La PLUS ANCIENNE
PRESENCE FRANCAISE en ALGERIE

En marge de l'exposition Mémoires traversées, qui se tient actuellement au théâtre municipal de Béziers, sous l'égide de l'Organisation des rapatriés du Biterrois - Hérault, il n'est pas sans intérêt de rappeler un fait historique ignoré de beaucoup et dont on eût aimé que cette excellente exposition se fasse l'écho.

Si l'Algérie a été conquise par la France en 1830, le drapeau du roi de France flottait sur l'Algérie depuis bien des années auparavant. En effet, vers 1628, la France établit sur la côte algérienne, entre Bône et la frontière tunisienne, à La Calle, un comptoir commercial connu sous le nom de Bastion de France. Un ancien nid de corsaires barbaresques sur lequel devait régner, au nom du roi LOUIS XIII, un gentilhomme de la Chambre du roi, Corse d'origine et Marseillais d'adoption: Samson NAPOLLON.

Ce comptoir, qui devint prospère, fut un élément de stabilité dans cette région si agitée. Les navires de commerce y trouvaient un havre de paix et on y pêchait dans ses eaux un corail de très grande réputation. La Calle comptait en 1962 environ 5000 habitants. L'Amicale des Callois, aujourd'hui très active et fière de ce grand passé, est représentée à Béziers par Maxime ANELLI.

L'Algérie conquise par la France, La Calle se peupla peu à peu. Revenus nombreux, les corailleurs logeaient dans leurs barques. On releva les ruines de la presqu'île et, sur l'emplacement actuel de la ville, on construisit des baraques en planches. Plus tard, on traça le plan de la future agglomération et on concéda des lots.

Mgr. DUPUCH fut si heureux de voir s'accroître la petite chrétienté qu'il vint, le 29 avril 1843, consacrer cette petite église qui depuis si longtemps avait servi de chapelle à l'ancien établissement , français de la pêche du corail. Dans le rapport qu'il en fait, Mgr. se déclare enchanté de sa visite et se félicite de constater par lui-même comme tout marche à souhait sous le rapport religieux: le curé s'occupe des enfants et a ouvert une école dans son presbytère.

En 1851, l'hôpital commencé en 1843 est inauguré, avec sa chapelle, comme hôpital civil et militaire. En 1853, deux sœurs de la Doctrine chrétienne font l'école dans un ancien café. Le 29 novembre 1860, une quinzaine de personnes reçoivent la confirmation des mains de l'abbé PAVY, vicaire général et frère de l'illustre Mgr. PAVY.

En 1872, le Père Alexandre, franciscain, curé de Bizerte, donna une magnifique mission. Du 7 février au 14 mars, l'étroite église ne désemplit pas et le prédicateur passa une grande partie de son temps au confessionnal. On compta plus de mille communions. Un grand nombre d'hommes et de femmes, qui ne s'étaient plus approchés des sacrements depuis de longues années, accomplirent leur devoir pascal. 43 personnes, toutes avancées en âge, firent leur première communion. Il s'ensuivait un renouveau de ferveur et l'église s'avéra vite insuffisante pour contenir le flot toujours croissant des fidèles.

L'année de cette fameuse mission, le curé se lamentait de son exiguïté: Elle mesure 18,40m sur 6,30m, dit-il dans son journal. Je ne compte pas, bien qu'il soit dans l'église, le péristyle de 2m de longueur, qui ne peut contenir que fort peu de personnes. Une tribune le domine, qui a environ 3m sur 6,30m.

Cet état de choses eut une fâcheuse conséquence: Le nombre des communions pascales, écrit le même curé dans une note envoyée à l'évêché en 1874, diminue tous les ans. Il faut attribuer ce résultat lamentable à l'insuffisance de notre église et à sa situation qui est loin d'être centrale. Nos femmes françaises perdent peu à peu l'habitude d'aller à l'église, parce qu'elles ne sont pas sûres d'y trouver une place. Ou bien encore, lorsqu'elles parviennent à s'y placer, parce qu'elles se trouvent confondues et mêlées dans un encombrement des plus mal commodes.

Dès lors fut conçu le p et d'érection d'une nouvelle église plus vaste. Le 23 avril 1876, nous voyons le Père CREUSAT, jésuite, récemment nommé curé de La Calle, prier l'ingénieur des Ponts et Chaussées de Bône d'engager M. le Maire à mettre immédiatement en adjudication la construction de la nouvelle église, sans attendre l'achèvement des études pour la nouvelle mairie.

Le 24 avril de la même année, c'est une supplique adressée au Maréchal de Mac MAHON, président de la République, afin d'obtenir un subside pour la construction de la nouvelle église.

La commune avait voté un crédit de 40000f. Plusieurs souscriptions avaient été ouvertes. Mgr. ROBERT, évêque de Constantine, fit l'impossible pour envoyer 3000f, avec promesse d'une plus forte somme dès qu'il le pourrait.

Enfin, le 1er août 1876, on commence les fondations. Le 4 août, M. le Curé se rend en surplis sur les lieux avec deux enfants. Il bénit les fondations et les parsème de petites médailles de la Sainte Vierge.

C'est le 16 octobre 1876 qu'eut lieu la pose de la première pierre de l'église de La Calle. La venue de Mgr. COMBES, évêque de Constantine et de M. l'abbé PAVY, vicaire général, donna lieu à de grandioses et enthousiastes manifestations.

(Revue Ensemble, N° 201, Février 1995, pages 11 à 13)


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