PENDANT LA BATAILLE
Selon GAGAYOUS

Mon père ce maqu’reau qui fait quatre cents coups
Un homme comme lui y a plus, brave mortel et tout,
Ac un arabe des quais qu’on s’l’appelait « anisette »
Que plus vieux il aimait, rapport ses coups de tête
Et ses gimps à la mort. Dedans les baroufas
Y a pas un soir, dio Cane ou on se soulait pas.
Une fois à Joannonville, is’avaient fait la fête,
Et de trop qui savaient descendu des canettes,
Un baccanal terrible. Mon père c’était un Lion
Y s’la faisait tout seul ac l’accordion,
Et dedans les bistrots, debout dessur les chaises,
En Maltais i chantait le pauv la Marseillaise.
Qué des bosses de rire le monde on se tapait.
Ma un homme d’un seul coup, i se met à le gimpser.
Asba ! y fait mon père, qui c’est çula ? Punaise !
Qui se tient le courage pendant la Marseillaise
De venir ansulter les Français ? a de bon
Qui z’ont plus qu’à s’lever le pantalon.
Les falsos c’est trop ca m’dégoutent.
C’était un Espagnol qui se cassait la croute
Ac des Glaouis grillées et un bol d’escargots
et qu’on s’lavait débarqué de dessur un cargo.
Et du temps qu’l’Anisette lui disait « repete »
Et qui s’le menaçait d’un coup de tête,
L’homme, cet Espagnol, cette caisse de mort
Y s’attrape un syphon qui l’était plein encore
Et vise au front mon père en criant « Caramba »
L’Coup y passa si prés que de cul y tomba
Dessur l’accordion qui l’était en arrière.
Paye s’y quand même à boire, qui a dit mon père.

(Revue Ensemble N° 212 Avril 1998, page 55)