LE CHANT DE NAÏLA
Envoyé par Albert BUONO

LE CHANT DE NAÏLA

Quand par les nuits d'automne la pluie noie les étoiles
Boit le parfum lilas de son ciel de métal
Et déroule le froid sur son tapis trop grand
Naïla
Abandonne la couche où l'absence la glace.

Dans le canoun rouge où le gâteau de miel
Ne cuit plus pour l'époux
Elle égaille les braises du passé...

Au chaud de rêves sans pensées
Elle fige l'attente ...

Le rebab perlé d'émeraudes hyalines
Quitte le coffre de noces
Pour les doigts de l'épouse
Qui chante le retour:

L'eau des nuits étrangères
Jamais fleuries
A coulé sur mon corps plus froide que l'hiver.
Dévêtue de sommeil j'égrène des étoiles
Sur la tente où le combat fini
Prêt à me revenir
Mon Tigre blanc repose...

Son ample burnous blanc s'apprête à le draper
Des nobles plis de nos rochers.
Dans les nuits trop légères de son poids
Je m'en suis revêtue comme de son étreinte.

J'en ai fait ma maison sans issue et sans baies
Fermée aux quatre vents
Et je brode ton nom
Sur le riche tapis en laine de tes moutons
Dont le nombre et les ans
Comptent ta longue absence
Mais aussi ton aisance et ma fidélité ...

Pour notre grande fête
J'ai tué le plus vieux, le père du troupeau
Acquis aux premiers jours
Pour hâter ton retour ...

J'en ai gardé la peau
Et je roule mes doigts dans les boucles touffues
Quand j'ai besoin de toi ...

Ton ample burnous blanc t'attend ...
Dans les soirs où le ciel est noyé
De lumière qui n'est plus embaumée
Il rayonne
Pareil à l'âme qui fuit un corps en auréole.

Alors j'entends la ronde blanche
Des chœurs de jeunes vierges ...
D'une main colorée de henné,
Sur l'anche de leurs lèvres
Elles bégaient leur appel à l'amour.

Tandis que mon solo file vers toi

J'attends éperdument l'époux
Que mon père m'a donné
Pour reprendre mon silence immobile
De servitude ardente ...