UN ACHARNEMENT POUR UN GÉNOCIDE

Comme on enseigne n'importe quoi dans les livres scolaires sur l'Algérie, il faut toujours rappeler des choses bien connues, ou signaler des réalités occultées.

Nous ne le ferons pas ici, afin de nous limiter à deux faits qui se suffisent en eux-mêmes.

Le premier se rattache à la note bien connue, du 8 juillet 1962, signée par Louis Joxe, Ministre d'Etat, enjoignant à toutes les autorités militaires de ne pas laisser entrer les troupes supplétives sur le territoire métropolitain.

Certains officiers, à qui on avait confié des soldats arabes ou kabyles qui étaient français par le coeur, et par leur sang versé, les avaient ramenés à Marseille.

L'ordre de Louis Joxe, fidèle exécutant, de Charles De Gaulle, les obligeait à les remettre sans armes sur un bateau qui les ramènerait à Alger ou Oran.

Là, ils étaient attendus par des fellaghas, des dépeceurs, à qui on avait laissé un pays civilisé, après leur avoir proposé "la paix des braves"! Les malheureux furent torturés et exterminés, tout comme ceux qui étaient restés désarmés sur le territoire algérien.

Les officiers qui obéirent à la note du 8 juillet furent récompensés par une fin de carrière "honorable".

Soulignons que cet ordre était postérieur aux massacres du 5 juillet à Oran, et que ceux qui l'avaient donné était parfaitement informés. Ils savaient, après la boucherie d'Oran, quel sort attendait ceux qu'ils renvoyaient.

Informés ou non, certains officiers refusèrent d'exécuter cet ordre. Ils furent pourchassés par les barbouzes, une corporation factieuse qui différait beaucoup de la Police nationale, tant par l'esprit que par le recrutement.

Certains officiers furent pris et condamnés. D'autres s'échappèrent, et on organisa contre eux des attentats mortels qui, parfois se trompèrent de cible.

C'est la révolution de 1968, qui, par ailleurs eut tant de conséquence néfastes pour la France, qui mit fin à cette traque et permit d'amnistier les condamnés.

Les familles meurtries restaient avec leurs souffrance, et les morts restaient dans les affres de leurs agonies.

Dans cette guerre la France et sa civilisation (et son pétrole), les instituteurs ont été des cibles privilégiées, fournissant le premier mort, Guy Monnerot, le 1er novembre 1954, et le soixante-dixième, Henri Wolff, le 5 août 1962.

C'est au "Trait d'union", bulletin de l'Amicale des anciens instituteurs d'Algérie et à son actif secrétaire Gabriel Chaudet que nous devons de connaître la deuxième directive de Louis Joxe, Ministre d'Etat

En date du 15 juillet 1962. Elle est ainsi rédigée et elle justifie notre titre: "Je vous renvoie, au fur et à mesure, à la documentation que je reçois au sujet des supplétifs. Vous voudrez bien recherchez, tant dans l'armée que dans l'administration, les promoteurs et les complices de ces entreprises de rapatriement, et faire prendre les sanctions appropriées. Les supplétifs débarqués en métropole, en dehors du plan général, seront renvoyés en Algérie.

Je n'ignore pas que ce renvoi peut être interprété par les propagandistes de l'OAS comme un refus d'assurer l'avenir de ceux qui nous sont demeurés fidèles. Il conviendra donc d'éviter de donner la moindre publicité à cette mesure".

signé Louis Joxe

Concluons en donnant un chiffre officiel du 27 mai 1973: 200 000 supplétifs; 2500 emprisonnés par le FLN, 150 000 disparus ou exécutés par le FLN. Il était préférable que l'administration ne fut pas informée.

(Revue Ensemble N° 209, pages 94-95, Octobre 1997)