinte murée dont on n'a pu retrouver les vestiges recouvrait un espace qui devait mesurer soixante hectares. La ville antique, bâtie entre la Seybouse et la Boudjima, était adossée aux deux mamelons d'Hippone, qu'elle recouvrait de ses édifices. La plus élevée de ces collines était couronnée d'un établissement fortifié, renfermant des piscines épuratoires et faisant partie du système hydraulique que complétaient des citernes gigantesques creusées dans ses flancs. Sur les ruines de cet établissement disparu, se dresse aujourd'hui le magnifique hospice des Vieillards, fondé par Mgr Lavigerie.

        Les citernes d'Hippone recevaient l'eau de l'Edough par un aqueduc dont il ne reste plus que quelques rares arcades, principalement au lieu dit Fontaine-des-Princes (Ainsi appelée à cause d'une visite que vint y faire le duc d'Aumale à son passage à Bône.), sur le sommet de l'Edough et dans la vallée du Ruisseau d'Or, sur le bord du jardin de l'Orphelinat des Sœurs.
        Un des principaux monuments dont nous ait entretenu saint Augustin est le temple de la Paix, transformé en église chrétienne, probablement sous Constantin. En 424, saint Augustin y ayant fait transporter une partie des restes de saint Etienne ; elle prit le nom de ce martyr.
        On a cru voir dans un énorme tronçon de maçonnerie antique, situé à gauche de la route si délicieusement ombragée d'Hippone et que tous les Bônois connaissent, un débris de la célèbre basilique. Sous cette ruine existe un véritable labyrinthe de couloirs qui s'étendent jusque sous la propriété de l'ancien maire, M. Dubourg, et qui seraient, dit-on, les cryptes souterraines de l'antique église.
        Deux sanctuaires dédiés, l'un à Théogènes, premier évêque d'Hippone, l'autre à Léontius, s'élevaient également dans l'enceinte fortifiée. Saint Augustin, quelque temps avant l'invasion des Vandales, avait conçu l'idée généreuse de créer un hôpital ; l'affection des habitants d'Hippone pour leur pasteur fit pleinement réussir ce projet. Infatigable, quand il s'agissait de sa ville chérie, sa cité de Dieu, il fit bientôt construire un monastère où il vivait avec ses disciples, les instruisant et les préparant au sacerdoce. Ce fut l'origine des séminaires. Il y ajouta, quelque temps après, un couvent de femmes, dont il confia la direction à sa sœur qui, devenue veuve, avait consacré sa vie à Dieu.

        Hippone renfermait de nombreux thermes dont les plus célèbres étaient ceux de Socius, dont il a été impossible jusqu'ici de déterminer l'emplacement.
        Entre les deux mamelons d'Hippone, sur le bord de la route de Guelma, se trouve une propriété appartenant à M. Chevillot. Nous y avons vu, en 1887, deux jolies mosaïques découvertes par des ouvriers. Mais ce que nous avons constaté de plus curieux, c'est la présence, à 80 ou 90 centimètres de profondeur, et sur la surface presque entière du jardin, d'un parquet fait de dalles de marbre rose dont nous avons gardé un échantillon.

        En dehors de l'enceinte et dans un des faubourgs de la ville se trouvaient deux églises, l'une dite "Advigiuti Martyres ", aux Vingt-Martyres, édifiée, nous dit saint Augustin, en souvenir du martyre de Fidentius, deuxième évêque d'Hippone, de sainte Victoire, de Saturninus, de Dativus, etc.
        Monseigneur Dupuch, évêque d'Alger, a prétendu qu'elle devait se trouver sur le lieu occupé actuellement par les marabouts de Sidi-Brahim. Cette opinion, motivée seulement par la découverte, à cette place, d'une mosaïque, ne peut être admise que comme une supposition.
        L'autre église, située à Villa-Victoriana, avait été consacrée aux martyres Gervais et Protais. Un pont, qui n'a plus de romain que ses piles, traversait la Boudjima et mettait en communication la ville avec un de ses principaux faubourgs. Le port se trouvait entre l'embouchure des deux rivières. On voyait, récemment encore, des traces de quais, dans lesquels étaient scellés d'énormes anneaux de fer.
        De tous ces édifices grandioses, de ces basiliques monumentales, de ces bains délicieux, il ne reste plus que le souvenir. Seules les citernes, bien qu'elles aient subi les rudes assauts du temps, sont un témoin encore debout de la splendeur de la célèbre cité.

        Des ruines qui devaient couvrir un espace considérable, il ne reste plus rien. Cette disparition doit être attribuée à deux causes : la première est l'enlèvement, par les Arabes, de l'invasion Hilalienne, un peu après l'époque de la fondation de la Bône actuelle, de tous les débris et matériaux qui pouvaient entrer dans l'embellissement et l'agrandissement de la nouvelle cité ; la seconde est la tendance de la Seybouse à se déplacer dans la direction de l'Ouest, ainsi que cela a été constaté par plusieurs voyageurs, à différentes époques.
        La présence de certaines constructions, complètement ensevelies aujourd'hui dans les terrains bourbeux qui avoisinent la Seybouse, les nombreuses mosaïques que vient découvrir la pioche inconsciente des ouvriers, démontrent qu'une partie des ruines de la ville antique ont été recouvertes par les couches successives de terre et de débris roulés par les eaux.

        Reprenons le cours de notre récit. Genséric, après la prise d'Hippone, avait marché sur Carthage, dont il s'était emparé et où il avait fixé le siège de son empire. Il mourut en 477 et on peut dire que l'histoire des Vandales commence et finit avec la vie de ce prince.
        Ceux qui lui succédèrent : Hunéric, Gundumund, Trasamund, amollis par une vie d'oisiveté et de délices, n'eurent plus l'énergie nécessaire pour maintenir l'intégrité de leur territoire et réprimer les attaques audacieuses des Maures. Sous ces princes, les persécutions catholiques firent de nombreuses victimes. L'avènement au trône d'Hildéric, ami de Justinien, les fit cesser, et le premier édit de ce prince ordonna la réouverture des églises catholiques. Il fit, en partie, reconstruire Hippone et y ramena les habitants qui s'étaient dispersés.

        A la suite d'une guerre contre les Maures, Gélimer, vainqueur, profita de l'enthousiasme des Vandales pour détrôner son frère, et, malgré l'intervention de Justinien, le fit enfermer dans un cloître. Justinien ne pouvait laisser impunie la révolte du roi barbare, et la guerre fut décidée.
        Bélisaire, investi du commandement suprême de l'armée byzantine, vint débarquer avec 45.000 hommes à Caput-Vada. A la déclaration de guerre, Gélimer répondit en faisant égorger Hildéric et en rappelant son frère Tzazou, qui guerroyait en Sardaigne.
        Mais la marche de Bélisaire ne fut qu'une succession de victoires, dont la dernière, celle de Tricaméron, ruina à tout jamais les espérances du roi Vandale. Gélimer dut s'enfuir presque seul en Numidie, laissant derrière lui le cadavre de Tzazou, qui n'avait pas voulu survivre à la défaite.
        Lorsque Gélimer avait senti s'amonceler sur sa tête l'orage que sa cruauté avait provoqué, il avait, en prévision d'un désastre, confié tous ses trésors à son secrétaire Boniface, en lui ordonnant de se rendre à Hippone et d'y attendre la fin des événements, lui enjoignant, au cas où le sort des armes lui serait contraire, de faire voile pour l'Espagne, où il ne tarderait pas à le rejoindre.
        Après la bataille de Tricaméron, il s'était donc dirigé en toute hâte vers Hippone, mais, vivement poursuivi par la cavalerie de Bélisaire, il dut s'enfoncer dans le Mont Pappua et s'enfermer dans la ville de Medenos " située, dit Procope, à l'extrémité S.-0. de la chaîne de montagnes qui borde la Seybouse, depuis les environs d'Hippo".

        La situation du Mont Pappua n'avait jamais été jusqu'ici fermement établie. La description de Procope a fait dire aux uns que la montagne, refuge du roi Vandale, ne pouvait être que l'Edough. M. l'interprète principal Feraud a cru la voir dans les hautes montagnes de Djidjelli (Histoire de Djidjelli),en s'autorisant d'un autre passage de Procope, qui l'indique comme se trouvant à l'extrémité de la Numidie. Enfin, M. Papier, président de l'Académie d'Hippone, dans une très intéressante brochure (Du Mont Pappua et de sa synonymie avec le Djebel-Nador.), démontre d'une manière irréfutable que le Mont Pappua n'était autre que le Djebel-Nador.
        Bélisaire, lancé à la poursuite de Gélimer, arriva à Hippone. Beaucoup de nobles Vandales avaient préféré tomber entre les mains du général grec, dont l'humanité était connue, que de suivre leur roi détrôné et soutenir une lutte qu'ils considéraient désormais comme impossible.
        Bélisaire les accueillit avec bonté et les envoya à Carthage avec leurs familles. Boniface, dont nous venons de parler, à la nouvelle du désastre du Tricameron, s'était embarqué et avait fait voile pour l'Espagne, mais, rejeté par la tempête dans le port d'Hippone, il prit la résolution de livrer les trésors dont il était le dépositaire au général victorieux.
        On voit donc que le séjour de Bélisaire à Hippone ne fut pas tout à fait inutile. Il reprit le chemin de Carthage en laissant le soin au chef des Hérules Pharas de bloquer étroitement Gélimer et de s'en emparer.

        L'empire Vandale redevint une province de l'empire d'Orient. Gélimer, pendant quatre mois, resta enfermé dans Médenos, mais, serré de près, manquant de tout, menacé par la famine, il dut se rendre et alla orner le triomphe de Bélisaire à Constantinople.
        Dans le chaos des troubles, des révoltes et des guerres civiles, dont l'Afrique fut le théâtre sous la domination gréco-byzantine, Hippone passa, tour à tour et sans résistance, aux mains du vainqueur; elle ne se releva, du reste, jamais complètement des ruines entassées par les Vandales.
        Nous allons voir les Arabes porter les premiers coups à la domination romaine, en Afrique.

A SUIVRE

        M. Graille détient un texte très dense et fort intéressant "histoire de Bône " par René Bouyac. Edition 1891.
        Ce document serait peu-être susceptible d'intéresser quelques lecteurs assidus de la Seybouse.
        Il serait prêt à le leur adresser par messagerie électronique. CONTACT


ALGER Janvier 1960
Par M. Bernard Donville

            
            Salut à tous, avec mes meilleurs vœux d'assiduité à notre histoire!
Il y a 60 ans ce fut à Alger, un mois de janvier particulièrement mouvementé. Aussi ais-je décidé d'abandonner pour ce mois, les rubriques habituelles , qui paraitraient bien insignifiantes par rapport à ce qu'Alger a connu. Je ne vous proposerai donc que la suite d'une semaine algéroise mouvementée correspondant aux "unes" de l'Echo de la semaine dite "des barricades". Vous y verrez apparaitre dès le 27 janvier, les cases blanches de la censure...J'ai prolongé jusqu'au 2 février pour traiter l'événement dans sa globalité.
'espère que cette initiative ne sera pas trop mal accueillie d'autant qu'elle vous permet de collectionner la rédaction à chaud de ce que nous avons vécu; mais je suis toujours ouvert à vos critiques!
Puis, les compléments du mois qui seront consacrés à la mort d'Albert Camus .
Amitiés
Bernard

Voir le dossier des Barricades sur :
donville-barricades.pdf


Le complément pour Albert Camus
donville-mort-de-camus.pdf



Alerte en Algérie après la réapparition du poisson lièvre
Envoyé Par M. P. Barisain

          Par Tarek Hafid
          Le poisson lièvre, espèce toxique et "impropre à la consommation", est une nouvelle fois apparu sur les côtes algériennes. Les autorités, qui ont installé une cellule de veille, se veulent cependant rassurantes.
          Le Lagocephalus sceleratus montre, une nouvelle fois, le bout de ses nageoires en Algérie. Au cours de la première quinzaine du mois de janvier, un pêcheur de la région de Damous (145 km à l'ouest d'Alger) a remonté dans ses filets un poisson lièvre de 60 cm. Cette espèce, considérée comme venimeuse, fait des apparitions sporadiques sur les côtes du pays. Confronté à ce phénomène dans un passé récent, le ministère de la Pêche et des produits halieutiques a déclenché un mécanisme d'alerte afin d'éviter que ce poisson ne se retrouve sur le marché.
          "Une cellule de veille a été installée dans tous les ports et abris de pêche du pays dès l'apparition du premier spécimen. Il est important d'alerter les professionnels de la dangerosité de ce poisson. Les pêcheurs, qui sont les premiers concernés, savent reconnaître le poisson lièvre et saisissent immédiatement les autorités portuaires. Il n'y a donc pas de raisons de s'alarmer, la situation est totalement maîtrisée", a indiqué à Sputnik Rabea Zerouki, directrice de la Pêche d'Alger.

          Il est vrai que le ministère de la Pêche avait eu à gérer une situation bien plus préoccupante durant l'hiver 2014, lorsque plusieurs spécimens de poissons lièvres avaient été pêchés au centre et à l'est du littoral algérien. Cette "crise" avait permis aux chercheurs du Centre national de recherche et de développement de la pêche et de l'aquaculture (CNRDPA) d'étudier et de mieux comprendre le Lagocephalus sceleratus.
          Dans un rapport élaboré en 2014, à la suite de la capture de poissons lièvres à El Kala et El Marsa, le CNRDPA aborde la question de la toxicité et le caractère dangereux de cette espèce.
          "Plusieurs études ont été menées pour étudier la dangerosité de cette espèce. En effet, elle ne représente aucun danger au contact ou au toucher et ne présente aucun élément de contamination par rapport aux autres espèces pêchées en même temps qu'elle. La toxicité de cette espèce est liée à ses gonades. Les gonades (mâles ou femelles) contiennent une puissante neurotoxine appelée tétrodotoxine (TTX) qui provoque des malaises et des vomissements, mais elle peut aussi occasionner des troubles plus dangereux en fonction de l'état de santé du consommateur. De ce fait, et par précaution, cette espèce est considérée comme étant dangereuse à la consommation", lit-on dans ce rapport.
          Concernant son origine, le centre de recherche indique que le poisson lièvre est une espèce lesseptienne (organismes marins migrant de la mer Rouge vers la mer Méditerranée) mais qu'il a toujours existé en Algérie. "Il est considérée comme faisant partie de l'ichtyofaune des eaux algériennes", précise le CNRDPA. L'Algérie n'est pas le seul pays méditerranéen concerné par les apparitions du Lagocephalus sceleratus. Ces dernières années, il a également été signalé en France et en Sardaigne.
          De l'autre côté de la planète, le fugu, proche cousin du poisson lièvre est quant à lui un mets très recherché. Les Japonais le consomment dans certains restaurants et sa préparation nécessite une parfaite connaissance de son anatomie. Dans le cas contraire, le festin peut se transformer en deuil.

           Tarek Hafid



LE MONT CHAUVE
De Hugues Jolivet


Eruption au coucher du soleil !

      
       Non, ce n'est pas l'Etna, ce n'est pas le Vésuve,
       Mais bien notre Mont Chauve, gardien de Falicon !
       Cette soirée de juillet, caniculaire étuve,
       M'accordait cette image du Mont en éruption !

       Une vieille légende, infondée, romanesque,
       Raconte que le Mont Chauve fut, jadis, un volcan.
       Des nuages rouge-feu, un spectacle dantesque,
       Fusent en son sommet, l'éther est suffocant !

       Ne pas baisser les yeux et saisir cet instant,
       Car l'image est fragile, fugitive et fugace.
       Garder un souvenir, une preuve attestant
       Que la légende est née d'un témoignage sagace !

Hugues Jolivet         
2 août 2017          


Ces harkis Afghans qu’on abandonne
Par M.José CASTANO,


« L’avenir, c’est la trahison des promesses » (Daniel PENNAC)

       Après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, une opération de l’OTAN fut lancée en Afghanistan dans le but « d’éradiquer le terrorisme ». La France en fit partie et envoya en 13 ans plus de 70 000 soldats dont 90 perdirent la vie.

       L’objectif avoué était d’éliminer Ben Laden, chasser les talibans de Kaboul, détruire les camps d’entraînement d’Al Qaïda et reconstituer une armée afghane. Dans cette optique, la France fit appel à des centaines d’interprètes indispensables dans la conquête du terrain, la négociation avec les chefs de tribus et l’interrogatoire des prisonniers islamistes. Ils étaient, en outre, chargés de mettre en place des barrages sur les routes, d’entrer dans les maisons des villageois, de leur demander de sortir avant que les forces françaises procèdent à des fouilles. « Les Français ne connaissent pas la culture afghane. C’était donc à l’interprète afghan d’entrer et d’avertir les occupants, surtout les femmes », explique l’un d’eux.

       Pour la plupart, ces traducteurs étaient des jeunes, éduqués, issus de la classe moyenne-supérieure que les militaires français étaient allés chercher directement dans le lycée français de Kaboul ou dans les universités.

       Quand les soldats du dispositif international quittèrent définitivement l’Afghanistan (les Français ont entamé leur retrait graduel en 2012 pour l’achever en décembre 2014), ils laissèrent derrière eux non seulement une tragique incertitude sur l’avenir du pays, mais aussi des milliers d’Afghans très inquiets pour leur propre avenir, pour leur propre vie : les interprètes… estimés à 700 quant à la partie française.

       Pour l’armée française, la question de l’avenir de ces traducteurs était d’autant plus sensible que notre histoire militaire reste marquée à jamais par la répudiation puis le massacre de milliers de harkis en Algérie.

       Qu’allait décider le gouvernement français face à une situation qui n’était rien d’autre que le prolongement historique de l’abandon de ces Musulmans fidèles à la France ? La réponse est cruelle ! Ces traducteurs allaient –comme les harkis- être abandonnés et livrés avec leur famille à la vindicte des talibans.

       « On a partagé les risques avec les militaires français, on se sent frères d’armes avec eux et aujourd’hui, ils nous laissent tomber ». Ce fut le cri de détresse lancé par ces hommes !

       « L'histoire, comme une idiote, mécaniquement se répète » disait Paul Morand. Rien n’est plus vrai !

       Des voix (notamment parmi les militaires) s’élevant pour dénoncer la gravité de la situation, Emmanuel Macron, dans une vidéo de février 2017 lors de la campagne présidentielle, eut des mots forts. Comparant la situation de ces anciens interprètes de l'armée française à celle des harkis, il évoquait la « trahison » de la France envers ceux qui l'avaient servie et expliquait alors : « Nous avons commis une faute comparable avec nos interprètes afghans »… sans pour autant, une fois élu, entreprendre quoi que ce soit pour leur venir en aide.

       Dès le départ des forces occidentales d’Afghanistan, les interprètes reçurent des menaces de mort souvent suivies d’effets… En effet, ces hommes étaient perçus comme des traîtres par les talibans qui les accusaient d’avoir « collaboré avec l’ennemi ». Leurs vies et celles de leurs familles étaient désormais en danger.

       On se souvient, entre autres, de ce traducteur opérant pour les Américains, décapité et dont la vidéo fut diffusée sur les réseaux sociaux…
       Tous sollicitèrent les nations avec lesquelles ils avaient collaboré et demandèrent un visa leur permettant d’obtenir l’asile politique… Seuls, quelques-uns eurent satisfaction.

       Parmi eux, un homme de 33 ans, marié et père de trois petits garçons : Qader Daoudzai. Cet ancien interprète afghan qui avait affronté les talibans au côté des soldats américains, avait rejoint entre 2010 et 2012 les forces françaises en Afghanistan. Au départ de ces dernières, comme ses collègues, il se savait menacé par les islamistes et, dans une lettre adressée au Parlement français, avait demandé un visa pour venir en France, ajoutant : « J'aimerais aussi dire que depuis que les forces françaises ont quitté l'Afghanistan, nous n'avons reçu aucune aide de leur part, ils nous ont complètement oubliés, ils n'en ont rien à faire de nos vies maintenant »

       La réponse lui parvint en 2015… cinglante… inhumaine : Refusé !... sans la moindre explication… Réponse aux antipodes de l’assertion de Caroline Decroix, vice-présidente de l'Association des anciens interprètes afghans de l'armée française, « En France, les anciens auxiliaires afghans de l'armée française qui ont déposé une demande d'asile ont tous obtenu le statut de réfugié ».

       En vérité, seule, une centaine d’entre-eux ont obtenu un visa pour la France.

       « À partir de maintenant, je suis mort ! » confia à ses proches Qader Daoudzai, quand il eut connaissance de ce rejet.

       Le 20 octobre 2018, jour des élections législatives, un attentat-suicide dans un bureau de vote à Kaboul coûta la vie à 78 Afghans. Parmi les débris humains, on identifia Qader Daoudzai, déchiqueté par la bombe. La « justice » des talibans était passée par là !
José CASTANO       
e-mail : joseph.castano0508@orange.fr
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France, réveille-toi !
Par M. Robert Charles PUIG


       Une fois de plus et sans attendre que tous les vœux soient exaucés, déjà la mort frappe le pays. Un assassin de plus, un mort et des blessés en prime dans un attentat odieux, à Villejuif.
       Que disent d'entrée de jeu - est-ce un jeu ? - nos personnages de la République ? Ils ne prennent pas le temps de regarder le crime avec des yeux ouverts. Ils ne prennent pas le temps de se rendre compte que le scénario est identique à combien de précédents ? Ils affirment tous à la façon des moutons de Panurge qui suivent celui qui commande, que nous assistons à l'œuvre d'un fou ! Les moutons de Panurge pour suivre le plus responsable, écrivait en se moquant Rabelais, sautent dans l'eau et se noient. Nous avons de nos jours et hélas depuis longtemps, cette même engeance de " responsables " qui nous font passer des vessies pour des lanternes, qui nous abreuvent de mensonges sur notre sécurité et qui cachent le mal d'une politique funèbre ou des français meurent, assassinés.
       Une fois de plus en ce début d'année, le pouvoir cache son impuissance par la contrevérité qui veut que celui qui tue, dans une sorte de sacrifice de l'Aïd, comme on tue un mouton, ne soit qu'un fou. Oh aveuglement de ce monde moderne, de cette France des politiciens qui nous veut du mal ! Un chat n'est pas un chat ! Un terroriste, pas un terroriste ! Il n'est qu'un aliéné ! Ainsi celui qui avec le couteau, le douk-douk rituel tue, n'est pas un salafiste ni un wahhabite mais simplement un dérangé ?
       Pourquoi avons-nous un tel pouvoir politique dans notre pays qui ne sait pas être réaliste ? Comprendre comment le crime est commis ? Deviner derrière un livre du Coran et la lettre-testament découverts, que l'assassin savait ce qu'il faisait ? Non, affirme le pouvoir progressiste, perclus de son complexe des colonies, il est malade, il est fou !
       Réfléchissons juste un peu au sort infligé aux victimes, aux familles qui demain seront endeuillées. Des personnes se promenaient. Elles abordaient l'an nouveau certainement sans haine pour leur prochain et avec l'envie d'espérer un pays heureux, une terre de France sans les mêmes horreurs que celles de l'an 2019, sans les morts d'une guerre indéfinie en Afrique, sans les assassinés de Paris, de Marseille, de Strasbourg ou de Nice.
       Des promeneurs se promenaient, tout simplement. C'est alors que la mort les frappa de l'arme des salafistes, des tueurs de Dae'ch qui se sont montrés dans d'autres circonstances égorgeant des victimes...

       Est-ce là le souhait de nos gouvernants ? Une France de la terreur, de la crainte où personne sur le territoire ne peut sortir de sa maison sans croiser la mort, le meurtre ?
       Qui était ce criminel ? Il était connu des services de la police... Il était intégriste et portait la tenue noire des croyants salafistes. Il avait un couteau, l'arme des assassins de Dae'ch. Il était tout cela, MAIS - Oh ! Triste MAIS... il n'était pas fiché " S " dans nos services de la police !
       Voilà où le mal prend sa source. Voilà ou l'assassinat nait ! Dans l'erreur d'un pouvoir innocent ou fourbe qui ne sait pas reconnaître où est sa place et son rôle pour sécuriser notre territoire.
       Un pouvoir pêchant pas omission ou aveuglement et étouffant le crime religieux, l'attentat commandé par Dae'ch. Il s'offre à l'étranger, pactise avec le Diable salafiste et se vend en offrant nos entreprises et une vitrine, à travers le sport aux royaumes d'Orient qui jouent avec notre jeunesse des banlieues pour qu'elle accepte leur loi, celle d'un Dieu au-dessus de la loi des hommes.
       Ainsi va notre politique qui n'est plus française à mes yeux. Celle qui se donne à l'étranger ; celle qui ne veut pas voir le danger de l'envahissement par le Sud ; celle qui demain à cause de son laxisme et de son incompétence libérera des nos geôles des terroristes toujours imprégnés de leur foi sauvage et qui seront à nouveau, potentiellement, des terroristes. Des assassins de français, de gens du peuple, de ces promeneurs qui ne souhaitent que la paix et le bonheur mais qu'un couteau transformera en deuil. Une lame qui s'enfoncera dans la chair du passant, une lame qui au nom d'une religion perverse et lors d'un prochain attentat, tranchera, saignera la peau d'une victime pour qu'elle meure.
       Oh ! Triste France. Quand te réveilleras-tu ?

Robert Charles PUIG 04/01/2020       
      

La repentance chronique de Macron
par M. Michel Onfray Envoyé par M. H. Jolivet


           Emmanuel Macron a la fâcheuse habitude de se mettre en position de soumission dans des pays étrangers qui furent jadis colonisés par la France. En Algérie, où c’est proprement mettre de l’huile sur le feu que de se présenter comme détestable aux yeux d’un certain nombre de gens qui nous haïssent déjà et n’attendent que de nouvelles raisons de nous mépriser, mais également en Côte d’Ivoire où il a récemment fait savoir que la colonisation était "une erreur profonde, une faute de la République".

           Or, si l’on veut vraiment examiner le passé de la France à cette aune, il va falloir ne pas se contenter de dire que le colonialisme fut "une erreur profonde, une faute de la République", ou que Vichy (qui, en passant, était une République ayant renoncé à elle même par voie parlementaire, via les députés de la chambre du Front populaire …) fut "une erreur profonde, une faute de la République", car ça ne suffira pas!
           On va devoir en effet reprendre tout à zéro et affirmer aussi que l’assassinat de Louis XVI, de Marie-Antoinette, ainsi que la mort à petit feu de leur enfant de dix ans, Louis XVII, le tout organisé par les Jacobins, ont constitué "une erreur profonde, une faute de la République". Il faudra également dire que la Terreur, avec ses quarante mille morts, a été "une erreur profonde, une faute de la République", que le génocide vendéen, avec ses cent cinquante mille morts, a été "une erreur profonde, une faute de la République", que les guerres impérialistes de 14-18 avec leurs dix huit millions de morts ont été "une erreur profonde, une faute de la République". Ou bien encore, puisque l’anachronisme est de sortie, allons-y donc, estimer que les Croisades, avec leur presque trois millions de morts, ont été "une erreur profonde, une faute de la République -monarchique…", de même avec les guerres napoléoniennes qui, avec leurs trois millions de morts également, ont été "une erreur profonde, une faute de la République -impériale…".

           On n’en sortira plus car l’Histoire, cher Manu, y compris l’Histoire de France, est faite de bruit et de fureur, de sang et de larmes, de cadavres et de charniers, c’est comme ça depuis le début du monde et ce sera ainsi jusqu’à la disparition des hommes. L’Histoire est tragique, elle n’est pas assimilable à celle qu’on montre dans les parcs de loisirs avec Mickey ou Astérix…
           Par ailleurs, il serait bon qu’on pense l’Histoire partout où elle a eu lieu, c’est misère d’avoir à le dire, et de ne pas oublier que, certes, les blancs furent de fieffés méchants avec la traite négrière, mais que celle-ci fut inventée par des musulmans. Or, cette traite orientale a duré du VII° siècle, sous Mahomet qui théorise la chose dans le Coran, à 1920, soit pendant treize siècles, elle a concerné dix-sept millions de noirs et un grand nombre de blancs raflés dans le sud de l’Europe. La traite négrière occidentale a commencé au XV° siècle pour se terminer au XIX° -soit pendant quatre siècle, autrement dit quatre fois moins longtemps. Il faudrait stigmatiser non pas seulement le colonialisme français, mais aussi tous les colonialismes de tous les peuples, en tous les temps, car la guerre tribale qui vise à imposer sa loi aux vaincus est la loi du genre depuis que les hommes s'entre-tuent sur la planète. A la période préhistorique, les guerres entre tribus supposent l’asservissement des peuplades vaincues réduites à l’état d’esclaves. C’est moins une spécificité française qu’une vérité de la nature humaine!

           Il faudrait également penser les génocides dans l’Histoire afin d’éviter de croire qu’avec les Arméniens et les juifs, ce serait une invention du seul XX° siècle européen et blanc: qui dit, par exemple, que l’Empereur mongol Gengis Khan a exterminé un cinquième de la population mondiale de son temps au XII° siècle? On lui doit en effet quarante millions de morts…
           Et Tamerlan, le chef de guerre musulman, dit aussi Timour le boiteux, qui a tué vingt millions de personnes? On sait que ses troupes faisaient des pyramides de crânes pour terroriser ses ennemis: 70.000 à Ispahan, 90..000 à Bagdad, 100.000 à Delhi. Sur ses ordres, 400 Arméniens ont été enterrés vivants en Anatolie, et ce parmi une quantité d’autres exactions. Et que dire de la conquête des Indes par les musulmans qui ont généré le massacre de l’Hindou Kush, soit quatre vingt millions de morts sur plusieurs siècles? Il faudrait aussi ne pas oublier le million de morts tutsis au XX° siècle… Cessons-là.

           Si l’on veut dire que le colonialisme français a été sanglant et inhumain, on le peut, car c’est vrai. Mais il faudra ajouter que, pour faire de l’histoire de la guerre d’Algérie et non de l’idéologie, sur les 150.000 combattants musulmans morts, 12.000 ont été tués par les musulmans eux-mêmes à cause de leurs luttes internes afin de s’imposer comme leaders du mouvement indépendantiste. 25.000 soldats français sont morts et 70.000 harkis ont disparu, tués par leurs coreligionnaires, 6000 civils européens ont eux-aussi été rayés de la carte, les crimes de l’OAS ont généré 100 morts, l’armée française a torturé, en effet, mais les indépendantistes aussi. Qui saura combien? Qui dira le nom de ces tortionnaires? Ce serait pourtant le prix à payer pour faire de l’Histoire, autrement dit abolir les mythologies qui font tant de ravages dans la partie la moins éclairée de la communauté musulmane et au-delà d’elle.

           Or, un demi-siècle plus tard, l’heure n’est pas aux comptages, mais à la paix –surtout pas à l’huile sur le feu, qui plus est versée par un président de la République française! De Gaulle avait proposé la paix des braves aux indépendantistes en revenant au pouvoir en 1958: ces derniers n’en ont pas voulu… Il faut aujourd’hui la proposer à nouveau en faisant de l’histoire et non de la repentance: établissons les faits et arrêtons les mythologies de part et d’autre. La repentance est la maladie de l’ignorant qui méconnaît l’Histoire et ne pense qu’en terme de moraline – qui triomphe en fausse morale d’une époque sans morale.

           En vertu du principe de l’effet papillon, quand Macron ne fait pas de l’Histoire mais de l’idéologie alors qu’il se trouve en Algérie, il répand de la poudre chez les jeunes Français d’origine algérienne qui ne veulent pas s’intégrer justement parce que la France est passée d’un temps sans repentance, une erreur, à un temps où il n’y a plus que repentance, une autre erreur. Faire de l’Histoire, vraiment, et non se raconter des histoires avec les idéologues de l’Etat maastrichtien, c’est savoir que l’Histoire est tragique et sanglante, qu’elle n’est pas la lutte du Bien facile à identifier contre le Mal aisé à désigner, ce serait trop simple, qu’elle n’est pas jeux d’enfants avec un Bien de jadis qui, avec le temps, deviendrait le Mal de ce jour, ce serait encore plus simple, mais lutte des hommes entre eux pour des raisons éthologiques: c’est toujours la bête en eux qui combat pour un territoire -le conquérir, le posséder, le défendre, l’élargir. Toute polémologie se réduit à cela; toute irénologie aussi.

           Le rôle d’un président de la république n’est donc pas d’exciter les chiens mais de les calmer, non pas de monter les peuples, les pays et les nations les uns contre les autres, ou bien, avec les gilets-jaunes ou les grévistes opposés au plan maastrichtien de modification des retraites, de soulever une partie des Français contre une autre, ce qui est le principe même de la guerre civile, mais de pacifier les meutes, de les tenir, de les retenir, de les empêcher de se lâcher.

           Il y a pour ce faire le langage qui est l’instrument diplomatique par excellence; or cet homme se tait quand il faudrait parler et parle quand il devrait se taire, il est à l’inverse de Jupiter. Quand il brise le silence, il recourt à la provocation et au mépris, à l’arrogance et à la morgue, au cynisme ou au sarcasme. Comme un adolescent mal dans sa peau, mais sûrement pas comme un lecteur des Mémoires de Charles de Gaulle en Pléiade qui aurait lu et assimilé ce grand œuvre …

           Ce jeune homme au sang vif met le feu partout où il passe; à croire qu’il ne cherche que ça, comme le pompier pyromane aspire à l’incendie afin de mieux se présenter la minute qui suit en soldat du feu dévoué! On sait que le désordre fait toujours le jeu de l’aspirant autocrate. Qu’on y prenne garde.
           Pourquoi, sinon, demander d'être accompagné en Côte d'Ivoire par le rappeur Vegedream qui a écrit dans l’une de ses chansons:
           "J’vais niquer des mères. J’vais tout casser… Sale pute, va niquer ta race!"?
           Un président de la République constitue la délégation qui l’accompagne afin qu’elle soit représentative du pays qu’il incarne: n’y-avait-il pas d’autre message à faire passer à la Côte d’Ivoire en matière, disons… culturelle [1]? Est-ce ce que la France fait de mieux: célébrer ceux qui veulent la niquer? Et ce avec l’argent du contribuable?

           Michel Onfray



La France est une perle jetée aux pourceaux
Par Michelle d’Astier de la Vigerie le 30 décembre 2019
Envoyé par Mme Saurel Eliane
Ma France était une perle.

        Chantée par les poètes, visitée du monde entier, plébiscitée comme le pays où il fait bon vivre, admirée pour ses paysages, ses monuments, ses arts, sa diversité, sa beauté, elle était admirée du monde entier. Sa culture rayonnait aux quatre coins de la planète. L’Église l’avait baptisée : «fille aînée». Fille aînée de Dieu ?
        Ma France n’est plus ce qu’elle était. Elle n’est même plus la France. Martyrisée, de Gaulle l’avait déjà dit de son temps. Maintenant, suicidée, c’est d’autres qui l’ont dit depuis.

        Je ne vais pas parler des envahisseurs, ces gens qui viennent de tous les pays de misère pour arracher du sol français ce qu’il reste à arracher. La France a toujours accueilli des misérables, des gens qui y avaient tout à gagner à s’intégrer, qui avaient envie d’être appelés Français et qui, bon an mal an, sont devenus des Français. Mais elle n’avait pas encore été confrontée à une race haineuse, arrogante, tueuse, violeuse, désireuse uniquement d’en dépecer ses restes. Et d’en éliminer les Français.

        Je ne vais pas parler de ces Français insensés qui se sont fait un dieu État un État providence, qui allait leur prodiguer bonheur et bienfaisance au nom de la solidarité. Ces Français-là n’ont jamais vu que, quand ils donnaient 100 € pour être soutenus en cas de chômage, dans la maladie et dans les vieux jours, cet État carnivore leur en prenait 50 au passage pour se servir grassement lui-même, avec tous ses coquins, sous prétexte d’alimenter un système de redistribution de plus en plus opaque et kafkaïen. Puis cet Etat boulimique, toujours sous prétexte de solidarité et d’humanisme, s’est mis à en prendre encore plus, sur les 100, et toujours aux mêmes : 10, 20, 30, voire plus, pour les redistribuer, soi-disant, aux nécessiteux, de fait des nécessiteux d’une nouvelle catégorie, tous ceux qui avaient compris qu’il était bien plus agréable de vivre de la générosité publique française, une générosité allocative légendaire, que de son propre travail. Du bout du monde, on a afflué pour profiter du système.

        Je ne vais même pas parler de la folie d’un peuple qui a cru gagner sa liberté en ne faisant plus d’enfants, et en laissant un grand vide et une absence chronique et dramatique de générations nouvelles. Ce peuple se retrouve aujourd’hui groggy, réclamant des retraites à des générations qu’il a décimées, parce qu’il a préféré se donner les moyens de vivre mieux tout de suite, et de survivre de plus en plus longtemps, fût-ce aux crochets de la collectivité, à défaut de pouvoir vivre grâce aux enfants qu’ils n’avaient pas faits. Regardons en face l’égoïsme et l’égocentrisme dont nous, tous les Français de souche, avons fait preuve depuis des décennies. C’est vertigineux…

        Je vais parler d’autre chose : de la dégringolade morale, de la décadence, de la descente aux enfers d’une nation qui avait de l’honneur et des principes, une éthique et des lois judéo-chrétiennes, et qui les a jetés à la poubelle, les uns après les autres, depuis mai 68, et sous la férule de maîtres invisibles qui ont tiré les ficelles en coulisse pour que ce pays s’affaisse dans sa propre boue et en crève.

        Une perle, la France, a été jetée aux pourceaux, par les Français eux-mêmes. La meilleure preuve en est de voir ceux qu’elle a élus pour la diriger. Des chefs d’État étalant, de manière de plus en plus nauséabonde, une immoralité et une irresponsabilité conjugale et familiale qui les auraient immédiatement disqualifiés en d’autres temps (et qui les disqualifieraient d’office dans la majorité des pays actuels, les USA, notamment), s’entourant de ministres de plus en plus vils, pervers, immoraux, qu’en d’autres temps, on aurait, pour beaucoup, mis en prison ou exécutés pour haute trahison, ou poursuivis sans ménagement pour perversion morale volontaire des jeunes et des enfants.

        Je préfère ne pas parler du Gouvernement actuel. Si la France est à l’image de ce Gouvernement, ce qui est certain, c’est qu’elle est tombée très bas, très bas, si bas qu’elle ne peut qu’en mourir.
        La perle France a été jetée aux pourceaux. Et les pourceaux se vautrent sur elle, jouissant de la couvrir de boue, ils s’en délectent même, et, elle qui était si belle, avec une nacre rare et brillante, elle est devenue laide, si laide que plus personne n’en veut.

        Mais la perle est un étrange objet, quasiment unique. Elle s’est formée lentement, au fil du temps, elle est composée de multiples strates de cristaux (de carbonate de calcium) et de conchyoline, issue d’organismes vivants, qui agit comme du mortier. En bref, elle est extraordinairement solide. Il suffit de l’extraire de la boue, de la laver, et la voici redevenant intacte, aussi belle qu’au premier jour.

        Jésus avait averti : «Ne jetez pas vos perles aux pourceaux» (Mt 7 : 6)

        Nous l’avons fait !

        Mais, dans la Bible, on nous parle aussi de chercheurs de perles, prêts à tout pour en trouver une de grand prix (Mt 13 : 46). Eh bien, si j’ai un vœu à faire pour 2020, c’est qu’il se trouve en France, prêts à se lever, des chercheurs de la perle France, qu’ils sachent comment l’extirper de sa boue, qu’ils en ôtent toutes les saletés et scories, et qu’ils la restaurent, encore plus belle qu’elle l’était par le passé.
        On peut rêver, et j’aime rêver, car je sais que les miracles, ça existe ! Les chercheurs de perles, aussi.

Reproduction autorisée avec la mention suivante :
© Michelle d’Astier de la Vigerie pour Dreuz.info.


REGARDS SUR L'ARMÉE D'AFRIQUE
Envoyé par M. N. Duchene

LA FRANCE ET SON ARMÉE EN ALGÉRIE
        
        Qu'est-ce que l'armée d'Afrique ? Le vocable est trompeur. Armée d'Afrique ne signifie pas " armée du continent africain ". L'appellation désigne les unités relevant de la présence française au Maghreb de 1830 à 1962. Elle intéresse uniquement l'AFN, l'Afrique française du Nord, Algérie, Tunisie, Maroc, sans omettre l'immensité saharienne.

        Ces unités s'ébauchent dès lors que les Français posent le pied à Alger le 5 juillet 1830. Le corps expéditionnaire a alors besoin de remplacer et de renforcer ses troupes d'origine métropolitaine. L'armée qui se constitue en perdra sa griffe initiale. Seul l'essentiel de ses cadres, les officiers principalement, proviendra de la Mère patrie.
        Les enfants du Maghreb et d'ailleurs formeront et gonfleront ses rangs. On les verra surgir et s'organiser : les premiers de tous seront les zouaves ; puis suivront les légionnaires, spahis, disciplinaires, tirailleurs algériens, goumiers, chasseurs d'Afrique, méharistes veillant sur le grand Sud.

        À ces fantassins et cavaliers s'adjoindront les artilleurs des régiments d'artillerie d'Afrique et des sapeurs (plus des tringlots et des transmetteurs).


        Les Zouaves
        Il était de tradition que la tribu des Zouaoua, à l'est d'Alger, fournisse des soldats au Dey. Le commandement français reprend opportunément cet usage à son compte. Le 1er octobre 1830, un arrêté prescrit de former un corps d'autochtones avec quelques cadres français.

        Qu'est-ce que l'armée d'Afrique ? Le vocable est trompeur. Armée d'Afrique ne signifie pas " armée du continent africain ". L'appellation désigne les unités relevant de la présence française au Maghreb de 1830 à 1962. Elle intéresse uniquement l'AFN, l'Afrique française du Nord, Algérie, Tunisie, Maroc, sans omettre l'immensité saharienne.

        Une unité du 3e régiment de zouaves fait halte et installe un bivouac

        Le contexte s'y prête. La révolution de 1830 a vu surgir nombre de désœuvrés. Envoyés en Algérie, en février 1831, ils sont intégrés au corps des Zaouaoua. Ce dernier devient une troupe mixte avant de se muer en troupe spécifiquement européenne. On parlera alors des zouaves. Le 13 octobre 1837, ils seront les héros du jour, derrière Lamoricière, à la prise de Constantine. L'expression " brave comme un zouave " en dit long quant à la légende qu'ils se sont forgés.

        Les légionnaires
        Si les zouaves possèdent le droit d'aînesse, les légionnaires les suivent de peu. Leur acte de naissance, signé de Louis-Philippe, porte sans ambiguïté : 10 mars 1831. " Il sera formé une Légion composée d'étrangers. Cette Légion portera la dénomination de Légion étrangère ".

        Là encore, Louis-Philippe reprend une vieille tradition d'étrangers au service de la France. Après les révolutions de 1830, les étrangers disponibles en Europe affluent. Un principe s'imposera très vite : l'anonymat du légionnaire. Le brassage unira les nationalités au sein de la nouvelle troupe. En 1843, Sidi Bel Abbès, du nom d'un saint homme enterré non loin, en sera le temple au sein d'une ville bâtie par la Légion.

        Les chasseurs d'Afrique
        Faute de transports adaptés, ils n'étaient que 500 cavaliers à débarquer à Sidi-Ferruch en juin 1830. Avant l'apparition du moteur, le cheval reste le seul recours possible pour se déplacer vite et loin, assurer reconnaissances et charges. L'ordonnance du 17 novembre 1831 crée deux régiments de chasseurs de cavalerie légère. Ils reçoivent bientôt le nom de chasseurs d'Afrique, basés l'un à Alger, l'autre à Oran. Ces chasseurs d'Afrique constitueront une cavalerie d'origine européenne. Ils auront pour premiers chefs des noms connus, tels Randon et Cousin-Montauban.
        L'historique des chasseurs d'Afrique s'enchaîne logiquement.

        Les spahis
        Celui des spahis s'avère plus complexe. Un homme y joue un rôle essentiel : Joseph Ventini, devenu Yusuf après sa capture par les Barbaresques. Ayant réussi à passer au service de la France, il lève d'abord des Turcs puis enrôle des locaux. L'arrêté du 24 juin 1833 crée " les spahis d'El Fahs ", auxiliaires à cheval armés et soldés (rémunérés par une solde). Les régiments de spahis réguliers ne s'agencent réellement qu'en 1845. Déjà, les spahis sous Yusuf, le 16 mai 1843 avaient été de la prise de la Smala, et le 14 août 1844 avaient pris part à la victoire d'Isly.

        Les tirailleurs
        On peut s'en étonner. Et les tirailleurs ? Ils mettent du temps à prendre rang. La France en Algérie a chassé l'Ottoman propriétaire des lieux. Bien peu de Turcs ont pu suivre le Dey dans son exil. Ces soldats se retrouvent donc en situation de demandeurs d'emploi.
        Les Français les enrôlent à Alger, Oran, Bône où ils forment des compagnies. Des enfants du pays viennent les renforcer. L'ordonnance du 7 décembre 1841 prescrit la formation de bataillons de tirailleurs indigènes. Le décret du 10 octobre 1855 prévoira la formation de trois régiments de tirailleurs algériens.

        Le point de départ de ces tirailleurs se retrouvera dans leur refrain qui retentira de l'Afrique à l'Asie :
           " Les Turcos, les Turcos sont de bons enfants (bis)
           Mais faut pas qu'on les gêne
           Sans cela, la chose est certaine,
           Les Turcos deviennent méchants… "


        Puis après les RTA, régiments de tirailleurs algériens, avec l'expansion au Maghreb, viendront les régiments de tirailleurs tunisiens et marocains. Tous seront de glorieux soldats. L'Italie, après tant d'autres combats, le prouvera amplement en 1944.

        Les disciplinaires
        Ces garçons-là sentent le soufre. À bien des égards, ils font figure de réprouvés. Ne sont-ils pas d'abord des disciplinaires ? Leur création les range dans le peloton de tête, car l'Algérie de Louis-Philippe réclame du monde et ne se montre pas très regardante. L'ordonnance royale du 3 juin 1832 prescrit la création de deux bataillons d'infanterie légère d'Afrique (BILA), baptisés bien plus tard, les Bataillons d'Afrique.

        Ces lascars au feu " vont bien " dit-on. Ils le montrent avec éclat du 3 au 7 février 1840 en défendant Mazagan face à des milliers de combattants d'Abd el Kader. Ils n'étaient que 144 zéphyrs du 1er BILA sous les ordres du capitaine Lelièvre.

        Les compagnies sahariennes et les goumiers
        Manquent encore les compagnies sahariennes créées à la fin des années 1890 à l'occasion du pas en avant dans le Grand Sud, et les goums (valeurs d'une compagnie) formés au Maroc en1908 avec l'arrivée des Français. Tous ces soldats levés depuis1 830 se battent avec panache au service de la France.

        La Seconde Guerre mondiale
        1939. Vingt ans après Rethondes et Versailles, le nazisme triomphe en Allemagne on chef, le Führer, Adolf Hitler, veut la guerre. Elle éclate le 3 septembre.
        En 1939, l'armée d'Afrique a belle allure. Les Parisiens l'ont acclamée sur les Champs-Élysées pour la fête nationale. Tirailleurs algériens en pantalon bleu, zouaves en chéchia et ceinture de tradition, spahis à ample burnous rouge et blanc, légionnaires défilant pour la première fois en képi blanc.

        Les parades font illusion. 1939 ressemble à 1914. Les fantassins marchent à pied avec les fusils Lebel modèle. 1886. Les cavaliers chevauchent leurs montures. Les artilleurs utilisent le bon vieux 75, hippotracté. Dans l'armée d'Afrique, à défaut de modernité, l'ardeur règne. L'encadrement s'affirme de qualité, du général au plus modeste sergent.
        Saïd Boualam est adjudant au 1er RTA de Blida où le futur général Rafa, sous ses ordres, a fait ses classes.
        1914 se reproduit. Priorité à la Mère patrie.
        L'armée d'Afrique envoie ses soldats combattre sur le front métropolitain. Se constituent :
        La division marocaine, général Mellier (février 1940).
        La 2e DINA, division d'infanterie nord-africaine, général Dame (1er janvier 1940). La 5e DINA, général Mesny (16 mai 1940).
        Ces trois excellentes divisions appartiendront à la 1ère armée appelée à pénétrer en Belgique.
        La 4e DINA, division d'infanterie nord-africaine, général Sancelme.
        La 1ère DINA, général Tarrit.
        La 6e DINA, général de Verdilhac.
        La 7e DINA, général Barré.

        Outre en sus des DIA, divisions d'infanterie d'Afrique, de seconde catégorie, qui n'entreront en lice que tardivement ou resteront en AFN.

        La Marocaine et les DINA sont regardées comme des troupes d'active. Elles seront engagées d'entrée et subiront de lourdes pertes dans la défense du front français du nord. Les combattants de 1940 ont mauvaise presse. Pourtant 90 000 tombent en six semaines du 10 mai au 25 juin, ratio double de ceux de 14-18. L'armée d'Afrique perd dix mille des siens, un sur dix des morts de 40. Les spahis meurent à La Horgne le 15 mai, les tirailleurs au Bois Inor le 13 mai, et sur la Somme le 5 juin, les légionnaires à Verdun fin mai. Les exemples pourraient se multiplier. Il appartient sans doute à la 1ère brigade de spahis de livrer les derniers combats en défendant la vallée du Rhône au nord du défilé de Saint-Vallier.
        Précédant la signature de l'armistice le 25 juin, le général de Gaulle, de Londres, a lancé son célèbre appel du 18 juin. Par sa localisation, l'armée d'Afrique, initialement, ne lui apporte qu'un contingent modeste.

        La 13e demi-brigade de Légion étrangère (DBLE), après un périple par Narvik et la France, se retrouve en Angleterre. Le 30 juin, son chef, le colonel Magrin-Vernerey, (bientôt Monclar) et son adjoint, le capitaine Kœnig, entraînent derrière l'Homme du 18 juin 25 officiers, 102 sous-officiers, 772 légionnaires qui entreront dans la légende des Français libres. Le 30 juin, à des milliers de kilomètres de là, le capitaine Jourdier passe en Palestine britannique avec une portion de son escadron du 1er RSM. Tous ces braves, légionnaires et spahis fourniront l'ossature des premiers Français libres. La 13 sera à Bir Hakeim en mai-juin 1942, avec la 22e CNA (futur 22e BMNA) issue de tirailleurs ralliés en Syrie.
        L'armistice serait-il la paix ? Non ! Pour preuve Mers El Kebir, le 3 juillet 1940, qui braque profondément l'armée d'Afrique foncièrement hostile à l'Allemand. Elle ne comprend pas cette félonie de l'ancien allié.
        Un autre coup de poignard la révolte. Le 8 juin 1941, les Anglais accompagnés de Français libres attaquent la Syrie française défendue en grande partie par des unités de l'armée d'Afrique. La suspension d'armes interviendra le 14 juillet à 0 heure. " Horrible gaspillage " écrira de Gaulle d'un affrontement dont il est de fait, l'un des principaux responsables. 1 066 tués et 4 500 blessés parmi les troupes du Levant, donc en majorité de l'armée d'Afrique. 650 tués et blessés pour les Français libres.

        Germanophobe mais révoltée, la quasi-totalité des combattants de l'armée d'Afrique refuse de rallier les assaillants. Il semblerait qu'environ 2 500 hommes aient rejoint les FFL. Parmi eux, un millier de légionnaires. Dans ceux qui rentrent en AFN, Segretain, Jeanpierre dont des promotions de Saint-Cyr porteront le nom, Lisenfeld qui commandera le 2e BEP à Diên Biên Phu, de futurs généraux, Dulac, Andolenko, Pépin Lehalleur, Le Corbeiller, Favreau et d'autres qui s'illustreront en Tunisie, Italie, France, Indochine.
        L'attaque de la flotte française par les Anglais le 3 juillet 1940 fut perçue comme une véritable félonie par l'armée d'armistice

        L'armistice a préservé l'AFN de l'occupation nazie. Seules des commissions allemandes et italiennes rôdent tandis que Weygand, à Alger de septembre 1940 au 18 novembre 1941, s'efforce de redonner consistance et âme à l'armée d'Afrique. Les Allemands finissent par exiger son renvoi, mais il a su faire venir des chefs de qualité comme Juin tiré de sa captivité en Allemagne. Il a pu camoufler de l'armement, gonfler les rangs sous couvert d'auxiliaires, faire célébrer en novembre 1941, le centenaire des tirailleurs et spahis. L'armée d'Afrique en est sortie confortée.

        Il n'est pas à revenir sur le débarquement allié en AFN le 8 novembre 1942. À Alger, Juin parvient à imposer le cessez-le-feu. Par contre au Maroc, les mauvais souvenirs de Syrie et un commandement mal inspiré provoquent des morts inutiles. Du moins à mi-novembre, alors que la totalité de la France est occupée, en AFN l'armée d'Afrique reprend le combat contre " le boche ". Le général Giraud, vieux soldat d'Afrique, évadé d'Allemagne, en assume le commandement.
        Il appartient, au départ, à cette armée de défendre seule la Tunisie que la Wehrmacht envahit. Rude bataille menée dans la rigueur hivernale de la dorsale tunisienne avec un armement dépassé. Tirailleurs, légionnaires, goumiers se battent les mains nues. Leur résistance permet aux gros moyens américains et anglais d'arriver. Au printemps 1943, trois divisions de marche, d'Oranie, du Maroc, d'Algérie contribuent au coup de boutoir final qui conduit les Alliés, le 13 mai, à Tunis. Première revanche, l'armée d'Afrique a fait 37 000 prisonniers.

        Sous Giraud et Juin, libéré de captivité grâce à Weygand, l'armée d'Afrique se renforce : matériel américain, enrôlement massif des nationaux d'AFN, arrivée d'évadés de DR France. Elle se prépare pour le grand round : la reconquête de l'Europe et donc la libération de la France. Premier temps, l'Italie où les Anglo-américains à débarquent en septembre 1943.
        Giraud a obtenu des armes. Les enfants d'AFN lui donnent des bras. La mobilisation des Européens de la classe 19 à la classe 45 envoie 176 000 hommes sous les drapeaux.

        À cet apport s'adjoindront à divers titres :
        134 000 Algériens (1/3 volontaires-2/3 appelés) ;
        26 000 Tunisiens (idem) ;
        73 000 Marocains (tous volontaires de par le statut du protectorat) ;
        122 000 hommes de l'armée d'Afrique en place le 8 novembre 1942 ;
        10 000 FFL ;
        20 000 évadés de France ;
        30 000 tirailleurs sénégalais venus d'AOF ;
        90 % sont donc originaires du Maghreb et se rattachent à l'armée d'Afrique.
        Tous ces mobilisés ne monteront pas en ligne. 75 000 participent à la campagne de Tunisie, 110 000 à celle d'Italie, 275 000 à celle de France.

        Le général Alphonse Juin, enfant de Bône et pur " produit " de l'armée d'Afrique, a été nommé par Giraud patron du corps expéditionnaire français (CEF) destiné à l'Italie. Le 25 novembre 1943, son DC 3 se pose à Naples. Personne ne l'attend. Tout est à faire. La défaite de 1940 a jeté l'opprobre sur l'armée française, malgré la Tunisie.
        Progressivement les unités de l'armée d'Afrique arrivent, 2e DIM en tête, puis 3e DIA
        Avant leurs camarades des tabors, de la 4e DMM et de la 1e DFL. Les Alliés sont bloqués dans les Abruzzes. Juin réclame sa part du travail. La 2e DIM force le passage au Pantano, puis à La Mainarde avec les tabors. Clark, le commandant en chef US, comprend. Les Français sont des bons. Ils obtiennent un créneau national où s'intègrent, dans un premier temps, 2e DIM et 3e DIA, qui après avoir avalé le Mona Casale enlève le Belvédère où l'action du 4e RTT fait date (janvier 1944 - fourragère Médaille militaire en 39-45 au 4e RTT).
        u début du printemps, les Alliés, malgré leurs renforts, sont bloqués au sud de Rome, dans la vallée du Liri, devant Cassino. Impossible de forcer le passage. Juin, offre ses services. Avec ses tirailleurs, grands coureurs de djebel, il se fait fort de passer par les hauts. Les 11 et 12 mai, 2e DIM et 3e DIA s'emparent des sommets du Majo et du Petrella.

        La 4e DMM, les tabors de Guillaume, la DFL, avec la 13e DBLE et le 22e BMNA, s'engagent dans la brèche. Cassino est tournée. La route de Rome s'ouvre. Rome tombée, Clark entrant dans la ville éternelle avec Juin pourra dire au Français : " Sans vos merveilleux régiments nous ne serions pas là ! " Après quoi ce sera la marche sur Sienne avant l'embarquement destination la France, de cette troupe accompagnée de mulets : " la Royale Brêle Force " comme disent les British. "
        Des pages de gloire de l'armée d'Afrique, celle de la campagne d'Italie est sans doute la plus belle. Les soldats de Juin y représentaient la France.
        Ahmed Ben Bella, né en 1916, Médaille militaire, quatre citations dont deux à l'ordre de l'armée en Italie, termine adjudant. Si la France lui avait donné des galons d'officier sa rébellion aurait, peut-être, pris un autre aspect moins révolutionnaire. Son exemple n'est pas unique.

        À Alger, de Gaulle a supplanté le " brave général Giraud " trop honnête pour faire un politique. Juin a glané trop de gloire en Italie. De Lattre, évadé de France, le remplace à la tête de ce qui sera d'abord l'Armée B puis 1ère armée française qui, débarquée en Provence le 15 août, entame la glorieuse remontée de la vallée du Rhône après avoir libéré Toulon et Marseille.
        Cette armée B est encore largement " armée d'Afrique " : CEF d'Italie, quatre divisions plus les tabors.
        Deux DB (1ère et 5e ), à base de régiments de l'armée d'Afrique ;
        Une division coloniale (9e DIC) ; des unités non endivisionnées type les Commandos d'Afrique ou le bataillon de Choc formé à Staouéli avec des évadés de France et des enfants du Maghreb.

        Au bas mot, 75 % minimum des rangs proviennent de l'armée d'Afrique. L'incorporation à l'automne des éléments issus des maquis, avec l'amalgame prôné par de Lattre, affaiblira ce pourcentage.

        Une autre unité française participe à la libération du pays : la 2e DB de Leclerc débarquée en Normandie le 1er août et qui aura la gloire d'entrer dans Paris. Officiellement, comme son chef, elle est gaulliste. De fait, elle ne l'est qu'en partie. Leclerc conscient de la faiblesse intrinsèque de son élément FFL a largement recruté dans l'armée d'Afrique. Sa 2e DB y a puisé pour les trois quarts. Il est à l'honneur de son chef de savoir assurer la cohésion de l'ensemble. Ce qui était loin d'être acquis au départ.
        À l'automne et à l'hiver 1944-1945, libération de Strasbourg, durs combats en Alsace, traversée du Rhin, entrée en Allemagne. Les soldats de l'armée d'Afrique en sont les grands acteurs. Dans cette nouvelle campagne, ils y perdent environ 10 000 de leurs camarades.

Pierre MONTAGNON
        Ancien de l'armée d'Afrique


Trahisons et Abandons…
Par le Général (2s) Roland Dubois
Envoyé par Mme A. Bouhier

         Quand j’étais jeune officier, mon pays m’a envoyé en Algérie, départements français, pour combattre une rébellion.

         Notre chef le plus illustre de l’époque m’a demandé de m’engager au nom de la France, de convaincre la population que nous allions rester, et nous avons été nombreux à y croire car nous avions 20 ans.

         Puis ce même chef, oubliant qu’il était soldat s’adressant à des soldats, m’a dit que non, finalement c’était une erreur et que l’Algérie serait indépendante.

         Il m’a alors contraint à regarder sans comprendre le malheur de nos compatriotes et le massacre de ceux qui étaient nos frères d’armes, abandonnés par mon pays à leurs bourreaux. Première trahison.

         A la fin de ma vie, mon pays, après avoir ainsi lâchement abandonné les seuls vis-à-vis desquels il avait une ardente obligation, me contraint maintenant à regarder et tolérer sa propre invasion par ceux qui n’ont pas voulu de nous alors.

         Nous sommes colonisés par nos anciennes colonies.

         Un changement de culture et de population est en marche.

         Dans 30 ans la France ne sera plus la France.

         Et on laisse faire, on encourage et on paye. Seconde trahison.

         Pour couronner le tout, je subis maintenant l’humiliation d’avoir un chef qui ne voit dans le passé colonial de ma patrie et de mes anciens que crime contre l’humanité et barbarie.

         Aveugle, confis en repentance, il ne peut pas être l’âme de la résistance dont nous avons besoin. Troisième trahison.

         Pauvre France, enfin pauvres de nous ! Dans tous les domaines nous avons perdu notre combattivité.

         Nous ne pensons qu’à couler des jours paisibles ; les 35 heures (même pas pour beaucoup, et pour d’autres 50 ou 60), les vacances, la télé, Internet, les SMS, le sexe, les dettes.

         De moins en moins de gens travaillent de plus en plus pour que de plus de gens puissent travailler de moins en moins. On ne veut surtout plus faire la guerre. On ne supporte même plus l’idée de se battre pour se défendre; on laisse ça à une élite motivée mais lilliputienne et sous équipée. De renoncements en abandons, on finira par être vaincu sans même s’être défendu.

         Si nous continuons comme ça, dans peu de temps, il ne restera plus aux Français de cœur que la révolte, car la démocratie dévoyée et veule que nous pratiquons aura amené une situation irréversible par des voies légales. On finira par se battre dans les rues. Le manque de clairvoyance et surtout de courage nous auront amenés là.

         Beaucoup de Français de plus en plus inquiets le comprennent et savent qu’ils ne peuvent pas compter sur les chefs qu’ils se sont donnés depuis tant d’années, pour protéger leur société, leur civilisation, leur genre de vie, de la dissolution dans un magma multiculturel d’abord, suivi de la domination islamique ; qui viendra, si nous ne réagissons pas, car l’Islam est la seule idéologie dynamique et conquérante face à un occident déchristianisé et amorphe.

         La seule lueur vient des associations patriotiques qui ont un regard lucide sur notre tragique abandon. Il faut être prêt à compenser les faiblesses d’un état vacillant, le remplacer s’il s’écroulait. Les Volontaires pour la France font partie de celles-là.

         Si nous échouons, craignons le regard de nos enfants qui pourront nous demander « comment avez-vous pu laisser faire ça ? ».

Général (2S) Roland DUBOIS – VPF Ile de France

V.P.F. :   
   https://volontaires-france.fr/trahisons-et-abandons/


1956, Holeindre sauve Tébessa
Envoyée par M. P. Barisain

        Le 24 novembre 1956, une petite patrouille de parachutistes coloniaux du 8e R.P.C., sous les ordres d'un vieux briscard d'Indochine, le sergent Roger Holeindre, est en "chouf " sur les pentes méridionales du djebel Anoual. Enfants perdus à une quinzaine de kilomètres au sud-est de Tébessa, les paras se sont fondus dans le paysage. Les ruines d'une maison forestière leur servent d'abri et de cache. Autour d'eux tout est calme. Dans leur dos, la forêt étouffe les bruits. Face à eux, le glacis coupé des ravinements des oueds descendus de l'Anoual, laisse deviner dans les lointains les reliefs tunisiens. La journée s'est déroulée sans incidents. Coups de jumelles aux quatre coins de l'horizon, grignotage mesuré du contenu des boîtes de ration. Pas de feu surtout. Pas de déplacements non plus hors des vestiges de l'ex- maison forestière.

         16 heures. Dans moins d'une heure la nuit tombera. On pourra se dégourdir les jambes. L'obscurité apportera sa relative sécurité et sa longue veille, car, sait-on jamais, si près de la Tunisie. ..

        Soudain, le guetteur de service alerte discrètement son chef. Côté opposé au couchant, il distingue nettement des hommes qui progressent en file indienne le long de la lisière de la forêt.

        " Ces imbéciles, murmure Holeindre, ils ne m'ont pas prévenu qu'il y avait une opération dans le coin! "

        La tête de la troupe est encore loin de lui. Il discerne mieux, aux jumelles, l'éclat d'un canon de fusil. Soudain, un doute le traverse. Et si ces hommes n'étaient pas des Français ? Pourtant, la colonne s'allonge, treillis kaki derrière treillis kaki. Non, ce n'est pas la démarche d'une unité française. Ce n'est pas la file caractéristique piquetée d'antennes radio et de F.M. portés sur l'épaule comme une besace au bout d'un bâton de pèlerin. Holeindre les voit mieux. A combien sont les premiers ? 150-200 mètres tout au plus. Les treillis sont un peu plus clairs que ceux de l'armée française, les rebords des casquettes plus carrés. Les visages ont le teint hâlé des gens du sud.

        " Des fells ! " Murmure Holeindre. Les mains se crispent sur les poignées des P.M. Quelques-uns ne vont-ils pas faire une incursion jusqu'aux murs écroulés ? Les paras, qui sont moins de dix, sont sans illusions. Non, la colonne poursuit sa marche. Elle n'en finit pas. Quatre cents hommes environ, estime Holeindre lorsque les derniers s'estompent derrière un bosquet. La pénombre grandit. La nuit tombe vite fin novembre. Heureusement. Elle va permettre de s'éclipser. Pour Holeindre et les siens, après la tension nerveuse, le plus dur reste à faire: rejoindre Tébessa et rendre compte. Le plus sûr sera encore de dévaler jusqu'à la route Tébessa- EI-Ma- EI-Abiod en évitant la forêt. Dans l'obscurité, en plein terrain découvert, ils risquent moins une mauvaise rencontre. Il est plus de 3 heures du matin lorsque le groupe Holeindre rejoint Tébessa. Il marche depuis neuf heures, nerveux, tendu, aux aguets. Sur la route, au passage du col, il a écopé de quelques coups de fusil du poste français. Impossible de se faire reconnaître des sentinelles effarouchées par ses coups de lampe intempestifs.

        A l'état-major, la première réaction est le doute. Ce n'est pas possible. Les services de renseignements l'auraient su! Mais Holeindre se fait pressant. On le connaît. Gai luron au cantonnement, mais combattant chevronné. Au Tonkin, il a vu déferler les vagues "viets". Il sait ce dont il parle. Ce ne sont pas des ombres qu'il a vu progresser à portée de son P.M.

        Dès l'aurore, deux régiments paras de la 25e D.P. convergent vers la ville en soutien de celui qui y est et qui lance de nuit son commando à la recherche de l'ennemi. Qui se doute que la guerre d'Algérie, sur le plan militaire, vient pour de longs mois de changer de visage ? L'homme qui dirige la colonne qui a défilé devant Holeindre s'appelle Chérif Mahmoud. C'est un ancien lieutenant de l'armée française, où son frère est capitaine des spahis. Ce fils d'un légionnaire autrichien marié à une musulmane a plus les traits d'un enfant du Tyrol que ceux d'un natif de Chéria, ce bourg poussiéreux au sud de Tébessa. Il n'en est pas moins profondément nationaliste. Il a milité à l'U.D.M.A. de Ferhat Abbas avant de rejoindre le front, où ses antécédents militaires l'ont mis en avant.

        Avec quatre cents hommes bien équipés, il arrive de Tunisie pour frapper un grand coup : prendre une ville française. Cette ville, ce sera Tébessa. Déjà, il regroupe les siens dans les couverts de l'Anoual, qui dominent la ville. La forêt, qui arrive au bord de la cité, dissimulera son monde et son approche. Quel feu d'artifice attend l'antique Théveste ! L'intervention des paras de la 25e D.P., un combat incertain d'un jour et deux nuits écarteront le danger d'une occupation même limitée de Tébessa. Spectacle inédit, pendant de longues minutes, le lent crépitement d'une vieille mitrailleuse Hotchkiss française accompagnera l'efficacité des deux P .47 d'appui. Le lendemain, on retrouvera un tas de douilles, mais l'arme sera repartie là d'où elle était venue. En Tunisie.

        Une nouvelle page se tourne. La bataille des frontières s'engage grâce aux éléments venus de Tunisie ou du Maroc. Elle va durer avec acharnement pendant plus de deux ans. D'elle dépendent la survie et le développement de l'A.L.N. de l'intérieur.

        Montagnon, la guerre d'Algérie, éditions Pygmalion, 1984, ISBN 2-85-704-171-1
        http://jeanjviala.free.fr/1956_Novembre.htm



Roger Holeindre 1929-2020
Envoyée par Mme B. Leonelli

        Roger Holeindre nous a quittés dans la nuit du 29 au 30 janvier 2020 dans sa 91e année. Né le 21 mars 1929 à Corrano (Corse), il est l'un des plus jeunes résistants de France à l'âge de 15 ans. Engagé volontaire dans l'armée dès 16 ans et demi, il effectue, de 1947 à 1957, trois séjours en Indochine et participe aux tous derniers combats sur les hauts plateaux après la chute de Diên Biên Phu. De retour en France, après avoir été instructeur à l'école commando de Bayonne, il part pour l'Algérie où il restera cinq ans, appliquant sur le terrain les méthodes les plus risquées de contre-guérilla en s'infiltrant des douzaines de fois, avec quatre ou cinq hommes seulement, dans des régions rebelles. Deux fois blessé, médaillé militaire à titre exceptionnel, cinq fois cité, il restera jusqu'au bout un partisan acharné de l'Algérie Française.

        n 1962, il anime le maquis Bonaparte dans le Constantinois. Ses prises de position et son appartenance à l'OAS lui ont valu une condamnation à 14 ans de prison. Il sera cependant libéré en 1965 et se lance immédiatement dans l'action militante. En 1972, il est co-fondateur, secrétaire général adjoint et vice-président du Front national, dont il sera ensuite député de la Seine-Saint-Denis, de 1986 à 1988. Il devient grand reporter indépendant et parcourt le monde à la recherche de son passé, de causes à défendre, d'histoires à raconter, de témoignages à rapporter. Fondateur (en 1985) puis président du Cercle national des Combattants, il est également élu municipal et régional. En 2011, Roger Holeindre quitte le Front national à la suite de l'élection de Marine de Le Pen à la tête du parti, puis rejoint le Parti de la France, présidé par Carl Lang.

        Il a toujours montré sa sympathie envers notre maison de Chiré, en dédicaçant régulièrement ses livres dans notre librairie parisienne (Duquesne Diffusion) et en participant à plusieurs de nos Journées chouannes, notamment celles au cours desquelles il intervint, celles de 2015 où il prononça un discours mémorable : "Nous n'avons pas fini de payer l'imposture gaulliste", et celles de 2004. Il a également rédigé deux contributions pour nos Cahiers de Chiré : en 1996 (no 11) : "Israël et la Palestine" et en 2004 (no 19) : "Diên Biên Phu : hommage à ceux qui surent se battre, souffrir et mourir". Nous sommes heureux, pour lui rendre hommage, de vous proposer une sélection de ses livres qui sont présents à notre catalogue.

         Nos Cahiers de Chiré


Lettre d'information - Janvier 2020
postées sur le site de l’Association de Soutien à l’Armée Française (ASAF)

www.asafrance.fr
Envoyée Par l'ASAF

       Gagner ensemble" : Lettre ASAF du mois de janvier 2020

       https://www.asafrance.fr/item/gagner-ensemble-lettre-asaf-du-mois-de-jan-vier-2020.html
LA RÉDACTION de l’ASAF
www.asafrance.fr


LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS

Par J.C. Stella et J.P. Bartolini


                            Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.

             Jean Claude a effectué toutes les recherches et il continu. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous et je viens d'ajouter Petit, Clauzel, Gelât Bou Sba, Héliopolis, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir.

             Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.

             De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.

             Ce travail fait pour Bône, Aïn-Mokra, Bugeaud, Duvivier, Duzerville, Herbillon, Kellermann, Millesimo, Mondovi, Morris, Nechmeya, Penthièvre, Randon, Kellermann et Millesimo, va être fait pour d'autres communes de la région de Bône.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et ceux des villages alentours :

CLIQUER sur ces adresses : Pour Bône:
http://www.livredor-bonois.net

             Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :

http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr
                         J.C. Stella et J.P.Bartolini.
 


NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers

L’Algérie enregistre un divorce toutes les huit minutes

Envoyé par

Pierre


https://www.tsa-algerie.com/lalgerie-enregistre-un-divorce-toutes-les-huit-minutes/

Par TSA Algérie par Riyad Hamadi le 18/01/2020


             L’Algérie enregistre environ 68000 cas de divorce par an, soit un cas toutes les huit minutes, a révélé ce samedi à Bouira le président du comité algérien à l’Union internationale des avocats (UIA), Faissal Driouèche.

             Intervenant lors d’un séminaire organisé par l’université sous le thème « la conciliation dans les affaires de divorce », le conférencier, dont les propos ont été repris par l’agence officielle, a tiré la sonnette d’alarme face à l’ampleur de ce phénomène aggravé par l’échec des tentatives de conciliation menées par les juges.

             « Ces échecs sont expliqués par le climat défavorable et le manque de temps pour accomplir ce genre de missions afin de préserver la famille », a-t-il-dit. C’est pourquoi, il préconise de confier cette mission à des psychologues.

             « La nature de travail du juge ne lui permet pas de mener cette mission de conciliation en un peu de temps. Donc, la justice doit déléguer un service ou un spécialiste en psychologie pour lui confier cette tâche et afin que ce service puisse examiner sereinement la situation des deux conjoints dans l’espoir de trouver de bonnes solutions », soutient-il.

             Pour sa part, un enseignant de l’université de Tizi-Ouzou, cité par la même source, a appelé à l’examen de cette question sous tous ses aspects, en plaidant en faveur de la sensibilisation de la société. « La sensibilisation sur les méfaits sociaux du divorce est très importante aussi au sein de la société, donc nous devons tous œuvrer pour faire face à ce phénomène », a-t-il affirmé.
Ryad Hamadi           


La télémédecine au service du légiste

Envoyé par Jeanne
https://www.liberte-algerie.com/est/la-telemedecine-au-service-du-legiste-331819


Liberté Algérie   l Par M. A. Allia - 13/01/2020

LES JOURNÉES NATIONALES DE MÉDECINE LÉGALE AU CHU IBN-ROCHD D’ANNABA

        Annaba a abrité, à la fin de la semaine écoulée, les 4es Journées nationales de médecine légale, un colloque organisé par le CHU Ibn Rochd avec le concours de l’Académie algérienne de développement des sciences médicolégales.
         Une rencontre qui a permis à ses organisateurs de faire le point avec leurs confrères sur les progrès enregistrés par cette discipline en Algérie et notamment sur l’exercice de la médecine à distance grâce à l’usage des technologies modernes.
         C’est sur ce point que le professeur Abdelhamid Amira, chef du service médicolégal du CHU de Annaba, devait focaliser sa communication, à l’ouverture des travaux. Le Pr Amira a signalé que la médecine légale est appelée à faire face aux changements des comportements sociaux, à l’instar du phénomène des agressions.
         Et que plus de 60 consultations liées à des violences sont quotidiennement effectuées au niveau de son service. Abondant dans ce sens, le Pr Rachid Hadji, président de l’Académie algérienne de développement de la médecine légale, a insisté sur la nécessité pour notre pays de maîtriser et de généraliser cette technique compte tenu de son étendue.
         “Il est impératif pour le système de santé algérien de suivre l’évolution technique pour améliorer l’acte sanitaire. La médecine à distance est un moyen moderne pour porter le traitement au patient où qu’il se trouve, ce qui implique la maîtrise des aspects légal et déontologique, et notamment ceux liés au choix du médecin et à la préservation du secret des données”, devait souligner ce spécialiste.
         Riche de près de 200 communications consacrées aux multiples aspects de la médecine légale, ce colloque a aussi et surtout permis aux spécialistes venus des différentes régions du pays de s’enquérir de l’évolution des moyens légaux et déontologiques dont dispose le légiste.
A. Allia           


CHRONIQUE / ACTUALITÉS

Envoyé par Leon
https://www.liberte-algerie.com/chronique/pourquoi-les-algeriens-se-souhaitent-ils-bonne-annee-chaque-nouvelle-annee-473

par liberté Algérie, par Amin ZAOUI 11/01/2020 ,

Pourquoi les Algériens se souhaitent-ils
"bonne année" chaque nouvelle année ?

           Comme à chaque année, et avant les fêtes de Noël et du nouvel an, quelques étranges voix, avec les mêmes discours qui reviennent et qui ronronnent, s’acharnant contre cette tradition de la culture festive ouverte et plurielle, chez les Algériens.

           Du haut des minbars des mosquées politiquement instrumentalisées, à travers quelques associations affilées à des partis islamistes, ces voix appellent à boycotter ces fêtes, en les qualifiant comme fêtes religieusement illicites, des fêtes d’elyahoud wa annaçara (les juifs et les chrétiens) !

           Quand qu’il s’agit de dénoncer la corruption ou d’autres maladies économiques qui menacent l’existence même de la nation, les langues de ces charlatans restent muselées, bois mouillé, bien rangées dans leurs poches, mais dès que ces fêtes s’annoncent ces derniers activent en placardant des fatwas sur les murs des universités, des lycées, des mosquées et sur les portails des immeubles, appelant à l’interdiction de ces moments de bonheur universel. Ils cherchent à perturber la fête !

           Étouffés par les interdictions, par le manque des lieux de divertissement, les Algériens, les petites gens, grognent secrètement. Les Algériens et les Algériennes se libèrent, se déversent, sur les réseaux sociaux en s’exprimant sur leur amour de la fête, qu’importe la fête. La fête n’a pas de religion. La fête est un partage humain.

           Pourquoi les Algériens, bien que le climat est religieusement pesant, moralement traditionnel, socialement morose continuent-ils à discuter sur l’amour de la vie ? Sur l’amour de voyage ? Sur l’amour des femmes ? Sur l’amour de l’amour ? Pourquoi les Algériens se souhaitent-ils “bonne année” à chaque nouvelle année ?

           Les Algériens, les femmes comme les hommes, les jeunes comme les moins jeunes, se disent, s’écrivent, avec exagération et exhibition : “bonne année” ? Ces belles créatures, sensibles à la fête et à la vie, s’échangent cette expression “bonne année” à chaque nouvelle année grégorienne, tout simplement parce qu'ils n'ont jamais vécu une année bonne ! Les années algériennes sont maigres, cela perdure depuis trois générations d’indépendance ratée ou incomplète !

           Pourquoi les Algériennes et les Algériens, quelques jours avant le jour du nouvel an, sur tous les réseaux sociaux, se pressent de s’envoyer des milliers d’expressions “remplies de roses”, tout simplement parce qu’ils n’ont jamais eu l’occasion ou rare d’offrir, dans les jours ordinaires, une rose à leurs bien-aimées ou à leurs amants, à leurs maris, à leurs femmes, à leurs filles, à leurs tantes, à leurs mamans, à leurs papas, à leurs grand-mères…

           Les fleuristes sont rares dans nos villes, excepté la capitale et quelques autres qui se comptent sur les doigts d’une seule main ! Des feqihs, descendants des frères musulmans et des salafistes, détestent les roses. Ils n’ont pas tardé à cracher leur fatwa interdisant d’offrir un bouquet de fleurs même aux malades, sous prétexte que cette culture est antéislamique. Elle relève du kofr, de l’hérésie !

           Des petites phrases, des courtes expressions échangées, même usées, même pleines de fautes d’orthographe, elles sont là pour exprimer le refus des Algériennes et des Algériens de cette hypocrisie sociale et religieuse qui les frappe ! Pourquoi les Algériennes et les Algériens, et à l’occasion du nouvel an, se souhaitent-ils “une bonne santé” ? Ils font cela tout simplement parce qu’ils n’ont pas d’hôpitaux.

           Pourquoi les Algériennes et les Algériens, et à l’occasion du nouvel an, se souhaitent-ils “beaucoup d’amour” ? Tout simplement parce qu’il n’y a pas d’amour, la prostitution a remplacé l’amour dans cette hypocrisie sociale qui règne.

           Le nouvel an est devenu une occasion pour vivre le rêve dans la langue, dans les quelques expressions de félicitation envoyées sur les réseaux sociaux. Mais n’oublions pas que toutes les révolutions, à travers l’histoire humaine, étaient d’abord et avant tout une sorte de petit rêve inscrit, calqué sur un bout de papier en forme d’une petite expression.

           Ce qui est surprenant et fantastique, c’est qu’en Arabie Saoudite, terre du Prophète, et qui pour longtemps a bombardé les Algériennes et les Algériens de fatwas diaboliques de ses prédicateurs salafistes, ce pays des deux saintes mosquées “al haramayni achcharifayni”, change de clan, change de vitesse et change de vision. En cette année 2020, les Saoudiennes et les Saoudiens ont assisté à une euphorie festive, des feux d’artifice géants et fabuleux dans le ciel de Riyad, pour célébrer le nouvel an !

           Dans ce pays du Prophète, terre sainte, l’époque des prêcheurs salafistes à l’image de Youcef Qaradhawi, d’Asaddis et les autres est révolue. Au moment où le peuple saoudien, les femmes et les hommes, se réconcilie avec la fête, avec la vie, avec le bonheur, avec l’art, le peuple algérien s’éloigne de plus en plus de la beauté et de la joie ! Et pourtant Dieu aime la beauté. Il est la Beauté !
          
A. Z.                      


Relance du métier de la broderie

Envoyé par Renaud
https://www.liberte-algerie.com/ouest/relance-du-metier-de-la-broderie-332293


 Liberté Algérie - Par E. Yacine - 20/01/2020

CHAMBRE DE L’ARTISANAT
ET DES MÉTIERS DE RELIZANE

           La broderie, un métier ancestral à préserver

           Elle entend asseoir une nouvelle approche qui impliquera des artisans, susceptible de contribuer à sa préservation et à sa promotion.

           La Chambre de l’artisanat et des métiers (CAM) de la wilaya de Relizane entend asseoir prochainement une nouvelle approche de production locale, susceptible de contribuer à la relance du métier de broderie traditionnelle dans la wilaya de Relizane, ont assuré les responsables de cette instance. Cette approche, qui impliquera des artisans versés dans la broderie, vise en premier lieu la préservation de ce métier ancien, l’assistance des artisans afin d’aller à la conquête de marchés nationaux et internationaux, leur accompagnement et la coordination avec les organismes et dispositifs de soutien à l’emploi pour la promotion des métiers de l’artisanat, a expliqué la directrice de la CAM.

           La démarche, qui porte sur la promotion du label local en matière de broderie traditionnelle, tient en compte la diversité qualitative du produit, sa rémunération au titre de mesures incitatives aux producteurs et concepteurs, notamment après écoulement sur les marchés nationaux et internationaux du produit qui a acquis une réputation dans des pays européens. Ce métier, qui ne cesse de se développer grâce aux artisanes relizanaises, est devenu, au regard de la qualité des produits réalisés, un label artisanal et commercial véhiculé par les riches motifs et dessins mettant en exergue un génie sémiotique, alliant authenticité et modernité, que seules les artisanes chevronnées peuvent décoder, interpréter et en évaluer l’authenticité et la dextérité professionnelle de son auteur.

           La broderie traditionnelle constitue aussi bien une source de fierté qu’un répertoire, usant de produits divers et de différentes formes et tailles, pour graver des signes et décors reflétant des aspects des us et de traditions de la région, leur donnant un plus de beauté lui ouvrant la voie sur les marchés nationaux et les manifestations nationales et internationales et créant, aussi, une ressource vivrière pour tant de familles, a indiqué Fatima B., une des brodeuses de la région détenant une quinzaine d’années d’expérience dans le métier. Selon la CAM, plus de 50 artisans et artisanes spécialisés dans la broderie traditionnelle, parmi 100 artisans immatriculés à la CAM parmi les femmes au foyer et non immatriculées, ont manifesté le souhait d’adhérer au nouveau système, dans le but de développer ce segment artisanal et contribuer au développement du tourisme, aussi bien dans la région qu’à l’échelle nationale.
E. Yacine                      


Situation sécuritaire à Annaba

Envoyé par Noël
https://www.elwatan.com/regions/est/annaba/situation-securitaire-a-annaba-pres-de-2000-personnes-arretees-en-novembre-24-12-2019


 El Watan - Par LEILA AZZOUZ - 24/12/2019

Près de 2000 personnes arrêtées en novembre

           Les citoyens de la wilaya de Annaba n’ont, de plus en plus, plus peur. En effet, les habitants des chefs-lieux de Annaba, d’El Bouni, d’El Hadjar et de Sidi Amar dont les cités, qualifiées de quartiers chauds, sont devenus paisibles.

           Il y a à peine quelques mois, Annaba était la capitale de la délinquance, du banditisme, de la drogue dure (cocaïne), de la contrefaçon, de la falsification et de la confection de faux documents officiels. Les vols de voitures, de motocycles, les cambriolages et la prostitution se sont transformés en actes banals.

           Les citoyens semblaient se faire à l’idée que dans cette wilaya, également soumise à tous les trafics d’influence et de corruption, on n’est en sécurité nulle part. Les malfrats, pourtant identifiés et arrêtés à plusieurs reprises et fréquentant les milieux censés être sous contrôle de la police, ne sont aucunement inquiétés.

           Aussitôt arrêtés, ils étaient souvent libérés après leur procès qui, au pire, se soldait d’une peine avec sursis. Dans cette wilaya, il était interdit de sortir accompagné de sa fiancée ou de son épouse et ses enfants, en voiture récente, de parler au téléphone mobile, de porter un sac, un bijou ou de faire du lèche-vitrine pour d’éventuels achats et, surtout, de se rendre à la poste ou dans une banque pour un dépôt ou retrait d’argent. Les malfrats étaient toujours là, aux aguets et n’hésitaient pas à vous attaquer à l’aide de couteaux et bombes lacrymogènes.

           Les efforts consentis depuis quelques mois dans la lutte contre le crime organisé et la protection des biens et des personnes ont fait disparaître ce cauchemar.

           Pour preuve, en novembre dernier, pas moins de 1974 personnes ont été arrêtées, dont 455 individus objets de recherches par les services de sécurité, 303 pour port d’armes prohibées, 517 pour détention de drogues – douces et dures – et psychotropes et le reste, soient 699 personnes sont mis hors d’état de nuire pour divers crimes et délits.

           Cet important coup de filet dans les rangs du banditisme est le fruit de 3083 opérations policières. Bien qu’elle dure encore, la lutte contre les «parkingueurs» et les scooters se poursuit toujours.
LEILA AZZOUZ                      

MESSAGES
S.V.P., Lorsqu'une réponse aux messages ci-dessous peut, être susceptible de profiter à la Communauté, n'hésitez pas à informer le site. Merci d'avance, J.P. Bartolini

Notre Ami Jean Louis Ventura créateur d'un autre site de Bône a créé une rubrique d'ANNONCES et d'AVIS de RECHERCHE qui est liée avec les numéros de la Seybouse.
Pour prendre connaissance de cette rubrique,

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sur le site de notre Ami Jean Louis Ventura

« L’avenir de Bône à travers les rêveries du jeune étudiant Paul »

             Il y aura bientôt 60 ans, un jeune Bônois, Paul PIRO, 17 ans, glissait dans la boîte aux lettres du bureau de la Dépêche de Constantine, à Bône, ce que, naïvement, il considérait comme son premier article. Et il le signait de son seul prénom, Paul, sans le nom de famille, de crainte qu’on le prenne pour un illuminé. Quelque semaines plus tard, un dimanche - quel mois, quelle année, 1960 sans doute, Paul ne s’en souvient pas précisément ? - , l’ « article » paraissait sous le titre « L’avenir de Bône à travers les rêveries du jeune étudiant Paul ».

             Paul en était fier mais bien modestement, il pensait que Jean Péroni, responsable de « La Dépêche de Constantine à Bône », n’avait rien à se mettre sous la dent en ce dimanche. Paul est devenu le journaliste qu’il a toujours voulu être, a écrit plusieurs livres dont « De Bône à Annaba » et « L’Algérie entre ciel et terre » (Editions Alan Sutton) . Aujourd’hui, son amour pour sa ville natale qu’il revisite de temps en temps, est toujours vivace. Mais il a perdu la coupure de presse de sa jeunesse…

             Même si Paul PIRO qui a déjà effectué des recherches notamment à Verailles, aux archives-presse, il est conscient de la difficulté de la chose.

             Mektoub et merci
         Mon adresse est, (cliquez sur) : paul@piro-curtis.info
De M. Pierre Jarrige

Chers Amis
Voici les derniers Diaporamas sur les Aéronefs d'Algérie. A vous de les faire connaître.
    PDF 131                                                   PDF 132
    N° 132                                                       PDF 132A
    N° 133                                                       PDF 133
    N° 134                                                       PDF 134
    PDF 135                                                   N° 135
    PDF 135a Pierre Jarrige
Site Web:http://www.aviation-algerie.com/
Mon adresse : jarrige31@orange.fr

Dis-moi Grand-Père,                   
                    Dis-moi Grand-Mère
Envoyé Par Jean Louis


          Dis-moi pourquoi Grand-père, je te vois si souvent
          Te retrouver avec des Amis ?
          Vous parlez toujours d'un pays lointain
          Avec des mots et de gestes.

          Dis-moi Grand-père, de l'église au cimetière,
          Du monument aux Morts où je vous vois
          Déposer des fleurs sue une stèle en pierre,
          Quelle en est la raison, au fond de toi ?

          Dis-moi Grand-père, vous chantez souvent les " Africains "
          J'ai entendu dire que vous étiez " Pieds-Noirs ".
          Et pourtant, si j'ai vu une larme à vos yeux souvent,
          Je n'ai jamais remarqué que vous aviez les pieds noirs !

          Dis-moi Grand-Mère, pourquoi j'aime tant ta cuisine ?
          Couscous, Paella et notamment le délicieux potaré, sont pour moi un régal.
          Et si les noms des gâteaux que tu me prépares,
          Sont dans une langue inconnue, quel régal !

          Dis-moi Grand-Mère, tu m'apprends des mots, des chants,
          Dans une langue qui n'est pas celle de Papa,
          Que toute la famille et les Amis aiment à entendre,
          Pourquoi Grand-Père, Grand-Mère, votre regard est triste quand vous parlez de là-bas ?
Merci Grand-Père
Merci Grand-Mère.

                                        Sandrine Buzzone



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Notre liberté de penser, de diffuser et d’informer est grandement menacée, et c’est pourquoi je suis obligé de suivre l’exemple de nombre de Webmasters Amis et de diffuser ce petit paragraphe sur mes envois.
« La liberté d’information (FOI) ... est inhérente au droit fondamental à la liberté d’expression, tel qu’il est reconnu par la Résolution 59 de l’Assemblée générale des Nations Unies adoptée en 1946, ainsi que par les Articles 19 et 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948), qui déclarent que le droit fondamental à la liberté d’expression englobe la liberté de « chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».


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